Hélène Receveaux et Annabelle Euranie avaient les crocs

Le Japon a commencé son tournoi, le dernier de 2015 par un impeccable 5/5 (cinq titres, trois médailles d’argent et trois de bronze) et a laissé la concurrence aux fraises (cinq médailles pour l’Europe, trois pour le reste de l’Asie et une pour le Brésil). La France s’est distinguée avec une médaille d’argent pour Hélène Receveaux et une médaille de bronze pour Annabelle Euranie. Deux filles en lutte avec d’autres Françaises pour se battre à Rio de Janeiro dans huit mois. Sûrement pas un hasard. Les Japonais ont réveillé Naohisa Takato tandis que Masashi Ebinuma est tombé sur plus fort que lui, aujourd’hui. Chez les féminines, c’est l’éclatante supériorité d’Ami Kondo et Misato Nakamura qui a frappé les esprits.

-60kg : Takato en vedette

Naohisa Takato est le meilleur -60 kilos de la planète. Après son triomphe parisien face à Vincent Limare, il l’a rappelé aujourd’hui avec trois grosses victoires en enfilade. Le Mongol Dashdavaa, le Sud-Coréen Kim et le Russe Mudranov. Que des médaillés mondiaux. Sa finale est parfaite avec un sode et un o uchi-gari pour faire entendre raison au Tchétchène Mudranov. Ce vendredi, sauf en finale, il a semblé moins dans l’action que dans l’attente de l’erreur de son adversaire, art où sa vitesse d’appuis fait merveille. Saura-t-il rester dans les clous jusqu’au Jeux Olympiques ? La question se pose alors que son comportement l’a privé de grandes échéances l’an dernier. Il faut l’espérer. Se passer de son talent serait terrible. En une semaine, Eric Takabatake (Brésil) a éliminé Vincent Limare d’une médaille de bronze à Jeju et il a sorti Sofiane Milous aujourd’hui à Tokyo. Avec sa garde croisée, le judoka d’Argenteuil s’expose aux contres. Le Brésilien n’a pas loupé son affaire et marque waza-ari (ura-nage) sur la seule attaque forte du match. 

1. TAKATO Naohisa (JPN)
2. MUDRANOV Beslan (RUS)
3. KIM Won Jin (KOR)
3. SHISHIME Toru (JPN)

-66kg : Takajo plus fort qu’Ebinuma

Masashi Ebinuma gagne souvent, presque tout le temps, mais qu’une seule fois dans sa carrière à Tokyo (2009). Le triple champion du monde est parfois un marionnettiste avec ses adversaires. mais en finale, c’est bien Tomofumi Takajo qui semblait avoir vu toutes les cartes de son compatriote avant la partie. Takajo a remporté pour la troisième fois ce Grand Chelem avec une très belle performance. Il marque trois fois à Ebinuma dont deux kata-guruma visiblement gardés dans la manche jusque-là. Ebinuma ne parviendra qu’à inscrire un yuko sur un uchi-mata. Takajo s’offre de la lumière et une petite chance d’aller aux Jeux Olympiques à la place du samouraï de Meiji. Ebinuma garde les faveurs des pronostics et, hormis contre Takajo, il a facilement dominé sa journée. Le champion du monde 2015, le Coréen An Baul, a proprement sorti le champion olympique russe Galstyan avant de se faire dominer par l’activité du Japonais Sho Tateyama. Mais on reverra ce phénomène rapidement et sûrement à Rio où il sera candidat à l’or olympique. Comme Ebinuma. Ou Takajo. 

1. TAKAJO Tomofumi (JPN)
2. EBINUMA Masashi (JPN)
3. DAVAADORJ Tumurkhuleg (MGL)
3. TAKAICHI Kengo (JPN)

-48kg : L’amie Kondo

Elles ne sont que deux sur la route qui les mène au Brésil mais c’est bouché. Haruna Asami et Ami Kondo passent leur temps à se klaxonner, à se doubler et se redoubler. Avant le crash de l’une d’entre elles en avril lors des sélections nationales, c’est Ami Kondo qui s’est offert aujourd’hui le luxe d’ouvrir la route. Arrivée sur le tapis de la finale avec un grand sourire – au contraire de Asami – Kondo a mené les débats jusqu’à marquer sur waza-ari sur o-soto puis boucler son vendredi en immobilisation. La championne du monde 2014 est bien la meilleure super-légère du moment dans l’archipel. A voir si elle sera la première à ramener l’or olympique depuis Tamura en 2004… Sans médaille en tournoi depuis juin 2014, Sarah Menezes a réparé ce trou béant avec du bronze. Elle a battu la Mongole Munkhbat et a failli sortir Asami en demi-finale. A huit mois de ses Jeux Olympiques, le timing est idéal. Seule engagée française dans la catégorie, Laetitia Payet n’a pas montré beaucoup d’arguments face à la Brésilienne Brigida au premier tour. Brigida vaut sans doute un peu moins que sa cinquième place aux derniers championnats du monde mais elle est solide. Elle est 20e à la ranking list et Laetitia Payet, 23e. Pas grande différence entre les deux combattantes sur le papier et sur le tatami, les fausses attaques à répétition de la Française ont scellé la partie.

1. KONDO Ami (JPN)
2. ASAMI Haruna (JPN)
3. KONDRATYEVA Nataliya (RUS)
3. MENEZES Sarah (BRA)

-52kg Euranie bronzée, Nakamura toujours leader

Annabelle Euranie et Priscilla Gneto sont sur deux lignes parallèles et l’une des deux seulement ira à Rio, pas l’autre. Aujourd’hui, leurs deux lignes se sont croisées le temps d’un combat. En repêchages. Quatre minutes acharnées sur les mains et globalement dominées par l’aînée des deux Tricolores qui l’emporte d’un yuko (o-uchi-gari) dans les vingt dernières secondes. Elle bonifie ensuite ce succès contre Gneto avec une médaille de bronze arrachée à Yuka Nishida (waza-ari). Voilà un pas de plus sur le chemin du Brésil pour Euranie (retrouvez sa réaction). Elle y a mis beaucoup d’agressivité pour répondre à la montée en puissance de Gneto. Avant l’affrontement franco-français, Annabelle Euranie a sorti la Coréenne Kim Mi-Ri sur uchi-mata (yuko) puis a bloqué sur Ai Shishime. Face à la toute petite Shishime, Annabelle Euranie n’a pas réussi à imposer son pressing. Elle a eu les mains plusieurs fois, mais ses attaques ne trouvaient pas la cible. Sur sa seule opportunité, un o-uchi-gari emboîté dans un mouvement d’épaule, Shishime score un waza-ari puis un un yuko sur l’immobilisation. Dans le quart de finale suivant, Priscilla Gneto peut avoir encore plus de regrets face à la médaillée mondiale Yuki Hashimoto. Son combat est impeccable à coups de o-goshi et de ko-soto. Malheureusement, elle aussi est victime de la pénalité de début de combat. L’or revient logiquement à Misato Nakamura. La triple championne du monde de la catégorie n’a pas été transcendante mais assez au-dessus pour dérouter Yuka Nishida dans l’un des classiques des moins de 52 kilos, puis Shishime dans l’assaut final. 

1. NAKAMURA Misato (JPN)
2. SHISHIME Ai (JPN)
3. EURANIE Annabelle (FRA – Blanc-Mesnil SJ)
3. HASHIMOTO Yuki (JPN)

-57kg Label Hélène

L’image va imprimer les rétines et faire un carton sur Youtube. Comme le scotch de Shohei Ono sur Ugo Legrand en finale des mondiaux 2013, Hélène Receveaux a subi un châtiment magnifique sous la forme d’un uchi-mata aérien et debout de la Japonaise Tsukasa Yoshida en finale des -57 kilos. L’or échappe à Receveaux mais elle agrippe ici sa première médaille en Grand Chelem, et son septième podium de l’année (retrouvez la réaction de la Dijonnaise). Des statistiques qui comptent. Une régularité remarquable rehaussée par sa performance du jour car son chemin était empierré ce vendredi. La liane Lien (Taïwan) prend uchi-mata (waza-ari), la Kosovare Gjakova un o uchri-gari (yuko) puis c’est Rafaela Silva, championne du monde 2013, qui est décollée sur uchi-mata. Et cette fois, la fameuse pénalité de début de match joue en faveur de la Française. Karakas sera absorbée en demi-finale sur un uchi-mata puis une immobilisation. Tout allait bien jusqu’à Yoshida. Déjà vainqueur d’Automne Pavia à Paris en octobre, cette jeune fille de 20 ans prend de l’épaisseur à chaque sortie. De là à menacer Kaori Matsumoto ? Cette dernière a prouvé qu’elle n’avait aucune marge. Bien que championne du monde 2015, elle n’est pas immunisée contre la défaite. La Brésilienne Rafaela Silva lui a rappelé qu’elle goûtait peut d’être en position de défense en ne-waza. Après Filzmoser (immobilisation) et Malloy (clef), c’est donc Silva qui a mordu la louve en juji-gatame. Peut-être une voie à approfondir pour des Françaises souvent malheureuses contre elle. En France, Hélène Receveaux est la chasseuse, la Yoshida d’Automne Pavia, empêtrée dans trois défaites au premier tour consécutives. Là aussi, le feuilleton sera passionnant.

1. YOSHIDA Tsukasa (JPN)
2. RECEVEAUX Helene (FRA – Alliance Dijon Judo 21)
3. DORJSUREN Sumiya (MGL)
3. KARAKAS Hedvig (HUN)

 

Retrouvez les tableaux complets ci-dessous:
Grand Chelem de Tokyo 2015 – Tableaux Complets