Le -66kg de l’OM Judo a régalé les amateurs de judo
Le combattant du jour
Crédit Photo : Thomas Rouquette/L’Esprit du Judo
Si il ne devait rester qu’un image, qu’une action de cette 1ère journée des championnats de France juniors, nul doute que le uchi-mata du judoka de l’OM Judo administré après seulement 17 secondes combat en finale des -66kg recueillerait la majorité des suffrages. Un mouvement de jambes de haut vol, dans le style de celui produit par la Japonaise Tsukasa Yoshida en finale du Grand Chelem de Tokyo 2015 face à Hélène Receveaux. Magnifique « ashi-waza » très pur, Daniel Jean clôt par ce bijou technique une compétition qu’il aura marqué de sa maîtrise.
Il était attendu, on connaissait sa faculté à produire du beau judo. Mais l’étiquette de favori collée dans le dos du judogi peut inhiber. Et on a d’ailleurs pu percevoir un peu de stress négatif sur son premier combat où les sensations n’étaient visiblement pas là. Mais plus les tours avançaient et plus l’élève de Bernard Tchoullouyan (voir interview plus bas) retrouvaient cette capacité à marquer ippon sur ses techniques favorites : uchi-mata bien sûr, et o-soto-gari.
La demi-finale contre Daiki Bouba (JC Escales Argenteuil) condensera ce qu’on sait de ses qualités bluffantes… mais aussi de quelques carences mentales qui ont eu le don d’énerver sur le bord du tapis le médaillé olympique (en 1980 à Moscou).
Rentrant trop mollement dans le combat, Daniel Jean subissait en effet un joli ippon-seoi à gauche compté yuko. Piqué, le Marseillais mettait alors la surmultiplié et lançait un o-soto-gari rapide et puissant. Premier waza-ari. Un second dans la foulée sur un kubi-nage, pour mettre un terme à sans doute le combat le plus excitant de ce samedi chez les masculins.
Quasiment invaincu au national depuis le début de saison (il finit 2ème à Cormelles-le-Royal derrière Sacha Flament) avec ses victoires à Aix et Epinay-sous-Sénart, vainqueur à Eindhoven, 3ème à Athènes et 5ème à Saint-Pétersbourg, cet étudiant en école d’ingénieur, qui rejoindra l’INSEP à la rentrée alors qu’il n’est que juniors 2ème année s’offre donc un titre national que tout le monde, ou presque, lui prédisait.
Garçon au gros potentiel, Daniel Jean a marqué ce samedi de sa patte de judoka. L’avenir est ouvert.
On a vu…
-Daiki Bouba. Adversaire malheureux de Daniel Jean, ce juniors 3ème année est incontestablement un excellent judoka. Gaucher aux techniques variées, lucide, agréable à suivre sur un tatami, le judoka d’Argenteuil a offert une superbe journée en -66 kg, seulement barré par le Marseillais dans une demi-finale qui était le combat phare de la catégorie.
-Sarah-Léonie Cysique. Elle finit vice-championne de France en -57 kg, mais que de promesses sur ce qu’elle a montré ce samedi ! Forte gauchère, posture droite, elle arrive en finale en ayant collé des ippons à toutes ses malheureuses adversaires.
1ère année juniors mais déjà 2ème à Saint-Pétersbourg, la judokate de l’ACBB a le genre de profil prometteur qui donne envie de la suivre de très près.
Sarah-Léonie Cysique. Crédit photo : Thomas Rouquette/L’Esprit du Judo
-Le combat Jawad Abdelkrim (Dojo Nantais)/Bilel Yousfi (OM Judo). Le 1er faisait partie des favoris en -66kg après ses deuxièmes places à Aix et Epinay. Le second a fini finaliste des France cadets il y a trois semaines avec un judo d’attaque incessant et engagé.
Yousfi s’imposera d’un waza-ari sur un contre, après un ko-uchi-gari du Nantais lancé de trop loin. Mais ce qu’on retiendra surtout ce sont que les deux judokas ont offert un combat engagé, varié et très intense.
-La maturité judo de Romane Yvin. La championne de France 2015 défendait son titre en -48kg. Battue à la surprise générale et dans les dernières secondes par Mélanie Vieu en demi-finale, la judokate coachée par Marine Richard faisait pourtant la plus belle impression dans cette catégorie. Posture, kumikata, déplacements, Romane Yvin connaît la chanson, et sur le bout des doigts. Adepte d’o-uchi -gari et d’un sankaku-jime inversé systématiquement utilisé en liaison debout-sol, celle qui va sans doute monter en -52kg la saison prochaine possède une « attitude » très judo.
Romane Yvin. Crédit photo : Thomas Rouquette/L’Esprit du Judo
-Le ura-nage victorieux d’Etienne Delvert (FLAM 91) pour le bronze. Aérien et surpuissant.
-le duel Bouda/Florimont en -60kg. Ils sont les deux meilleurs -60kg français cette année, incontestablement. Dans la même chambre à l’INSEP, ces deux judokas aux styles très différents étaient les deux épouvantails que les autres combattants ne rêvaient que de déplumer ce samedi. Et ce fut presque le cas en demi-finale !
Thomas Macrez (Dojo Béglais) lançait un yoko-guruma extrêmement rapide que Jolan Florimont (Nice judo) esquivait en tournant sur lui-même à une vitesse encore plus rapide pour un yuko que le champion de France en titre dépassait avec deux waza-ari sur son kata-guruma.
Romaric Bouda (Eure Judo), lui, frisait (de très près) la correctionnelle sur un kata-guruma de Maxime Grenard (Alliance Chagny Sports) compté waza-ari mais que d’autres auraient donné ippon.
Un instant pris du doute de la défaite, le champion d’Europe cadets 2014, au judo si agréable, dynamique et varié s’en sortait par un ko-uchi très collé à son adversaire pour ippon.
Dans une finale plus qu’attendue, Bouda se montra plus tranchant en piquant au sol Florimont pour la gain du titre… alors que ce dernier fut à deux doigts de clouer son copain lors de la 1ère minute !
Les vainqueurs du jour
En -44kg, Justine Deleuil (JC l’Islois) ponctue une saison impressionnante ! Vainqueur à Saint-Pétersbourg, Epinay et Cormelles, elle bat en finale, après une journée pleine d’autorité la cadette Leslie Becerro (Bordeaux Quitaine Judo) d’un yuko.
En -48kg, Anaïs Mosdier (ADST Judo) s’offre son premier titre de championne de France.
Favorite du jour avec Yvin, Urdiales et Boukli, cette judokate qui présente la faculté impressionnante de faire quasi-systématiquement des médailles à chaque compétition à laquelle elle participe. Hormis deux 7ème place aux championnats du monde juniors 2015 et aux championnats de France juniors 2015, alors qu’elle n’était que cadette 3ème année, cette combattante au morote et ko-uchi makkikomi qui impactent fort, se place toujours sur le podium en France ou à l’international depuis septembre 2013.
Si aujourd’hui elle n’a pas livré ses combats les plus aboutis à cause du stress, elle fait le job comme on dit en écartant notamment Shirine Boukli (JC Aramon, qui n’est rappelons-le, que cadette 3ème année) en demi-finale sur un ippon-seoi à gauche et Mélanie Vieu en finale qu’elle immobilise suite à un sumi-gaeshi. Cette dernière réalise l’exploit du jour en battant sur le gong la championne en titre Romane Yvin dans une demi-finale où sa tactique était claire : réussir à placer son juji-gatame à la volée. Ce qu’elle faillit bien réussir à faire !
Avant cela, elle avait sortie dans un golden score étouffant Manon Urdiales.
Très régulière sur la saison (3ème à Cormelles et à Aix, 2ème à Epinay), cette junior 1ère année a prouvé qu’il faudra compter avec elle les deux prochaines années.
En -52kg Gaetane Deberdt (Amicale Laïque Judo Frugeois) gagne sur un joli uchi-mata face à Camille Roussel (JC Aramon).
En -57kg, Véronique Mandeng (AJ Limoges) s’impose au golden score sur un ura-nage fort opportuniste face à Cysique. La judokate limousine, déjà vainqueur de deux European Cup en seniors en 2015 (Lund et Sindelfingen), aura fait une journée très solide avec ses fortes attaques d’épaules. Un style aux faux-airs de Gévrise Emane.
En -55kg, une surprise avec la victoire de Mickael Ferreira (Arts martiaux Saint Gratien) face au grand favori, Théo-Raoul Hebrard (OJV) sur un contre d’uchi-mata compté waza-ari.
En -60kg et -66kg, voir ci-dessus.
Enfin en -73kg, Dylan Roche (Sucy Judo) s’impose sur un suberbe contre ! Loi Le Peltier lance un o-uchi mais le combattant coaché par Frédéric Stiegelmann tourne parfaitement les hanches pour plaquer le judoka périgourdin sur le dos. Une attaque en sen-no-sen touteen fluidité.
Pas forcément dans les favoris du jour, Roche monte sur la 1ère marche du podium après une journée pleine d’envie.
Bernard Tchoullouyan, entraîneur de Daniel Jean : «La journée est évidemment positive. Il a fait une démonstration avec cinq combats pour autant de ippon.
Mais il a aussi montré qu’il y avait encore des choses à corriger ou à améliorer.
Ce n’est pas faute de travailler dessus depuis des mois et de l’avoir bien prévenu ce matin mais Daniel a encore montré un problème de mise en activité dès le début du combat, liée à sa nature, sa personnalité.
De plus, il a parfois tendance à trop réfléchir. Ce qui lui joue parfois des tours. Il le sait : c’est à moi de réfléchir pour lui sur quoi faire ou comment préparer un combat.
Lui n’aura qu’à appliquer les consignes ou ce qui a été travaillé à l’entraînement.
Ses uchi-mata ce samedi, se sont énormément d’uchi-komi, de nage-komi et de travail sur le placement du pied et le déséquilibre car lorsque nous avons commencé à travailler ensemble dessus, s’il faisait uchi-mata naturellement, c’était en ken-ken.
Son o-soto-gari, par contre, a été rajouté à sa panoplie depuis que je m’occupe de lui.
A l’avenir j’aimerais qu’il possède un mouvement à droite pour qu’il ait ainsi un bagage technique très solide. »