Huit noms ont déjà été officialisés
Alors que les championnats d’Europe se dérouleront dans trois semaines à Tel Aviv (26-28 avril, Israël), le comité de sélection a donc publié hier huit noms (le neuvième sera connu après le GP de Turquie). Une équipe masculine au complet, mais sans son leader, Teddy Riner, avec une catégorie doublée que l’on n’attendait pas et de nouvelles têtes qui vont fêter leur baptême du feu lors d’un championnat international.
Un combattant par catégorie
Le communiqué publié hier, précisant qu’un +100kg (cela devrait se jouer entre Nabil Zalagh, Messie Katanga et Hamza Ouchani) serait sélectionné dans quelques jours, n’a fait que confirmer ce que l’organisation d’une poule de sélection, pour la catégorie des -73kg, pouvait laisser deviner. Le staff masculin et la Direction technique nationale ont choisi d’aligner un judoka français dans chaque catégorie. Un choix légitime mais qui prêtera à discussion. Parce que la DTN avait publiquement émis l’idée, alors que le Japon n’avait aligné ni -63kg ni -90kg aux championnats du monde de Budapest, estimant le niveau de leurs combattants insuffisants, qu’elle pourrait en faire de même dans un cas similaire. Ce qui n’aurait d’ailleurs pas été la première fois (en 2013, la France n’avait pas envoyé de -60kg à Rio). Or, la catégorie des -73kg ne rentre-t-elle pas, justement, dans ce cadre ? Ni Pierre Duprat (23e mondial, titulaire aux Jeux de Rio et aux derniers championnats du monde), ni Guillaume Chaine (59e mondial, titulaire aux championnats d’Europe) n’ont pas été retenus pour participer à la poule de sélection. La dernière médaille du premier remonte au Grand Chelem de Russie 2017. Le second au Grand Chelem d’Allemagne 2017. Deux combattants, respectivement âgés de 28 et 31 ans. Le staff semble dire assez clairement qu’il ne comptait plus sur ces deux combattants, par ailleurs en bronze en novembre au championnat de France.
Quid des quatre participants à la poule de sélection ? Benjamin Axus, 23 ans et 29e mondial a pour lui d’avoir été le seul -73kg tricolore à remporter une médaille (d’argent) en 2018 : c’était à l’Open de Bulgarie. Mais, depuis c’est une défaite rapide à deux Grands Chelems, au 1er tour à Düsseldorf en février et au second tour à Ekaterinbourg en mars pour le combattant de l’AJA Paris XX. Hugo Metifiot ? Seulement junior 2e année, 7e des championnats du monde juniors à Zagreb fin octobre 2017, le judoka de Blanc Mesnil Sport Judo n’a, pour l’instant, participé qu’à une seule compétition seniors dans sa carrière et s’est incliné au premier tour à Prague, un Open continental, au mois de mars. Julien La Rocca (SGS) ? Champion de France en titre, le Génofévain, 26 ans, 94e mondial, reste sur une 5e place à l’Open de Lima (Pérou) pour une élimination au 2e tour au Grand Chelem de Paris et au 3e tour à Prague. Enfin, Lucas Otmane (OJ Nice) ? Vice-champion de France 2017, il sort vainqueur de la poule de sélection qui lui assure une participation au GP de Turquie ce week-end et donc aux championnats d’Europe dans quelques jours. Jeune (22 ans), le Niçois est 117e mondial, a gagné trois médailles seniors mais en European Cup. La dernière remonte à mai 2016. Depuis le début de l’année, il a participé aux Grands Chelems de Paris et de Russie et à l’Open d’Autriche (pour une élimination au 2e tour à chaque fois). En clair, une catégorie où la France n’a pas de leader et où les médailles dans les compétitions qui comptent se font très rares puisqu’il faut remonter au Grand Chelem russe en mai 2017 pour voir deux Français monter sur un podium (Pierre Duprat et Benjamin Axus).
Le staff a donc misé sur l’idée d’une concurrence entre « jeunes » combattants pour ces championnats d’Europe. À voir dans les deux ans si il s’agit d’un nouveau « one-shot » ou d’un pari à moyen terme (Tokyo 2020) en passe de réussir.
Le choix de doubler -66kg et -81kg
Deuxième choix déterminant du staff, qui n’est en fait qu’une conséquence du premier : un choix difficile dans les catégories renforcées par une seconde sélection.
Si la décision d’aligner deux combattants en -66kg, avec Kilian Le Blouch (FLAM 91), 39e mondial, 5e à Paris et Daniel Jean (OM Judo), 56e mondial, qui reste sur deux médailles de bronze aux Grands Prix du Maroc et de Géorgie et donc porté par une très bonne dynamique, fait sens (en espérant que la marche ne sera pas trop haute pour un combattant qui sort tout juste des juniors), la seconde catégorie doublée est un choix qui peut surprendre. En effet, on pouvait penser que la 3e place de Cédric Revol (JC Pontault-Combault) lors du Grand Chelem parisien, même si elle est « heureuse » (disqualification de son adversaire) lui donnait du crédit pour une place de titulaire aux côtés de Walide Khyar (FLAM 91), vainqueur du GP de Tunisie et 5e à Ekaterinbourg, comme cela avait été l cas lors du championnat d’urope et du championnat du monde 2017. Certes, Revol perd au premier tour en Russie mais l’arrivée de la délégation à trois heures du matin, après un long voyage et avec pesée le soir même n’a sans doute pas mis le médaillé de bronze des championnats de France 2017 (ainsi que ses camarades) dans les meilleures dispositions. De même, le choix de doubler les -100kg avec Alexandre Iddir, 5e au Grand Chelem de Russie pouvait paraître logique, car ancré lui aussi dans une dynamique. Au pied du podium à Ekaterinbourg, le champion de France 2017 Alexandre Iddir réalise en Russie une de ses meilleures journées dans sa nouvelle catégorie, battant tour à tour le Géorgien Saneblidze (3e à Tbilissi le week-end dernier), le Russe Zankishiev, 11e mondial, 3e aux championnats d’Europe 2017 et vainqueur du GP de La Haye 2017 et le Biélorusse Mukete, seulement 48e mondial, mais 3e aux championnats d’Europe juniors 2017, vainqueur du championnat d’Europe -23 ans 2017, 2e à Prague et finalement 3e en Russie. Paie-t-il son absence de résultats antérieurs malgré sa participation à trois Grands Chelems (Abou Dhabi, Tokyo, Paris) avant Ekaterinbourg ? Cette non-sélection sonne comme une manifestation d’impatience. On attend désormais plus d’un garçon de 27 ans qui a fait les derniers Jeux, deux championnats du monde et quatre championnats d’Europe, pour une seule médaille au championnat d’Europe 2014, et qui a fait plus de dix tournois en un an en -100kg. Etait-ce le bon ou le mauvais moment pour écarter Iddir de la sélection ? L’avenir le dira (peut-être).
Le grand gagnant est le -81kg Jonathan Allardon (ES Blanc Mesnil Judo). Un choix, qui, si on regarde uniquement les résultats bruts, interpelle : la dernière médaille de cet élégant technicien qui impressionne à l’entraînement remonte au 29 septembre 2017, lors du Grand Prix de Croatie. Depuis, ce dernier a participé, sans être médaillé ni classé, au Grand Chelem d’Abou Dhabi (octobre), aux championnats de France (novembre), au Master (décembre), au Grand Chelem de Paris (février), de Düsseldorf (février) et au Grand Prix de Tbilissi (avril). Depuis fin septembre, Allardon ne s’est en fait classé qu’une fois : c’était à Tokyo en décembre. Il finit 5e.
Pour le verre à moitié plein, il faut noter que celui-ci a battu, au Japon, le Russe Aslan Lappinagov médaillé de bronze aux championnats d’Europe 2017, 2e au Masters et 3e à Düsseldorf cette année et n’a souvent perdu que contre des « costauds » : Frank De Wit (3e mondial), Vedat Albayrak (ex Roman Moustopoulos, 27e mondial, 2e au GP de Tunisie, vainqueur du GP du Maroc 2018) ou Dominic Ressel (13e mondial, 3e au GP de Hollande en 2017, 3e à Düsseldorf en 2018). Un bémol, sa dernière défaite en Géorgie contre un Khirgize, Vladimir Zoloev, seulement 43e mondial, dont la dernière médaille remonte à l’Open de Minsk en 2017. C’est donc un choix délibéré, que cette avalanche de sélection indiquait déjà. Ce ticket donné à Jonathan Allardon par le comité de sélection risque de faire un peu parler.
Les noms attendus
Outre donc Walide Khyar, Kilian Le Blouch, Daniel Jean, les autres noms masculins de la liste publiée hier étaient attendus : avec sa médaille d’argent à Düsseldorf, le Racingman Alpha Oumar Djalo (-81kg, RCF) s’était offert son billet pour Israël. Idem pour les deux tauliers du groupe, Axel Clerget et Cyrille Maret tous les deux en bronze à Paris. Axel Clerget, qui participera ce week-end en Turquie à sa deuxième compétition de l’année 2018. Cyrille Maret, lui, battu au 1er tour en Russie, ne sera pas du voyage à Antalya, s’épargnant un régime.
Un groupe pour ces Europe dont la moitié seulement des titulaires ont participé aux derniers championnats du monde en septembre (Khyar, Le Blouch, Clerget, Maret).