Pour ce premier Grand Prix lusitanien, bien dans l’air du temps avec un niveau très disparate – quelques top 10 en vadrouille, voire des numéros 1 mondiaux, au milieu de nombreux non classés – la France avait choisi l’option jeune, voire résolument jeune. Elles sont deux -48kg, sur nos sept représentants au départ, à atteindre le podium, Mélanie Vieu, vingt-trois ans, et la toute jeune Léa Bérès, dix-huit ans.
Pas de bonne surprise française pour les deux catégories masculines du jour avec l’élimination rapide de nos deux -60kg, Maxime Merlin, qui se faisait enrouler comme à Paris par le futur finaliste, le Mongol Sumiyabazar Enkhtaivan, et Théo Raoul Hebrard, qui succombait au tomoe-nage en bout de manche du 12e mondial, l’Espagnol Garrigos. Sina Sadroleslami subissait en -66kg le magnifique mouvement de hanche d’un Moldave de dix-neuf ans, mais déjà 42e mondial, clone en plus jeune et un peu moins brillant de Denis Vieru, et vice-champion d’Europe -23 ans l’année dernière, Radu Izvoreanu.
Chez les féminines, Martha Fawaz, moins de vingt ans, se hissait en place de trois dans le tableau famélique des -57kg, avec le grand mérite, elle qui est 91e mondiale, de dominer par un contre au golden score, la Tchèque Vera Zemanova, 32e. Dans le combat pour le bronze, pas de chance, elle tombait sur la légende portugaise des féminines, Telma Monteiro, trente-six ans, mais toujours 6e mondiale, la championne au quatre finales mondiales (et cinq médailles) aux onze médailles européennes, qui s’était fait surprendre à l’usure en demi-finale par la Néerlandaise Pleuni Cornelisse sur un joli o-soto-gari en déplacement. Revancharde devant son public, la grande Monteiro plaçait un très beau o-soto-gari à la Parisienne pour prendre une médaille de bronze qui n’ajoutait rien à sa gloire, mais faisait manifestement son bonheur du moment. Champion, c’est un état d’esprit.
La France sur le podium
Léonie Gonzalez surpassait l’Anglaise Yasmin Javadian en -52kg, mais tombait ensuite sur rien de moins que… la championne olympique Distria Krasniqi, qui la sortait d’un petit mouvement de hanche minimum.
Deux -48kg donc, et deux beaux parcours pour elles. Mélanie Vieu, vingt-trois ans et 53e mondiale depuis son titre aux championnats d’Europe des -23 ans et sa deuxième place au Grand Prix de Zagreb (derrière Blandine Pont), remettait le couvert après un Grand Chelem de Paris discret. Elle sortait deux combats efficaces avec ses sumi-gaeshi latéraux, face notamment à la Belge Ellen Salens, vingt-cinq ans et 44e mondiale. La Portugaise Costa, 12e mondiale, surmotivée elle aussi par le plaisir d’inaugurer ce nouveau Grand Prix à la maison par une médaille, lui plaçait un joli petit o-uchi-gari en demi-finale. Tandis que Catarina Costa allait prendre une belle médaille d’or par un joli de-ashi-barai sur la Coréenne Lee Hyekyeong, ancienne championne du monde juniors 2016 en -44kg, Mélanie Vieu ne lâchait pas l’occasion de prendre le bronze en réussissant un efficace uchi-mata-sukashi sur la Néerlandaise Amber Gersjes, championne du monde juniors 2018 et 35e mondiale. Une excellente référence pour elle qui n’était pas leader nationale dans ces années-là. Le travail paie.
Léa Bérès, elle, l’est, leader nationale en juniors. En bronze aux championnats d’Europe, cinquième des championnats du monde, la Bordelaise de dix-huit ans ne perd pas de temps. Tout juste sortie de sa médaille de bronze mondiale juniors perdue sur un efficace kata-te-jime face à la Brésilienne Rafaela Batista, elle contrôlait bien la gauchère anglaise Amy Platten, médaillée de bronze aux championnats d’Europe -23 ans, et allait dominer ensuite la Brésilienne Amanda Lima, vingt-deux ans, dangereuse par ses recherches de transition au sol permanentes. Un combat qu’il fallait gagner pour conjurer le mauvais œil. Elle poussait la Coréenne Lee Hyekyeong au golden score avant de mettre un pied dehors, mais reprenait sa marche en avant face à la Belge Salens, qu’elle dominait cette fois aux pénalités. Du bronze pour la médaille, mais en confiance, c’est de l’or.
Freddy sort ses griffes !
Loin au-dessus des préoccupations des non classés, ou membres anonymes du top 100, voire largement au-delà, quelques léviathans du judo mondial étaient donc à Porto pour chercher un peu de lumière et d’or. Des combats surtout, et des points au classement… à commencer, par la Kosovare Distria Krasniqi, numéro un mondiale et championne olympique ! C’était son second tournoi post lauriers dorés et elle commence à resserrer le jeu, non sans abandonner un waza-ari au passage. Quelques larmes et quelques points pour l’ancienne championne olympique Rafaela Silva, en or en -57kg pour son retour après une suspension pour dopage qui l’avait privée des Jeux. À vingt-neuf ans, elle n’a pas lâché et sera là pour Paris.
Chez les garçons, le spectacle était en -66kg avec la présence de Denis Vieru n°2 mondial. Ce n’était pourtant pas lui qui faisait d’abord le spectacle, mais le Suisse Freddy Waizenegger, vingt-deux ans, 180e mondial, qui gagnait deux combats avant de sortir aux pénalités le champion du Japon juniors Yamato Fukuda, déjà un joli coup, avant de réussir l’extraordinaire exploit à son niveau d’éliminer proprement le Coréen An Baul, vainqueur au Masters, champion d’Asie, médaille de bronze des Jeux et numéro un mondial. Manifestement lessivé, le maître asiatique se faisait surprendre par l’élève helvétique sur un renversement bras-tête à la Uta Abe. Les vacances n’ont pas suffi.
En finale, Denis Vieru mettait fin à la plaisanterie en expédiant le Suisse sur son avant-arrière électrique et son tai-otoshi en bout de manche. Tout de même, une sacrée belle journée pour Freddy !