Journée française ce vendredi à Abou Dhabi. Avec six médailles, les Tricolores dominent les débats d’un Grand Chelem à la participation minimaliste – pour ne pas dire problématique – pour un tournoi de ce niveau : 223 combattants au total. La catégorie la plus «dense» du jour, les -66kg, ne comptait que vingt-deux participants.
Buchard, force tranquille
Une journée où les favoris auront eu la mainmise totale ou presque. Il y a bien sûr Amandine Buchard. Vice championne olympique et n°1 mondiale, la Française, en bronze avec son club du PSG il y a deux semaines à Perpignan, n’aura eu besoin que de trois combats pour s’adjuger son quatrième titre en Grand Chelem. Pas forcément le plus dur à aller chercher, même si en finale, la Française ne laissa pas la Britannique Chelsie Giles, en bronze à Tokyo fin juillet, le loisir de la piéger. Trois shidos et le tour était joué. En phase de reprise, peut-être un peu gênée par une blessure aux côtes contractée il y a quelques semaines (elle a eu toutefois le feu vert du corps médical pour monter sur le tapis ici aux Émirats Arabes Unis), «Bubuche» n’aura pas eu à forcer son talent. Loin d’être dans une forme optimale, la Tricolore était malgré tout très au-dessus. Journée similaire pour le Taiwanais Yung Wei Yang. Vice champion olympique des -60kg et désormais numéro un mondial, il soigne son retour sur le circuit, plaçant un très profond mouvement d’épaule à droite au Russe Ramazan Abdulaev, en argent pour la seconde fois sur un Grand Chelem après Paris en quelques semaines. Têtes de série n°2 de leur tableau respectif, Denis Vieru le Modave (-66kg) et Telma Monteiro l’inusable Portugaise (-57kg) s’offrent respectivement leur troisième et sixième titre en Grand Chelem. Le premier bat le Russe Ismail Misirov (3e aux championnats d’Europe -23 ans 2021) aux pénalités alors que la seconde surprend Priscilla Gneto sur une action debout/sol/debout en ceinturant la championne d’Europe 2017 pour marquer un waza-ari décisif sur tani-otoshi. Seule non tête de série à s’imposer ce vendredi l’Italienne Assunta Scutto (-48kg), championne du monde juniors début octobre en Sardaigne, piège Shirine Boukli avec son tokui-waza : un o-uchi-gari aussi soudain que léché. Concentré sur les mains dans un combat âpre à ce niveau, la Française se fait joliment surprendre par le fauchage.
Ce soir, il y a donc cinq titres pour cinq pays différents. Mais la France fait la différence avec ses cinq autres médailles.
La France avance ses pions
Avec une finaliste dans chaque catégorie féminine du jour, les filles de Ludovic Delacotte et Severine Vandenhende perpétuent une nouvelle fois l’image d’une équipe dominante, face à une opposition en pointillée. Il n’y a qu’une victoire cependant. Boukli continue d’engranger après le bronze à Paris, mais se fait surprendre par la jeunesse. Priscilla Gneto est sur une belle dynamique après sa victoire au Grand Prix de Zagreb puis aux France, mais laisse la main à la très expérimentée Monteiro. C’est le bronze pour Mélanie Legoux-Clément (-48kg), dominée aux pénalités par la Russe Giliazova, 20e mondiale. Elle bat pour le bronze la Russe Irina Dolgova aux pénalités, dans une séquence mi-comique mi-tragique où l’arbitre khirgize ne savait visiblement pas quel motif était le bon pour justifier la troisième moulinette contre Dolgova, qui en souriait en saluant la Française.
Faiza Mokdar (-57kg) monte sur son premier podium de Grand Chelem, médaille attendue pour l’une des plus belles pépites du judo féminin de ces dernières années. Journée très positive pour elle puisque Mokdar – bien que battue elle aussi par la formidable Monteiro sur un joli mouvement d’épaule en double attaque – domine de manière rapide et incontestable celle qui la prive de son quatrième titre européen juniors début septembre, l’Israélienne Kerem Primo (qui n’est rappelons-le que cadette 2e année !). Un juji-gatame opportuniste, qu’elle placera également à la Tchèque Vera Zemanova en repêchages avant de piquer au sol une autre Israélienne, Timna Nelson-Levy, septième à Tokyo cet été pour le bronze. Cinq médailles sur six engagées (Chloé Devictor perd au premier tour contre la Maorcaine Soumiya Iraoui), trois finales. Globalement rassurant.
La dernière médaille bleu-blanc-rouge revient au lutin de l’ESBM Judo, Cédric Revol. Victorieux de l’Open de Malaga puis des France, ce spécialiste de morote-seoi-nage, tout en dynamisme aujourd’hui, remporte mine de rien sa quatrième médaille de bronze en Grand Chelem, mais la première depuis Paris 2018, en plaçant son spécial à l’Ukrainien Dilshot Khalmatov pour un waza-ari qu’il gérera ensuite tranquillement. Une vague positive pour le nouveau champion de France à laquelle le travail mis en place avec Baptiste Leroy depuis plusieurs semaines n’est sans doute pas du tout étranger.
En -66kg, Walide Khyar termine au pied du podium. Très agressif et entreprenant, le Français se fait surprendre par le corps à corps du Mongol Bashkuu Yondonperenlei, l’un des combattants les plus dangereux de la catégorie, lors du combat pour le bronze. Auparavant, il s’était incliné en demi-finale aux shidos, dont deux pris pour prise illicite à la manche, face à Denis Vieru, revanche de la demi-finale de Paris. Décevant pour lui, mais l’arbitre ne l’a guère aidé, alors qu’il semblait dominateur face au technicien moldave. Toujours aussi fougueux, Khyar a encore besoin de repères dans cette nouvelle catégorie, mais il se montre déjà à la hauteur des hommes forts et c’est très encourageant.