Magnifique conclusion cet après-midi à Tbilissi. Il y eut bien sûr la victoire de Guram Tushishvili, en finale, face à Ushangi Kokauri sur un mouvement d’épaules que le vice-champion olympique maitrise tant. Il y eut avant la victoire de Lasha Bekauri face à l’Azerbaidjanais Heljan Hajiyev, inarrêtable ou presque depuis plusieurs mois en -90kg avec le bronze au Portugal en janvier et l’argent à Paris début février. Le o-soto-gari du Géorgien champion olympique alors que son adversaire était en garde croisée est tout simplement magnifique. Il y eut, enfin, l’hommage rendu à Varlam « Lipo » Liparteliani. Capitaine de nombreuses années de cette si talentueuse et forte équipe masculine, le vice-champion olympique de Rio 2016 en -90kg et triple vice-champion du monde (2013, 2017 et 2018) se faisait acclamer par la salle. Un honneur mérité pour ce combattant charismatique et consensuel. Deux titres géorgiens, ajoutés à ceux d’Eteri Liparteliani – demandée en mariage à la sortie du tapis pour son petit ami de longue date, Temur Nozadze – et de Lasha Shavdatuashvili et voilà le pays hôte en tête des nations, devant l’Espagne (deux titres Ariane Toro Soler en -52kg et Nikoloz Sherazadishvili en -100kg, deuxième au Portugal et à Paris !). Un résultat logique, et ce, même avec l’absence d’Ilia Sulamanidze, le prodigieux successeur de Liparteliani en -100kg.
Et les Français ? Bien sûr, le parcours d’Audrey Tcheuméo (PSG Judo) attis(r)ait tous les regards. En duel avec Madeleine Malonga pour le dernier ticket olympique, la vice-championne olympique de Rio était la première à entrer en lice de mano a mano, ici à Tbilissi. Résultat ? Une cinquième place. Clairement animée de l’œil du tigre, Audrey Tcheuméo transperçait la Croate Karla Prodan en huitième de finale avec son o-soto-gari. Mais en quart, la Tricolore s’inclinait aux pénalités face à la jeune Ukrainienne Yelyzaveta Lytvynenko. Victorieuse de la Slovène Metka Lobnik au sol, elle retrouvait la double championne d’Europe en titre Alina Boehm pour le bronze.
Une combattante elle aussi en concurrence avec une compatriote pour décrocher son sésame pour Paris en la personne d’Anna Maria Wagner. Championne du monde 2021 et médaillée de bronze olympique à Tokyo, celle-ci était finalement rayée du tableau puisque pas au poids la veille ! Une opportunité en or pour Boehm de marquer le coup afin de se rapprocher de la titularisation pour les JO. Pas forcément l’adversaire idéale pour Tcheuméo du coup. Et si la Française dominait le début de combat avec sa puissance, l’Allemande ne craquait pas et lançait plusieurs attaques. De quoi faire pénaliser la Française. Deux shidos partout. Et alors que sur une séquence où Tchoumi dominait, Boehm se décalait pour lancer un sumi-gaeshi compté waza-ari. Pas de podium pour Audrey Tcheuméo qui a sans doute manqué une l’occasion de mettre la pression sur Madeleine Malonga qui combattra au Grand Chelem d’Antalya dans une semaine. La championne du monde 2019 a désormais son avenir olympique entre ses mains.
La meilleure performance tricolore du coup ? Elle est l’œuvre de Coralie Hayme (JC Maisons-Alfort), en argent ce soir. Vingt-troisième mondiale ce matin, la Française qui restait sur une troisième place au Grand Prix du Portugal mais une élimination à Paris, a montré le meilleur visage qu’on lui connaisse avec des victoires contre la Chinoise Xu Shiyan, n°3 mondiale, en quart de finale et la légende cubaine Idalys Ortiz en demi-finale en ne-waza. En finale face à l’immense surprise allemande Renee Lucht, la Française se faisait piquer au sol à la toute fin du temps réglementaire. Troisième médaille en Grand Chelem pour Hayme et ses vingt-trois ans.
Une victoire surprise… parce que cette combattante de vingt-cinq ans, 28e mondiale, avait fait tomber (au sens propre et figuré) en demi-finale la Japonaise Akira Sone, championne olympique et du monde en titre ! Un contre sur une tentative mal préparée de tai-otoshi de la Nipponne faisait rentrer l’Allemande de la short list des judokas victorieuses de la reine des +78kg. Mieux (ou pire pour elle), Sone ne montait même pas sur le podium, totalement écrasée par la puissance saissisante de la précoce Coréenne Hyeonji Lee, 1m83, championne du monde cadette 2023 et médaillée de bronze aux championnats du monde juniors en octobre dernier. Deux défaites pour Sone c’est autant qu’en un seul jour qu’entre le Grand Chelem de Paris 2019 et le Masters 2022 à Jérusalem. A-t-on vu aujourd’hui les limites de Sone ? Possible. Un enseignement, pas le moins important, de ce Grand Chelem géorgien.