Officiellement retenu pour arbitrer les Jeux olympiques de Tokyo (du 23 juillet au 8 août), Matthieu Bataille, 42 ans, participera donc à ses seconds JO après ceux d’Athènes en 2004 où il évoluait alors comme combattant en +100kg. Une sélection que le triple médaillé mondial accueille avec bonheur et sans pression particulière.
Matthieu, cette sélection était plutôt attendue non ?
C’est vrai que j’étais bien placé à la ranking list des arbitres. Pour autant, avec la crise sanitaire que nous connaissons et de possibles restrictions du nombre de participants lors des JO, on craignait à un moment que le nombre d’arbitres soit limité. Cela n’a pas été le cas. Tant mieux.
Ta carrière internationale d’arbitre a été météorique !
C’est drôle, car si vous m’aviez interrogé il y a dix ans, je ne suis pas sûr que je vous aurais dit que je voulais devenir arbitre international et être présent aux JO (sourire). Mais en 2017, j’ai vu que la fédération internationale de judo avait mis en place un cursus spécifique et accéléré pour les anciens médaillés continentaux et mondiaux. Du coup, je me suis dit : « pourquoi pas moi ?« . En effet, je me suis dit que ce serait une manière de retrouver le haut niveau mondial, mais dans un autre costume.
Me voilà donc à arbitrer au niveau départemental, régional puis sur les demi-finales nationales. En mai 2017, j’obtiens ma licence d’arbitre international lors de la coupe européenne juniors de La Corogne en Espagne. Dès l’année suivante, j’arbitrais mes premiers championnats du monde à Bakou.
Quels sont tes souvenirs les plus marquants depuis trois ans ?
Ce ne sont pas forcément des combats. Plutôt mon premier Grand Chelem à Paris, en février 2018. Arbitrer pour la première fois ici, dans une enceinte où j’ai des souvenirs inoubliables (Matthieu Bataille est l’un des héros du titre mondial masculin par équipes en 2011, NDLR). Il y aussi les championnats du monde 2019. Parce que c’était au Japon, le pays du judo, et au Budokan, un lieu mythique. Après, il faut savoir que l’on n’a pas tellement le temps de profiter des pays où l’on arbitre : on arrive le mercredi, le jeudi a lieu le tirage au sort, les vendredi, samedi et dimanche sont consacrés à la compétition pour un retour le lundi.
Quels sont les atouts d’avoir été un judoka de haut niveau ?
Je pense que cela m’aide à deux niveaux : dans la lecture du combat, savoir qui fait quoi et comment l’interpréter, et dans le placement vis-à-vis des combattants. Après, j’essaie d’avoir la même exigence que j’avais en tant qu’athlète en revisionnant systématiquement tous mes combats, pour voir où j’ai éventuellement fait des fautes et les gommer pour les compétitions à venir. Je ne suis pas formateur, mais voilà les deux conseils que je donnerais à un jeune arbitre : pratiquer beaucoup et bien le judo et toujours laisser les judokas faire le combat.
Comment gères-tu cette période si particulière pour le circuit international ?
J’en ai profité, durant les sept mois d’arrêt total, pour regarder beaucoup de combats, afin de toujours mieux connaître une majorité d’athlètes et leurs caractéristiques. J’ai repris en octobre dernier lors du Grand Chelem de Budapest, qui nous a donné l’occasion de nous remettre dans le bain. Là, je sais que je vais aller arbitrer le Grand Chelem de Tashkent (5-7 mars). Mais pour l’instant, je ne sais pas si je vais officier sur un autre évènement et si il y aura un séminaire organisé par la FIJ avant Tokyo.
Du coup, as-tu hâte d’y être ?
Oui…et non. J’espère d’abord pouvoir arbitrer quelques compétitions pour être au top « la semaine J » (sourire). Après, je prépare les JO comme une compétition spéciale. Je les prends comme un évènement identique aux autres car, finalement, nous allons arbitrer les mêmes combattants que d’habitude.