Camara et Erb ajoutent deux médailles à la moisson française
La Française Samah Hawa Camara en finale des -78 kg, mais battue par l’étonnante Tunisienne Sarra Mzougi / Officiel IJF
FORT LAUDERDALE – J4 / 25 octobre 2014 : … Et deux qui font huit ! Encore une belle journée pour le judo français aux championnats du monde juniors 2014. Hissée à trois médailles à la deuxième journée (le titre d’Amandine Buchard et le bronze d’Astride Gneto en -52 kg, la finale de Kamal Fikri en -55 kg), l’équipe nationale en récolte cinq de plus sur les deux dernières journées.
Cette fois, pas de médaille masculine malgré deux engagés. Comme au championnat d’Europe Nell Honoré Ariano Rebouka ne parvient pas à s’exprimer dans la catégorie des -100 kg. Battu au second tour au niveau continental par l’Ukrainien Rakita, il est cette fois arrêté d’entrée aux pénalités par le discret Coréen Hong Jinsu. Quant au poids lourd Emre Sanal, il échoue lui aussi dès le premier tour contre le Japonais du jour, Yusei Ogawa, qui n’ira pas plus loin.
Les deux médailles françaises sont donc féminines une nouvelle fois et amènent le groupe féminin français à six médailles (pour neuf engagées), confortable deuxième nation derrière les intouchables japonaises qui vont finalement en ramener huit, dont cinq médailles d’or, excusez du peu.
Le printemps tunisien en -78 kg
En -78 kg, une catégorie ouverte, où aucun continent ne semble dominant. C’est ainsi que la vice championne d’Europe polonaise Pacut battait rapidement la Japonaise Takayama… mais se faisait surprendre ensuite par un Tunisienne autoritaire, Sarra Mzougi. La championne d’Europe ukrainienne Turchyn était nettement battue par la Canadienne Ana Laura Portuondo Isasi… mais c’est l’Allemande Anna Maria Wagner qui marquait ippon à cette dernière au tour suivant. Et les deux médaillées de bronze du championnat d’Europe, les Françaises Julie Pierret et Samah Hawa Camara ?
Julie Pierret commençait par battre la Néerlandaise Lesterhuis, qu’elle avait dominée pour le bronze au niveau européen, mais se faisait surprendre par la Hongroise Salanki, 7e du championnat d’Europe. Elle échouait ensuite sur la Polonaise Pacut. Samah Camara, 19 ans, entrait en revanche à grands coups de manivelle dans ce jeu de massacre et battait l’Egyptienne Nasser, puis la Néerlandaise Groenwold, non sans avoir été mené d’un yuko par cette combattante classée septième du dernier championnat d’Europe. Le joli coup venait ensuite avec un bras de fer acharné contre l’Allemande Wagner qui prenait deux yuko en techniques de jambe ou en contre. La finale était ouverte comme le reste du championnat, puisque c’était la Tunisienne que la Française allait y retrouver. Déception, c’était la Tunisienne qui gérait mieux leur corps à corps et marquait ippon sur osae-komi, après avoir marqué waza-ari debout. Une occasion gâchée pour la jeune Camara, qui – c’est la tendance de ce jeune groupe France – impressionne par son engagement, son esprit de combat et son potentiel physique plus que par la finesse tactique et la maîtrise technique de son judo. Sarra Mzougui emporte le premier titre mondial junior tunisien depuis celui d’Alhem Azzabi en -78 kg en 2002. C’est aussi la seconde médaille tunisienne de ce championnat du monde avec celle d’Olfa Saoudi, médaillée en 2013 et 2014 en -44 kg.
Erb, le podium attendu
Il reste à jouer la carte maîtresse Marine Erb, la très dominatrice championne de France des +78 kg, victorieuse dans les tournois de référence en Russie et en Allemagne, mais surprise au championnat d’Europe par l’Ukrainienne Sapsai et « seulement » troisième. Cette Ukrainienne ne manque effectivement pas de ressources puisque c’est elle qui parvient en finale, en battant la jeune Allemande Michelle Goschin, cadette l’année dernière, déjà numéro un au classement mondial junior et vice champion d’Europe. Marine Erb faisait le parcours autoritaire qu’on attendait d’elle avec une victoire au sol sur une Kazakhe et un duel gagnait d’une pénalité contre la très redoutable jeune Cubaine de 18 ans Gusmary Garcia Sévigné, championne du monde cadette 2013.
Asahina, la tueuse japonaise
Malheureusement pour elle, elle rencontrait ensuite la Japonaise Sara Asahina, une jeune Japonaise aux dimensions colossales, surtout dans la largeur et le tour de taille, 18 ans seulement, et depuis très peu puisque son anniversaire avait eu lieu juste avant le championnat, le 22 octobre. Cette ado nippone surdimensionnée était déjà championne du monde cadette en 2011, 5e du Grand Chelem de Tokyo en 2013 et ne perd que contre la crème de l’élite mondiale senior. Malgré son jeune âge, elle paraît intouchable en junior. Pourtant puissante, Marine Erb ne peut que rebondir sur le coffre et le ventre rond de Sara Asahina, à peu près impuissante. Le système d’attaque d’Asahina, fondé sur un formidable ashi-guruma / harai-goshi n’est pas original au pays des lourdes japonaises, mais elle est si dominatrice physiquement, si manifestement puissante et stable, quand elle repousse d’un coup de hanche les adversaires qui l’attaquent, qu’elle prend peu de pénalités. C’est d’ailleurs aux pénalités qu’elle bat Marine Erb – la seule du jour à ne pas prendre ippon contre elle – avant de mettre un formidable ippon à l’Ukrainienne en finale. Sara Asahina ? Un nom à retenir pour les Jeux de Rio en 2016, elle aura 19 ans, et pour les Jeux de Tokyo en 2020, elle aura 23 ans. Marine Erb a 20 ans, ce qui lui ouvre, à elle aussi, le chemin de deux olympiades. En la voyant battre facilement la Croate Sutalo (vice championne d’Europe 2012) par une sankaku osae-komi maîtrisé de bout en bout, on se disait qu’elle avait toute la crédibilité qu’il fallait pour y prétendre.
Marine Erb, troisième, mais dans l’ombre de la prometteuse Japonaise de 18 ans à peine, Sara Asahina / Officiel IJF
Japon, France, Russie
En l’emportant en -100 kg devant le Russe Niyaz Ilyasov, le Japonais Ryutaro Goto permettait aux masculins japonais de gagner une seconde médaille d’or (pour quatre finales et cinq médailles) et de battre sur ce combat décisif la Russie (une médaille d’or, deux d’argent, deux de bronze) au classement des nations chez les masculins, où la France occupe la neuvième place. Mais la France se rattrape chez les féminines avec ses six médailles (mais deux finales et un seul titre), pour une seconde place loin derrière le Japon (cinq médailles d’or, deux d’argent, une de bronze).
Le Japon culmine à treize médailles en tout pour sept titres, ce qui est exceptionnel, encore mieux que les douze médailles de l’année dernière (pour trois titres seulement), mais un peu moins bien que les treize médailles, pour… douze titres de la génération 2011 des Takato, Ono, Ojitani. Tout va bien pour le Japon.
Malgré son unique titre, la France termine deuxième nation (une médaille d’or, deux d’argent, cinq de bronze) devant la Russie, ce qui ne lui était pas arrivé depuis la grande année 2008. Elle fait mieux que la médaille d’or et les quatre médailles de bronze de l’année dernière, et beaucoup mieux que les deux médailles de bronze de 2011. Surtout, cela fait deux ans que les masculins français retrouvent le chemin du podium, ce qu’ils n’avaient pas su faire en 2010 et 2011.
Enfin on se souviendra de ce championnat du monde junior comme d’un très grand cru, à deux ans des Jeux de Rio. À confirmer dans les années à venir.