Une prépa avec le nouveau champion du monde ? Pourquoi pas !
On les connait le kim’ débraillé après un combat acharné. On les voit à la tv, la médaille autour du cou. On les croise lors des Mercredi de l’Equipe de France. Et derrière le rideau ? « Une journée avec… », évoque la rencontre, entre coulisses et confidences, d’un protagoniste, participant au judo d’aujourd’hui et de demain… Hier, c’était journée « reprise » avec le nouveau champion du monde des -81kg, Loïc Piétri. Et « pour comprendre mon travail, je te propose de t’entraîner avec moi». Chiche !
Par Sarah Sudre
9H C’est la rentrée pour le jeune niçois, sacré champion du monde le 30 août dernier à Rio de Janeiro, qui a repris le chemin de l’Insep en … trottinette. Comme avant. « Je ne suis pas passé au bling-bling et aux grosses voitures », explique le judoka, humble et sincère.
10H45 Ce matin, c’est préparation physique pour le pensionnaire de l’AC Boulogne-Billancourt. « Il faut déjà retrouver une forme physique. Après l’effort intense de Rio et mes vacances, ce serait inconscient de revenir en force », raconte le fils de Marcel Pietri, ancien médaillé européen dans les années 80.
Dans la salle de musculation du dojo, au fond de la pièce, la -52kg de Mulhouse Lucile Duport s’accroche à son kimono. Dans un coin, le combattant du JC Maisons-Alfort, Vincent Limare enchaîne les kilomètres sur tapis roulant. Quant à Loïc, il m’explique la séance : « Je reprends en douceur. L’objectif : travailler dans le général (jambes-cardio-bras) pour aller au fur et à mesure de la saison dans le spécifique. Là, c’est une séance d’une heure trente, spécial bras. Triceps, biceps, trapèzes, pectoraux tout y passe ».
« Ça va aller ? », ose t-il demander (!), le sourire au coin des lèvres.
Sept minutes déjà de monte-charge. Loïc gère le souffle mais les bras souffrent. Il ne soulève pourtant que 45kg (ndlr : en milieu de saison, il dépasse les 130kg). Malgré l’effort, il tient à expliquer, « mon but n’est pas d’éclater mon record personnel ou celui d’un autre. Je travaille sur la rigueur et l’endurance. Réaliser un records de poids en 1 minute, c’est cool mais mon judo n’a pas besoin de ça ».
Quant à moi 5kg, c’est déjà trop !
S’enchaînent ensuite les exercices de développé-couché et tirages. Accompagné par la « radio judo », mélangeant zouk, Sexion d’assaut et Rihanna, l’ancien champion de France, d’Europe, et du monde juniors 2009 sort les crocs. Quelques gouttes sur son visage, quelques tremblements sur mes bras… « Ne lâche pas. Après, tu seras satisfaite de ton travail ! », un air de coach qui lui va bien. Une motivation pour lui également car Loïc s’entraîne seul. Une punition ? Non au contraire. Une liberté que le nouveau staff technique lui a offerte l’année dernière : « Je préfère travailler en solo. Ma musculation est liée à ma problématique de judo. Je ne fais rien qui ne soit pas réfléchi à l’avance ». Un caractère, une force aussi. « On the Moon » alors le petit Loïc ? Pas tant que ça.
12h30 Direction les étirements… Loin d’être l’atout des « gros bras ». Moment relaxation plutôt où Loïc se confie : « En 2012, j’ai fait des erreurs. J’étais en surentraînement. Les blessures sont apparues comme la suite logique d’un travail inadapté à mon judo. Aujourd’hui, j’ai trouvé comment faire les choses à ma manière, peut-être de façon moins intense mais plus réfléchie (ndlr : 2 semaines d’entraînement/ 1 semaine de récupération), avec l’envie de bien faire et le soutien de Stéphane Frémont et Franck Chambilly ».
12h50 Les vestiaires, soit le lieu où l’ancien judoka de l’OJ Nice s’exerce sous la douche aux polyphonies corses, ses racines. Un véritable talent !
13h Solitaire, il est à l’entraînement. Bavard et généreux, il est à l’extérieur. Et c’est à la cafétéria de l’Insep qu’il prend le temps de retrouver ses amis et de noter ses pensées dans son petit calepin, qui ne le quitte jamais. Une pose « midi » suivie d’un café avec Clément Delvert, tels des « ptits papis ». Des discussions sport, cinéma et politique…« Et les filles » ? « Mon statut de champion pourrait être un plus pour séduire mais ça ne va pas avec ma personnalité. Conclusion : RAS ». « Je préfère être traité d’égal à égal que ce soit avec les filles, les judokas et les coachs », finit-il par dire presque gêné de l’estime et des marques de sympathies que lui témoignent les gens.
15h Qui dit rentrée sportive, dit bilan médical. Test à l’effort, prise de sang, examens radiologiques. « Une routine ».
Après ? La fin de journée lui appartient. Même si l’on sait qu’en rentrant chez lui, le premier champion du monde français des -81kg grattera un petit son à la guitare ou s’appliquera au dessin. Une passion qu’il aurait aimé améliorer dans des études d’arts appliqués mais « aujourd’hui, je suis trop perfectionniste pour lier deux choses à la fois et les études pourraient nuire à mon judo », conclut-il.
Et puis d’un « à bientôt » à l’accent charmeur, Loïc Piétri est reparti sur sa trottinette. Quant à moi, courbaturée je fus, le lendemain !
La semaine prochaine : Julia Rosso, internationale juniors -52kg