Une 1ere médaille française, une 5e médaille d’or japonaise

Quand le Japon est dans un jour sans, il ne fait qu’une médaille d’or sur les deux finales qu’il obtient encore aujourd’hui. Malgré le talent qu’ils avaient affiché dans les tournois de préparation, Soichi Hashimoto (-73kg) et Tsukasa Yoshida (-57kg) sont en effet deux débutants à ce niveau. Hashimoto était en 2010 un bon junior japonais en -81kg, vainqueur au tournoi d’Allemagne des -20 ans, mais qui ne fut pas choisi pour les championnats. On le retrouve champion du Japon en 2015 en -73kg, l’année où débute sa carrière internationale avec un ticket pour le Grand Prix de Chine (1e) et le championnat d’Asie (3e). En 2016, il gagne le Master, le championnat d’Asie, puis le Grand Chelem de Tokyo, poursuivant en 2017 avec les Grands Chelems de Paris et de Russie, et enfin le championnat du monde de Budapest. À 26 ans depuis quatre jours, la fenêtre de tir était étroite. Il ne fallait pas se rater. C’est sans doute pour cela que ce matador qui n’a pas perdu un combat international depuis 2015, posture droite et regard assuré, n’était aujourd’hui qu’une copie de lui-même. Il a un peu fait comme si. Comme si tout allait bien, comme s’il maîtrisait la situation, mais il était manifestement un peu à côté, trop conscient du fait que si ce n’était pas aujourd’hui, ce ne serait jamais. D’autres s’y sont consumés, lui, c’est le judo qui l’a sauvé. Ses routines au kumikata, son tai-otoshi d’orfèvre, son sode à une main contre le diablotin chevelu, l’Azéri Heydarov, champion d’Europe en titre, sont sortis finalement au bon moment, l’ont porté vers la première marche. En finale, mangé mentalement et tactiquement par le féroce Azéri Orujov, il a encore trouvé la solution par le judo.

Tsukasa Yoshida ? Elle aussi est débutante à ce niveau. À 21 ans, cette championne d’Asie junior 2012 était invincible en 2016, un peu moins dominante depuis quelques mois. Pas très bien non plus aujourd’hui, elle a failli passer tout de même, sur le rythme et grâce à son travail en techniques de jambe et ses enchaînements au sol. Mais c’est la n°1 mondiale mongole Sumya Dorjsuren qui a attrapé la chance par les cheveux en finale après avoir failli elle aussi passer à la trappe dans un combat formidable qui a duré presque un quart d’heure de temps effectif, débordée parfois, mais impossible à faire tomber, la championne mongole a soudain trouvé le temps faible chez son adversaire, pour un brusque kubi-nage qui finissait par amener l’introuvable waza-ari. Pas de chance pour la jeune Yoshida, en quatre rencontres, c’est la première fois qu’elle perd sur la meilleure mondiale au classement.
Quand un pays commence à gagner des médailles, et même des titres, avec des combattants qui sont dans un mauvais jour, et même si c’est le Japon, il faut se poser des questions ! En attendant les réponses, le Japon est à cinq médailles d’or, deux médailles d’argent, une de bronze en six catégories, et les trois garçons qui sont passés ont tous gagné… Même si les jours à venir seront peut-être plus difficiles pour eux (ils ne présentent notamment pas de -63kg ni de -90kg), il s’agit déjà d’un triomphe monumental qui s’inscrit dans la lignée d’Astana en 2015, six médailles d’or, quatre d’argent, cinq de bronze. Et cela avec sept combattant(e)s (sur neuf) qui faisaient en ces trois premiers jours leur premier championnat du monde.

La Mongolie peut-elle s’intercaler ?

Presque aussi fort aujourd’hui que le Japon ce mercredi, la Mongolie s’est installée à la seconde place des nations en récoltant une très chère médaille d’or – la seule que le Japon n’a pas réquisitionnée — et une de bronze, qui s’ajoute à la médaille d’argent et de bronze déjà remporté au premier jour. Dynamisée peut-être par la victoire à l’élection présidentielle du lutteur et judoka Khaltmaagiyn Battulga, présent lundi pour discuter avec Poutine et aujourd’hui pour voir briller son équipe, la Mongolie passe manifestement un nouveau cap. De quoi pousser Sumya Dorjsuren, n°1 mondiale depuis au moins deux ans, médaillé mondiale en 2015, finaliste olympique en 2016 à convertir enfin l’essai. De quoi aussi inquiéter la France, assise sur son statut de meilleure seconde nation depuis 2010. Derrière l’intouchable Japon, il faudra atteindre les deux médailles d’or de base pour le garantir. Nous n’y sommes pas encore.

Receveaux, le premier pas qui compte

Une première médaille, c’est un premier pas dans la bonne direction ! Adossée à un tirage a-priori heureux – ce qui n’était pas le cas de Priscilla Gneto qui paraissait très bien aujourd’hui, mais subit un nouveau coup du sort – la Française 4e mondiale ne fait pas d’erreur sur les filles à sa main : l’Espagnole Equisoain, 30e mondiale, la Coréenne Ji Sunyeo, 65e mondiale, l’Anglaise Smythe-Davies, 47e mondiale, subit la supériorité en ne-waza de la Japonaise (2e), mais fait la performance espérée, et décisive, contre la légende portugaise Telma Monteiro, certes descendue à la 35e place, mais toujours redoutable compétitrice, comme elle l’avait montré en battant la championne olympique plus tôt dans la journée. La Dijonnaise la surclasse physiquement, implacable dans toutes les séquences et marquant opportunément d’entrée en contrant le sutemi tactique de Monteiro. Un combat impeccable et une belle récompense pour cette combattante qui a dû patienter longtemps derrière Automne Pavia, alors qu’elle est dans les dix meilleures mondiales depuis deux ans, et pas sélectionnée pour les Jeux alors qu’elle était tête de série. Dans une catégorie des -57kg qui se renouvelle largement – retraite, éloignement ou essoufflement des trentenaires Matsumoto, Monteiro, Malloy, Caprioriu… et Pavia, toutes ces combattantes qui trustaient les podiums mondiaux depuis 2010 – cette médaille française est une excellente nouvelle pour l’olympiade. Hélène Receveaux peut espérer être régulière à ce niveau, en travaillant pour faire encore mieux dans les trois ans qui viennent.

Deux médailles françaises chez les garçons, mieux ou moins ?

Une médaille de bronze pour quatre combattants engagés aujourd’hui, la France a été moins efficace, c’est le moins qu’on puisse dire, que le Japon ! Les féminines sont dans leurs marques néanmoins avec le même résultat à ce stade qu’en 2015. Les garçons n’y sont toujours pas, malgré la solidité de Pierre Duprat, qui aura peut-être manqué un peu d’audace pour faire l’exploit contre le futur finaliste Orujov. Benjamin Axus était trop « tendre » pour le niveau, comme on pouvait le craindre. Mais nos garçons avaient emporté deux médailles en 2014 et 2015 en tout et pour tout. Qu’en sera-t-il en 2017 ? Malgré ce départ timide, cette équipe peut faire beaucoup mieux dans les quatre jours qui restent.