Belle troisième place en équipe pour la France

On était curieux de voir ce que pouvait donner cette « nouvelle formule » de compétition à trois filles et trois garçons, destinée à faire du judo par équipes une discipline olympique. Il était intéressant aussi de voir les hiérarchies se mettre en place… et la place de la France dans celle-ci.
Le premier a–priori est celui de l’injustice. Le passage de sept à cinq combattants avait déjà privé une partie des individuels de la possibilité de représenter leur pays en équipe. Cette fois la purge est encore plus nette. Les poids stratégiques sont désormais les -57kg, les -70kg et les lourdes et chez les hommes les -73kg, les -90kg et les lourds. Au revoir les autres et merci. Mais, c’est paraît-il la condition de l’entrée du par équipes aux Jeux et le chiffre ne serait pas encore fixé. On parle d’une équipe à huit combattants filles et garçons encore possible.

Faire progresser le judo féminin, une nécessité olympique

Le second ressenti, positif, est celui d’une cohérence plus grande de l’événement, jusque là divisé en deux épreuves parallèles. Il y a l’équipe de France contre l’équipe de Russie, celle de Corée ou du Japon, et quand c’est fini, c’est fini. C’est aussi, du coup, un peu moins long et cela rend plus supportable cette épreuve du dimanche qui vient tout de même après six jours de compétition. 
Ce qui frappe ensuite c’est l’évidence d’un bouleversement des hiérarchies. Voir l’impérieuse et puissante Géorgie, dont le par équipes est la chasse gardée, disputer et perdre un combat de barrage contre le Canada après avoir été sorti par la Russie, montre l’étendue du problème qui va se poser à la plupart des pays de judo, notamment de l’Est de l’Europe, au moment où l’épreuve devient un enjeu olympique. Les manœuvres de naturalisation ont commencé, mais il faudra bien que ces écoles de judo, ces mentalités évoluent, et vite, si elles veulent avoir accès à une médaille olympique que leur pays va leur réclamer. Et cet enjeu nouveau rend les choses intéressantes.

La France a tout à gagner

Bien sûr la France a beaucoup à gagner à cette politique de mixité. Nous cultivons depuis des décennies un judo aussi performant chez les filles que chez les garçons, et même plus performant désormais du côté des filles (mais c’est un autre débat). Ce qui nous garantit, malgré notre faiblesse grandissante chez les hommes, hormis en lourd, une place de seconde nation depuis des années sans interruption. Les grandes nations capables de cultiver un bon judo féminin et masculin en même temps ? Le Japon, la Corée et désormais la Mongolie, le Brésil et la France, avec quelques nations européennes, comme l’Allemagne ou la Hongrie, assez riches en combattants pour rivaliser. La Russie y vient à son rythme. Gageons que la perspective olympique va l’accélérer, là-bas comme ailleurs.

L’équipe se constitue au fil des tours

À trois filles et trois garçons, c’est un peu la loterie. Tout dépend de la capacité d’impact dans chacune des catégories. C’est ainsi que l’Allemagne parvient à se montrer supérieure à la Mongolie, et que le Canada se retrouve à jouer une médaille de bronze avec son équipe homogène. La France est de son côté à deux doigts de se faire sortir au premier tour par une Hongrie forcément volontaire. Le groupe se sauve sur le combat décisif et s’organise progressivement autour du pilier Maret, très revanchard et leader naturel, notamment de la jeune Dicko, qui se montre tour à tour performante et fragile, surpuissante et encore enfantine… mais fait globalement une très forte entrée en équipe de France, avec notamment une victoire décisive sur l’Allemande Kuelbs, 14e mondiale. Il y a de la fatigue et des combats perdus, mais le groupe prend sa cohésion, irrigué par l’efficacité de Maret, la volonté de se battre de Receveaux, Gahié et Clerget, rejoints finalement lors d’une place de trois réussie par Benjamin Axus. Battus par des hommes forts, Pierre Duprat (devant le Coréen An Changrim), Loic Pietri (devant le Hongrois Toth) ne seront pas sélectionnés sur le repêchage et la place de trois, les victoires finales. La Corée se montre plus solide avec son groupe masculin performant, l’Allemagne est difficile à vaincre, mais la Russie est facilement dominée pour la place de trois. Une Russie représentée néanmoins par des quatrièmes et cinquième couteaux, voire même au-dela, comme la toute jeune junior +78kg embarquée dans l’aventure, Anna Guschina.
Au fil des tours, une équipe de France s’est créée et la motivation est venue avec les victoires. Loin au-dessus de tous les autres, le Japon, sans aucun point faible, met des raclées successives, y compris à une équipe du Brésil motivée en finale. La compétition selon cette formule a trouvé une âme dès sa première édition, suscitant un intérêt certes naissant, mais réel, et une nation au-dessus de toutes les autres, le Japon. Dans les années à venir, les autres vont s’organiser, rivaliser peut-être. La France aura ses chances. Mais pour l’instant c’est Kosei Inoue qui vole dans les airs, porté par les bras d’une « team » qui s’est montrée soudée et concentrée du début à la fin. Une réussite magistrale toute la semaine, qui finit en or ce dimanche, une dernière récompense pour ce groupe taillé pour toutes les réussites. Au revoir Budapest, au revoir le championnat du monde 2017, le Japon vous salue bien.