Pietri battu, le Géorgien conforte son leadership mondial

L’hégémonie japonaise s’est brisée aujourd’hui après les cinq succès d’hier. Par deux fois, ce n’est pas le Kimi Ga Yo qui a retenti dans le Tokyo Metropolitan Gymnasium. Honneur à l’Allemande Martyna Trajdos et au Géorgien Avantdil Tchrikishvili. Deux judokas qui savent que briller ici peut rapporter gros en août prochain. A l’image de la Slovène Zolnir, qui avait remporté Tokyo en 2011 avant d’enchainer avec titre olympique inattendu. Pas de Marseillaise. Les Français étaient très loin du podium aujourd’hui. Ils n’ont pas brillé avec un seul combat remporté pour les quatre engagés. Tout le contraire du brillant Hiroyuki Akimoto en moins de 73 kilos. Et s’il venait contester la suprématie de sa majesté Shohei Ono ? 

En emportant son deuxième Grand Chelem de suite avec facilité, le champion du monde 2010 Hiroyuki Akimoto n’est-il pas en passe de contester l’autorité de Shohei Ono en -73 kg ? / Officiel IJF

-63kg : Trajdos est dans le jeu

Encore une fois, on n’a entendu que Loïc Korval. Dans l’ambiance très feutrée du Tokyo Metropolitain Gymnasium, le Français a été le le plus bruyant. Le supporter le plus bruyant pardon ! Supporter du succès de l’Allemande Martyna Trajdos, sa compagne à la ville. La grande blonde a réussi un beau tour de passe-passe à la Slovène Tina Trstenjak, championne du monde 2015 et déjà vainqueur à Tokyo il y a un an. Dans ce remake de la finale des Europe 2015 (remportée par l’Allemande aprtès avoir battu Clarisse Agbegnenou en demi), Trajdos, menée d’un yuko sur ura-nage, a affiché sa maîtrise du dégagement de jambe pour damer le pion à son adversaire. Un joli moment d’une finale assez plaisante. Trstenjak n’a pas répondu au succès de Clarisse Agbegnenou la semaine passée en Corée du Sud, mais confirme sa solide présence. Voilà le trio qui semble se dégager en vue de Rio. Dans leur histoire récente, Agbegnenou a battu Trajdos (à Abu Dhabi) mais à perdu au championnat d’Europe, Trstenjak a vaincu la Française (à Astana) et aujourd’hui Trajdos domine la Slovène. Trois filles et plein de possibilités. En revanche, sauf réelle surprise, ce ne sera pas une Nippone championne olympique. Même si Tashiro, 3e des Monde, a réussi à accrocher le bronze, aucune Japonaise n’était en demi-finale et l’écart semble important avec le trio européen cité plus haut, Trajdos, Trstenjak ou Agbegnenou. Il aurait pu y avoir un podium en « T » mais la Russe Valkova a grillé la Mongole Tsedevsuren avec ses yoko-tomoe venimeux. Deuxième bronze en deux jours pour les filles russes après celui de Kondratyeva hier. Un vrai signe de montée en puissance.

1  TRAJDOS Martyna (Allemagne)
2. TRSTENJAK Tina (Slovénie)
3. TASHIRO Miku (Japon)
3. VALKOVA Ekaterina (Russie)

Menée d’un yuko sur ura-nage, l’Allemande Trajdos en profite pour dégager sa jambe et battre la championne du monde slovène Trstenjak. Un vrai danger dans la caté de Clarisse Agbegnenou / Officiel IJF

-70kg : Arai dans un final brûlant

Sans surprise, c’est Chizuru Arai qui se retrouve en haut du podium des moins de 70 kilos. Elle a traversé son tableau avec froideur et efficacité. Sauf en finale, LA finale féminine de ce tournoi 2015 pour le moment. Même dans le public c’était enflammé entre les verts de Ryotokuji, les fans d’Arai, et les jaunes de Komatsu, ceux de Yoko Ono. Sept minutes et trente secondes d’une intensité folle où Arai, mangée à l’agressivité, a remonté trois pénalités de retard dans les quatre premières minutes. Une performance ininterrompue dans un golden score aussi fou. Il fallut une grossière attaque de Yoko Ono pour mettre fin à cette confrontation. Arai a eu très chaud mais semble avoir posé une main sur la catégorie au Japon même en l’absence de Haruka Tachimoto. Margaux Pinot voulait capitaliser sur sa médaille de bronze de Paris et son titre de championne de France et la Russe Gazieva semblait un bon tirage pour la lancer dans le tournoi. C’est raté dans un combat où l’arbitrage n’a pas été au niveau. Si la Française est bien sortie du tatami deux fois, la non-activité de la Russe aurait mérité plus de sévérité. A oublier. Pas mieux pour Fanny-Estelle Posvite. La médaillée mondiale 2015 se prend les pieds dans le tapis avec deux pénalités cadeaux (doigts dans la manche et appui sur la tête de l’adversaire) contre la Portoricaine Perez. Rendez-vous loupé pour Pinot et Posvite alors que Gévrise Emane a raté ses tournois en Chine et en Corée du Sud. 

1  ARAI Chizuru (Japon)
2. ONO Yoko (Japon)
3. PORTELA Maria (Brésil)
3. BOLDER Linda (Israël)

-73kg : Le bon coup d’Akimoto

Et si Shohei Ono était en danger ? C’est tout à fait possible car les absents ont toujours tort. D’autant plus quand leurs remplaçants prennent la lumière. Blessé à la hanche au dernier moment, l’incroyable roi des moins de 73 kilos a vu son compatriote Hiroyuki Akimoto jouer un numéro de soliste impressionnant pour signer une deuxième victoire consécutive dans la capitale nippone et surtout un second Grand Chelem après celui de Paris qu’il avait avalé avec la même facilité. Troisième des Mondiaux, le jeune Changrim An n’a pas pu réciter la partition coréenne habituelle à coups de mouvements d’épaule et de séances de kumi-kata en finale. Au contraire, il est rentré dans la danse d’Akimoto qui, d’un maître seoi-nage en bout de manches, a inscrit le waza-ari décisif. Avec ses postures impeccables et son rythme diabolique, le judoka de Ryotokuji a tout pour être plus qu’un numéro deux. Les tournois européens de l’hiver et le championnat du Japon d’avril départageront les deux hommes. Quoi qu’il arrive, ce sera terrible de se priver d’un de ces deux talents ! Riki Nakaya, un ton en dessous malgré ses deux titres mondiaux, s’est peut-être grillé avec son élimination précoce du jour. Sur ce podium, la troisième place porte la barbe. Le Russe Mogushkov place un ko-soto féroce à « Rocky » Draksic tandis que Nugzari Tatalashvili gère son compatriote Lasha Shavdatuashvili. Pierre Duprat a gagné le seul combat français de la journée. Face à un Yéménite et grâce à quatre shidos. Le Canadien Margelidon le sort ensuite d’une pénalité dans le golden score. Peu convaincant.

1  AKIMOTO Hiroyuki (Japon)
2. AN Changrim (Corée du Sud)
3. TATALASHVILI Nugzari (Géorgie)
3. MOGUSHKOV Musa (Russie)

-81kg, Tchrikrishvili, épouvantail géorgien

Avec ses trois derniers monarques (Piétri, Tchrikishvili, Nagase), ce tableau des moins de 81 kilos avait de la gueule. Loïc Piétri a été le premier à sortir et c’est Avtandil Tchrikishvili qui a finalement réglé la concurrence dans son style habituel. Suffisant pour conforter son leadership à la ranking, même si il a eu beaucoup de mal à casser en finale le Coréen Lee Seugnsu, cinquième des des championnats du monde, sur des pénalités sévères pour son adversaire. Tchrikishvili n’a pas eu besoin d’affronter Takanori Nagase, le champion du monde 2015. Ce dernier s’est éliminé tout seul en demi-finale sur le geste du jour. Son adversaire, Lee, surpasse son uchi-mata et sans bouger la saisie manche de Nagase glisse vers l’entrejambe pour une tentative de te-guruma qu’il porte. Du jamai-vu depuis plusieurs mois. Un geste complètement involontaire qui le disqualifie net. Kosei Inoue s’est précipité vers la table vidéo pour expliquer qu’il n’y avait pas faute et regarder maintes fois le film de l’action. Une action qui va faire causer. Loïc Piétri avait repéré la montée en puissance de Wang Ki-Chun. Le double champion du monde -73 kilos vient de l’emporter en Chine avec les recettes qui ont fait son succès dans la catégorie inférieure. Les deux combattants se sont livrés à un atelier seoi-morote fort plaisant. C’est sur un morote du Coréen que Piétri place son sumi-gaeshi en contre pour scorer waza-ari. Après la marque, Piétri se met à défendre son bien et c’est une erreur. Dans les dernières secondes, de son propre aveu, il gère mal Wang qui arrive en seoi enchaîne en seoi inversé et le pousse sur le dos (waza-ari). Une défaite comme un petit coup de canif dans la régularité du sociétaire de l’OJ Nice en compétition. Légèrement amer après ce revers, il envisage de demander au staff de sortir davantage en tournoi en 2016. Wang, lui, est remonté jusqu’à la médaille de bronze. A surveiller comme le lait sur le feu. Quel Coréen sera à Rio ?

1  TCHRIKISHVILI Avtandil (Géorgie)
2. LEE Seungsu (Corée du Sud)
3. NAGASE Takanori (Japon)
3. WANG Ki-Chun (Corée du Sud)