Champion de France en titre – et auteur du triplé champion de France cadets, juniors et seniors, un parcours assez rare* – le combattant de 22 ans, garde en tête ses objectifs et les grands championnats qui arrivent malgré le contexte incertain, avec l’assurance, aussi, d’avoir posé des bases pour son avenir. Interview du lundi avec le combattant du FLAM91.

Reda Seddouki lors des derniers championnats de France par équipes à Brest. Photo : Emmanuel Charlot / l’Esprit du Judo

Reda, tu es champion de France, tu es attendu, mais la situation est compliquée évidemment. Comment gères-tu cela ?
Pour le moment les championnats de France ne sont pas annulés mais j’ai du mal à me dire que ce sera maintenu, vu la situation, le confinement… ça risque d’être compliqué. Je me dis que s’ils ont lieu, tant mieux, sinon tant pis, je n’ai pas de prise là-dessus. J’ai des objectifs à court terme à l’international donc je me projette plus sur ça. Pendant le confinement, ne pas faire de judo était horrible, faire de la préparation physique c’était pénible à force mais, maintenant, ça va mieux, on a bien repris depuis début juillet. Je sais que je suis attendu aux championnats de France mais je n’ai pas trop de pression, c’est du judo et je pense que le gagnant sera celui qui a le plus envie. Je dois réitérer ma victoire, tout simplement. Ce titre m’a ouvert les portes de l’international. Et puis passer de champion de France juniors à champion de France seniors, c’est un grand pas, j’ai vu la différence. J’ai hâte de faire mes preuves à l’international aussi, de dire « hé, je suis là ! ».

Justement, quel bilan fais-tu de Budapest où tu étais sélectionné ?
Je m’étais préparé durement pour ce Grand Chelem de Budapest mais je perds au golden score, sur un contre. Je suis déçu de moi, frustré et même énervé. J’avais le match en main et il a suffi d’une seconde d’inattention pour que je perde. J’ai du mal à accepter une défaite comme celle-ci et je me rends compte que la moindre erreur est fatale. Mais c’est le judo, c’est comme ça. À présent, je me focalise sur les championnats d’Europe -23 ans en Croatie. Je reprends mes marques doucement et lors de ce championnat, il va falloir être fort. Mais je pense avoir toutes les cartes en main pour réussir. Je me prépare pour en tout cas.

Tu es au FLAM91 depuis un moment maintenant, quelle relation as-tu tissée avec le club ?
Oui, depuis 2012-2013, j’avais alors 14 ans. Au début, j’y suis allé pour Kilian (Le Blouch), car je savais que c’était un entraineur engagé et on se ressemblait beaucoup sur la manière d’être, de travailler et ça a tout de suite accroché. Aujourd’hui, j’entretiens encore une très bonne relation avec lui, il me connaît par cœur, il connaît mes points faibles, mes points forts et surtout il a confiance en moi et moi, j’ai confiance en lui. Il m’a montré à plusieurs reprises que c’était un entraîneur de très haut niveau, qui a formé beaucoup de bons jeunes. Avec le temps, je me suis attaché au club et à l’ambiance. On sent le haut niveau mais il y a une réelle ambiance de club. Le mercredi, quand j’y vais, il y a des jeunes, des moins jeunes, des débutants… On s’entraîne tous ensemble et j’aime ce partage. C’est aussi le temps d’échanger avec les gens, soutiens, partenaires, qui sont dans l’ombre mais qui comptent beaucoup dans ma progression. Après avoir fait ma semaine à l’INSEP, où l’on pense évidemment uniquement performance, ça fait du bien d’avoir des personnes à côté qui sont plus cool, qui ont leur problématique du quotidien, ça met les pieds sur terre.

Le terrain, tu connais, puisque tu gardien de la paix, c’est bien ça ?
Je suis adjoint de sécurité depuis décembre 2018 et j’ai été affecté en mars 2019. Depuis, j’ai passé le concours de gardien de la paix que j’ai réussi donc j’attends de rentrer en école pour pouvoir lancer ma carrière professionnelle, et travailler dans un service public. Je vais pouvoir être aux côtés des gens, aider, partager. J’aime beaucoup mon pays, le représenter sur un tatami, c’est super cool, c’est une chance, mais si je peux le représenter d’une autre manière, ce serait très important pour moi. J’aimerais bien intégrer, à court terme, une brigade anti-criminalité et plus tard une unité d’intervention. J’aime l’adrénaline. Je pense que c’est faisable, si je m’en donne les moyens, comme je l’ai fait pour le judo. C’est mon état d’esprit : je ne me mets pas de barrière et je sais que j’ai encore pleins de choses à découvrir. Le fait d’être policier ça m’aide beaucoup, je vois autre chose, je côtoie d’autres personnes.

Un équilibre dont on parle souvent mais qui n’est pas toujours facile à trouver…
J’ai trouvé cet équilibre et je pense que ça peut être productif pour la suite. Je suis complètement épanoui, je suis très heureux dans ma vie. Avec la situation actuelle, j’ai du mal à imaginer l’avenir, alors ce socle que j’ai mis en place, est rassurant aussi. Je sais qu’il y aura forcément des compétitions qui vont arriver, je suis impatient et je veux être performant le plus rapidement possible, à l’international. Paris 2024 ? Cela trotte dans ma tête évidemment. J’espère y être, j’aurai 26 ans, je ferai tout pour en tout cas. Ce serait beau, à la maison, à dix minutes de chez moi, avec toute ma famille. D’ici là, il y a quelques étapes à franchir (sourire), alors je reste focus sur mes objectifs, sur l’envie de remporter des médailles, de performer à l’international. J’ai hâte.

*En remportant les championnats de France 1re division 2019, après avoir aussi été champion de France cadets et juniors, rejoignait (en compagnie que Romaric Bouda) huit autres combattants masculins qui avaient réussi cette performance au cours de la dernière décennie. Qui sont-ils ? Quand ont-ils réussi le triplé ? Combien ont-ils remporté de titres au total ? Cyrille Maret (2 en cadets, 2 en juniors, 5 en seniors, dont le premier en 2010), Teddy Riner (1-2-4, en 2011), Pierre Duprat (1-2-2, en 2012), Aurélien Leroy (1-1-1, en 2012), Vincent Massimino (1-1-1, en 2012), Vincent Limare (1-1-3, en 2013), Vincent Manquest (1-1-1, en 2016) et Alexandre Mariac (1-1-2, en 2016).