La bataille est très serrée entre les deux -52 kg tricolores
Ce mardi 31 mai, le comité de sélection français doit donner sa sélection pour les Jeux olympiques de Rio. Pour la plupart des catégories, les choses étaient déjà jouées il y a longtemps, où se sont décantées au fil des semaines. Il reste néanmoins de la rivalité pour deux catégories masculines et deux féminines, mais c’est surtout pour une catégorie féminine en particulier que le suspense reste entier. Qui ira aux Jeux en -52 kg ? Annabelle Euranie ou Priscilla Gneto ?
Les catégories qui sont jouées chez les féminines
En -48 kg, Laetitia Payet ne craignait que la possibilité de ne pas obtenir le classement suffisant pour avoir le droit d’aller aux Jeux. Elle n’a plus de rivale en France depuis le forfait d’Amandine Buchard et l’essouflement d’Aurore Climence. En -63 kg, Clarisse Agbegnenou est elle aussi sans rivale. Malgré son absence dans les derniers tournois internationaux pour cause de blessure à une main, elle est toujours numéro deux mondiale. Championne du monde et championne d’Europe dans la foulée, en -70 kg Gévrise Emane n’a pas laissé Fanny Estelle Posvite, pourtant médaillée mondiale, contester sa sélection olympique. Seule mauvaise nouvelle pour elle, elle passe de la seconde place mondiale à la troisième après le Master, dépassée par la triple championne du monde colombienne Yuri Alvear. En -78 kg, Audrey Tcheumeo a elle aussi serré le jeu en emportant le titre européen et garde sa place de numéro deux mondiale. Elle est totalement incontestée en France. Même si elle est moins dominatrice qu’en 2015, en +78 kg, Emilie Andeol, tête de série n°5 pour les Jeux, n’a pas été vraiment contestée en France.
Les catégories qui sont jouées chez les masculins
En -66 kg, Kilian Le Blouch a su répondre présent à la défection forcée de Loic Korval. Il est dans la zone olympique et n’a pas de rival en France. En -73 kg, Pierre Duprat, malgré ses difficultés actuelles reste dans la zone olympique et n’a vu personne venir contester son statut. En -81 kg, Loic Pietri quitte les têtes de série, mais reste évidemment l’incontestable n°1 français de la catégorie. En -100 kg, Cyrille Maret n’a pas de rival français à l’horizon, même le plus lointain. Il passe en outre n°2 mondial. En +100 kg, Teddy Riner et le seul n°1 mondial de l’équipe de France. Faut-il préciser qu’il est sans rival ?
Les titulaires qui ont une forte opposition nationale, mais sont qualifés à 99%
On a beaucoup parlé d’Axel Clerget en -90 kg. En pleine progression depuis quelques mois, troisième du Grand Chelem de Bakou, première du Grand Prix d’Almaty, il aurait pu, en gagnant le Master, créer une faille. Mais son effort remarquable, qui le conduit à la 16e place mondiale, n’est encore pas suffisant pour venir contester Alexandre Iddir, qui reste finalement le 8e mondial malgré la blessure qui le prive d’une médaille probable au championnat d’Europe et d’une participation au Master. Avant de se blesser, Iddir était lui-même dans une logique de progression qui lui avait permis de batttre le Russe Mudranov et surtout le Géorgien Liparteliani. Sa sélection est acquise à 99%.
En -57 kg, la fiabilité d’Hélène Receveaux, sa détermination, auront poussé Automne Pavia dans ses retranchements. Mais en emportant le championnat d’Europe, cette dernière a assurée sa sixième place mondiale synonyme de tête de série et surtout démontrée qu’elle est toujours la n°1, multiple fois médaillée mondiale (2014-2015) et olympique (2012), triple championne d’Europe aussi. Un palmarès qui parle de lui-même. Automne Pavia est à Rio à 99%. Il n’en demeure pas moins qu’en se hissant encore en finale du Master, Hélène Receveaux vient d’atteindre la troisième place mondiale ! Ils ne seront pas nombreux, les n°3 mondiaux qui ne feront pas les Jeux.
La catégorie où le Master a peut-être changé quelque chose…
En emportant de façon magnifique de fraîcheur et de tempérament le championnat d’Europe en -60 kg, Walide Khyar a non seulement marqué sa génération, mais aussi emporté son billet pour Rio avec l’étiquette d’outsider explosif. Mais en se hissant en finale du Master en battant notamment le champion japonais Takato, l’ancien titulaire de la catégorie Vincent Limare a refait une partie de son retard sur le jeune héros issu des juniors. Au point de faire douter la commission de sélection ? Mieux classé que Walide Khyar dont l’ascension est toute récente, Vincent Limare, 8e mondial, grâce cette performance et aux doublons devant lui, entre dans les têtes de série, argument qui peut jouer en sa faveur.
Le champion d’Europe Walide Khyar, sur cet incomparable coup d’éclat, a néanmoins 70% de chances d’être aux Jeux.
Et finalement qui en -52 kg ?
C’est la dernière catégorie, celle qui va vraiment coincer, pousser le comité de sélection dans ses retranchements. Qui de Priscilla Gneto, finaliste du championnat d’Europe, ou d’Annabelle Euranie, finaliste l’année dernière de ce championnat d’Europe et titulaire du dernier championnat du monde va être choisie ?
Il faut vraiment entrer dans les détails pour discerner les arguments pour l’une ou pour l’autre.
Quand la médaillée mondiale 2003, retirée depuis 2006, décide en 2014 d’entamer son incroyable come-back, Priscilla Gneto, médaillée olympique 2012 à 20 ans, n’est pas parvenue à rééditer une performance en grand championnat et reste sur deux saisons en demi-teinte. C’est la pression de plus en plus forte d’Annabelle Euranie qui la pousse à réagir, ce qu’elle fait avec conviction. Au coude à coude depuis un an, les deux combattantes de top niveau mondial se rendent coup pour coup.
Avantage Euranie…
Depuis le début de la qualification olympique en juin 2014, la grande combattante de Blanc-Mesnil a remporté huit médailles en tournoi et championnats (six depuis le Master 2015 inclus), dont une médaille d’or et deux de bronze en Grand Chelem en 2015-2016 (et une en bronze de plus en 2014), tandis que Priscilla Gneto a récolté trois médailles de bronze en Grand Chelem (quatre si on compte celui de Bakou quelques jours avant ce Master) pour un total de huit médailles (sept depuis le Master), mais sans or. Euranie a aussi récolté deux médailles de bronze aux Masters 2015 et 2016. En Grand Prix, c’est une médaille d’or pour Annabelle (qui remonte à fin 2014), tandis que Priscilla comptabilise une médaille d’argent et deux de bronze fin 2015 début 2016. Accessoirement – mais tout de même – l’aînée a battu la cadette trois fois sur trois combats depuis octobre 2015. Euranie a aussi dominée la Japonaise Nakamura, la Brésilienne Miranda par deux fois, la Chinoise Ma par deux fois aussi, la Russe Kuziutina une fois, tandis que Gneto compte de son côté une victoire sur Ma et trois victoires sur Chitu. Avantage Euranie donc, contrebalancé par le meilleur classement de Priscilla Gneto au championnat d’Europe, deuxième quand Euranie fait cinquième (mais en perdant de peu sur la championne d’Europe Kelmendi et d’une pénalité contre une Russe à Kazan). Il faut rappeler aussi qu’Annabelle Euranie était vice championne d’Europe elle aussi, en 2015. Au lendemain du championnat d’Europe, si rien n’était fixé, le discours officieux semblait désigner Gneto, 24 ans et déjà l’expérience des Jeux, comme la future titulaire. Mais les deux combattantes se sont encore une fois retrouvées au coude à coude au Master, et Gneto perdait au premier tour avec une blessure au genou, tandis qu’Euranie, 3e, allait chercher une nouvelle grande médaille. Du coup l’effet Kazan s’estompe et il reste deux combattantes quasiment sur la même ligne, si on écarte les visions subjectives et les considérations annexes sur les formes du moment où à venir. Ce qu’il reste alors pour les départager ? La place de tête de série précieuse obtenue par Annabelle Euranie, 5e du classement mondial quand Priscilla Gneto n’est que onzième. Des considérations chiffrées qui se traduiront dans deux mois par un meilleur classement sur la « grille de départ » de Rio, dans les tableaux où il s’agira de ne pas se trouver sur le chemin d’une invincible dès le premier tour, pour atteindre au moins une demi-finale sans encombre. Cette considération est celle qui devrait l’emporter. On voit mal, tout mis à plat, comment on pourrait décider de laisser la cinquième mondiale à la maison pour sélectionner une combattante qui n’est pas dans les têtes de série. Mais la vérité de la sélection appartient au Président de la Commission, Roger Vachon et à ses membres. Euranie a 60% de chance d’aller aux Jeux de Rio.