JOP 2024, Jour 1. À l’occasion des Jeux olympiques de Paris, retrouvez le billet quotidien de Pascaline Magnes, bénévole au sein l’organisation des JOP 2024 qui intègre la rédaction de L’Esprit du Judo et que vous retrouverez bientôt dans le magazine. De la bonne humeur, des sensations et des rencontres à partager…
Tam, Tam, Tam. Les fameux « 3 coups » et la compétition démarre. Ce premier jour, 10h pile, tant attendu… La salle n’est pas encore tout à fait pleine et l’arrivée des premiers combattants, étrangers, ne lève pas plus que ça les foules. Moi, certes, je me tiens droite comme un i, dans ma tenue de volontaire, aux abords du tatami mais à l’intérieur, j’ai le coeur qui bat fort. J’ai envie de voir la toute jeune Tara, de Suède. J’ai lu son incroyable histoire, racontée par Jane Bridge, dans le dernier numéro de L’Esprit du Judo… Alors, quand elle monte sur le tatami, je me demande comment elle va faire pour continuer à écrire son histoire. Est-ce qu’il faut tabler sur une défaite évidente vu que c’est déjà un « petit miracle » qu’elle soit là ou, au contraire, croire que cette histoire romanesque peut justement se prolonger ? Comme j’adore les histoires inattendues, celles qui font les récits inoubliables, je table sur la deuxième hypothèse. Et je commence à stresser pour elle. Il me semble qu’elle est toute légère, qu’elle ne se rend pas compte qu’elle va se faire dévorer. Pourtant, elle est droite, dans une belle posture, rapide et avec un « feeling » pour rétablir son équilibre assez surprenant. C’est dingue mais, son adversaire, la Coréenne Lee, ne peut pas la faire chuter malgré toutes ses tentatives ! À chaque matte, j’entends Jane qui hurle depuis sa chaise de coache : elle doit croire aussi au « petit miracle », il y a de bonnes vibrations entre elles. Et voilà Tara qui s’installe en sankaku. Il ne semble pas passer mais, comme tous ceux qui aiment le sol, elle a visiblement confiance dans le processus et insiste sans fléchir : si l’étranglement n’est pas efficace, elle a l’immobilisation qui lui offre le ippon. Incroyable ! Je saute de joie comme une folle à 10h12 du matin… Tara vient de gagner un combat sur un tatami de Jeux olympiques ! Elle a 18 ans. Quand je la vois lever les bras au ciel comme si elle venait de remporter une finale, je comprends que c’est aussi un « petit miracle » pour elle… Je suis émue aux larmes. Ce n’est pas mon pays, je ne connais pas du tout cette jeune judokate, je ne l’avais jamais vue combattre. J’ai simplement lu un petit bout de son histoire, sur deux colonnes de notre magazine… Est-ce le judoka ou le ippon qui nous fait tant vibrer ? Est-ce que la victoire d’un inconnu vous a déjà ému ? On dit que le sport est une grande aventure humaine : est-ce parce que la performance n’aurait aucun sens sans toute la sensibilité humaine qui lui permet de se réaliser ?
Quand Shirine a levé les bras au ciel sur son dernier combat de la journée, j’ai repensé à son retour de Tokyo, totalement seule avec sa défaite pendant que tout le reste de l’équipe de France trinquait au champagne sa victoire triomphale par équipe. Shirine en a bavé, elle a eu mal, elle a eu envie de revenir, elle a hésité puis assumé certains choix… Et c’est toute cette histoire qui m’émeut autant ce soir. Qu’est-ce qu’une médaille si ce n’est le prétexte à de grandes aventures de vie ?
J’ai regretté de ne pas connaître l’histoire de ce premier médaillé olympique en judo de son pays, le Kazakhstan : j’aurais sûrement été émue à sa montée sur la première marche… Alors j’ai pris un moment pour aller rencontrer cette délégation, recevoir leur pin’s, parler français avec l’un d’eux, demander quelques prénoms, rire de blagues que je n’ai pas toujours bien comprises et… recevoir un petit bout d’histoire.