30 août 2013 – Rio de Janeiro (Brésil)
-70kg, -78kg F et -90kg M
Vendredi, journée amère à Rio. Malgré la médaille de bronze d’Audrey Tcheumeo en -78 kg, la France passe à côté d’une grande histoire. Lucie Décosse, Audrey Tcheumeo, Lucie Louette… et à la fin, il ne reste rien, ou presque, sinon le sourire malheureux d’Audrey avec la mauvaise médaille à la main.
On n’oublie pas Ludovic Gobert, qui avait su mériter sa place ici. Mais après un premier tour à sa main, ce n’est pas lui faire injure que dire que le Géorgien Liparteliani était au-dessus. Au dessus de la plupart en fait, l’un des hommes forts du jour, annoncé comme un favori dans l’une des plus grosses catégories du moment.
Pour la France, tout devait donc venir des filles. Mais leur destin avait décidé pour chacune une fin de partie différente. Lucie Louette fut la première à subir la foudre. Alors qu’elle lutte sans faiblir contre la dangereuse Cubaine Antomarchi, l’œil arbitral décide soudain de la sortir du jeu. La raison ? Elle a défendu sur une attaque en engageant son bras entre les jambes de la Cubaine. Interdit de toucher… hansokumake. « C’est la règle » explique un peu contrit le responsable de l’arbitrage à Christophe Massina l’entraîneur.
Lucie Décosse, les adieux aux larmes
En -70 kg, on comprend rapidement que Lucie Décosse ne planera pas aujourd’hui. Au contraire, c’est à contre-courant qu’elle nage, se forçant en permanence à se réveiller par des petits pas de danse, en difficulté sur les mains, s’obligeant à attaquer, y compris sur des techniques qu’elle ne fait jamais. Elle est menée aux pénalités par la Franco-Marocaine Asmaa Niang, par l’Allemande Marzok. Mais à chaque fois, les vieux restes de la magie Lucie font encore effet, ippon sur l’une et sur l’autre. Alors on commence à se dire que c’est possible… Il faudrait battre en quart l’ancienne championne du monde 2009, la Colombienne Alvear, qui avait fait dix secondes au championnat du monde à Paris contre Lucie et qui vient tout juste d’avoir un mal fou à se débarrasser d’une Péruvienne, Maria Perez, qui lui a mis trois yuko avant de se faire contrer à dix secondes du terme. Ensuite, la Coréenne Hwang, que Lucie a battu à Londres… et, grande nouvelle, la rivale, la Néerlandaise Kim Polling, de retour de blessure, s’est fait surprendre par la vivace Coréenne Kim Seongyeon. Mais les espoirs sont vite douchés. En fait, Lucie ne peut pas. Trois pénalités plus tard, et un yuko sur makikomi, la Française s’est rendue à la Colombienne et à l’évidence. La suite est un émouvant calvaire. Sans ses moyens habituels, Décosse lutte contre le courant, les yeux dans le vide, se fait violence comme rarement, parvient au bout d’un long golden score de près de neuf minutes à projeter pour ippon la Brésilienne Portela qui se jette sur elle à chaque reprise de garde. La médaille de bronze ? Même pas. La Coréenne Kim se glisse trop vite en dessous et pour une fois Lucie bascule. Un yuko qu’elle ne pourra remonter. Une fin de parcours triste et belle pour la plus grande championne française du judo. Lucie Décosse voulait sans doute se prouver que c’était bien fini. Cette fois c’est fait. Une larme dans l’œil, elle prend le temps de savourer cette amertume et la nostalgie qui commence maintenant. L’arbitre lui laisse le temps de cette brève méditation au cœur de l’arène bruyante. Un peu plus loin, alors qu’elle sort doucement de la salle et du judo, une fan en pleurs se jette dans ses bras, c’est Ayumi Tanimoto, la double championne olympique japonaise, son unique rivale, qui est là pour pleurer cet adieu aux armes. Au revoir Lucie, et merci pour tout.
Audrey, la plus forte
La plus forte des -78 aujourd’hui, c’est Audrey Tcheumeo. Avec ses grands décalages, ses techniques de jambe et sa garde écrasante, elle domine et fait valser les corps fragiles de ses adversaires. Blessée, elle gère, ne cherche pas forcément le ippon, mais l’avantage suffisant ou le décalage des pénalités qu’elle obtient sans problème. C’est son jour, une nouvelle fois, d’autant que les Japonaises sont pâles, la Chinoise transparente, l’Américaine absente et que même la Brésilienne Aguiar ne semble pas à son meilleur niveau, ce dont va profiter une championne du monde 2009 elle aussi, la Néerlandaise Verkerk pour se glisser en finale.
La Chinoise Liu battue au premier tour, il faut passer la Canadienne Roberge. Rien de très compliquée pour Tcheumeo qui gère aux pénalités. Elle attaque une nouvelle fois en bordure, sûre de sa tactique, fait perdre l’équilibre à la Canadienne, s’enroule dans le mouvement… et se retrouve fixée au sol ! Une boulette grosse comme un immeuble de cinq étages. Il n’y a rien qui puisse la sauver de cette évidence, elle vient de perdre ce combat, laissant « son » championnat du monde à quelqu’un d’autre. Ce sera la petite Coréenne du Nord Sol Kyong, 7e des Universiades en juillet. Trapue et vaillante, forte d’un seoi inversé efficace elle se fait le tableau de chasse du jour : l’Allemande Thiele, la Hongroise Joo, la Japonaise Sato, la Canadienne Roberge et, en finale, la Néerlandaise Verkerk, alors qu’elle est menée, grâce à son seoi. Ses transports de joie font plaisir à voir. Désabusée, mais solide au poste, Audrey Tcheumeo va chercher le bronze, une belle récompense… Mais aujourd’hui, elle aurait dû être championne du monde pour la seconde fois.
Colombie, Cuba en or
L’Amérique du Sud refait surface, mais ce n’est pas le Brésil qui en profite. Alvear termine sa journée en trombe, découpant l’Allemande Vargas-Koch en tranche dans le dernier combat. La Colombie, grâce à elle, est médaillée d’or pour la seconde fois. Et chez les garçons, le bras de fer des quatre mousquetaires tourne en faveur du sémillant cubain Asley Gonzales. Alors que le Russe Denisov se fait surprendre par les mouvements de hanche du Géorgien Liparteliani, Gonzales signe un premier exploit en sortant des bras d’acier du colosse Iliadis par un yuko au golden score. Il en signe un second en finale en maîtrisant Liparteliani. Troisième en 2011, vice champion olympique, le Cubain Asley Gonzales, en or à Rio, vient de prendre une nouvelle dimension.
Les grandes nations leaders ont été timides aujourd’hui. La France et le Brésil pouvaient frapper fort, ils ramènent un trophée en bronze chacun. Le Japonais Nishiyama se fait surprendre par une clé, les deux féminines nippones ne se montrent pas à la hauteur, mais le Japon reste en tête en profitant de ce statu-quo. Avec ses six médailles, dont trois d’or, il sera difficile désormais d’aller détrôner le Pays du Soleil Levant. Il faudrait pour cela que la France où le Brésil, emporte deux titres demain. Possible, mais difficile…
DIRECT – Revivez la journée
23h23. Vainqueurs : Colombie, Cuba et Corée du Nord à l’honneur
Deuxième titre en -70 kg pour Yuri Alvéar. Vainqueur en 2009, 3e aux JO de Londres et tombeuse de Lucie Décosse ce matin en quarts de finale, la Colombienne projette deux fois l’Allemande Vargas Koch et se rappelle à 27 ans au bon souvenir de sa catégorie. Deux Kim complètent le podium : la Néerlandaise Polling et celle qui aura mis fin à sa série de 21 victoires consécutives depuis février 2012, la Sud-coréenne Seongyeon Kim.
Troisième à Paris en 2011, deuxième à Londres en 2012, le Cubain Asley Gonzales s’impose enfin au niveau planétaire en -90 kg à l’issue d’une âpre bataille de mains avec le Géorgien Lipartelliani. Ilias Iliadis et Kirill Denisov complètent ce podium en béton armé.
En -78 kg, la Nord-coréenne créée la surprise du chef. Tombeuse de la vice-championne olympique, l’Allemande Thiele, de la Hongroise Joo et de la Japonaise Sato, Kyong Sol bat en finale la Néerlandaise Verkerk, championne du monde 2009 impuissante face au kumi-kata de fer de son adversaire. Audrey Tcheuméo et la Brésilienne Mayra Aguiar – dans une ambiance de liesse – complètent le podium.
23h07. -78kg, place de 3e. Audrey Tcheuméo en bronze
Ko-uchi-gari en début de combat à valeur de yuko, puis une gestion (presque) tranquille face à la Cubaine Kaliema Antomarchi, tombeuse ce matin de Lucie Louette, et voici Audrey Tcheuméo en bronze. Une performance en soi pour la désormais ex-tenante du titre, compte tenu de sa préparation pertubée par une blessure au genou. Voici une sixième médaille dans l’escarcelle française.
22h22. -70kg, place de 3e. Lucie Décosse 5e
Seongyeon Kim aura décidément été le bourreau des deux dames de coeur de la catégorie. Après avoir éjecté l’archi-favorite – mais diminuée par une blessure au genou – Kim Polling en quarts de finale, la Sud-coréenne a remis ça pour le bronze. La victime ? Lucie Décosse. Volontaire mais lessivée par les huit minutes de son combat précédent face à la Brésilienne Maria Portela, la double tenante du titre ne parvenait pas à remonter un yuko encaissé d’entrée. La voici 5e d’une catégorie qu’elle aura mis sur la tête et les épaules de 2010 à 2012. La voici retraitée d’une planète judo qu’elle aura traversé de ippons en ippons depuis plus de dix ans. Le salut respectueux de son adversaire et l’ovation du Maracanazinho témoignent de l’empreinte laissée par la Française.
22h. -70kg/-78kg, Décosse et Tcheuméo pour le bronze
Ce ne fut pas simple pour Lucie Décosse face à la Brésilienne Maria Portela, une combattante qui ne lui convient guère et qui l’avait notamment embêtée aux mondiaux par équipes en 2011. Visiblement éprouvée, et alors que les deux combattantes étaient à égalité trois pénalités partout, la triple championne du monde trouvait pourtant l’ouverture sur son osot-gari en fin de combat. Il faudra encore batailler une toute dernière dans sa carrière contre la Coréenne Kim Seongyeon.
Quant à Audrey Tcheuméo, elle a croqué la Japoanise Ruika Sato pour aller disputer le bronze. ce sera contre la Cubaine Antomarchi.
18h55. Le programme des demi-finales
Féminines
Kim Seongyeon (KOR) – Vargas Koch Laura (GER)
Hwang Ye-Sul (KOR) – Alvear Yuri (COL)
Masculins
Liparteniani Varlam (GEO) – Kirill Denisov (RUS)
Asley Gonzalez (CUB) – Ilias Iliadis (GRE)
18h35. -78kg, quart de finale, Tcheuméo immobilisée par Roberge !
Quelle erreur pour Audrey Tcheuméo : alors que la Canadienne Catherine Roberge était contrôlée aux pénalités, Audrey lançait un sasae en bordure. Rien de marqué… sauf que la championne du monde 2011 se relâchait. Il ne fallait pas plus d’ouverture à l’expérimentée canadienne : osae-komi dont ne pouvait se sortir la Française. Il faudra aller chercher le bronze en repêchages.
17h45. -70 kg, quart de finale, Décosse battue à son tour
Sa tombeuse est la Colombienne Alvéar, championne du monde en 2009 et 3e à Londres. Un waza-ari en maki-komi, trois pénalités, le menu aura été par trop indigeste pour la Française, qui devra se remobiliser pour affronter un univers qu’elle fréquente peu : les repêchages.
17h25. -70kg, quart de finale, Polling battue
La grande Néerlandaise championne d’Europe en titre s’incline contre la Coréenne Kim (waza-ari). Il n’y aura donc pas de finale Décosse-Polling aujourd’hui… Mais la Batave est repêchée.
16h55. -70kg, 2e tour, Décosse est lancée
O-soto-gari en 1’30 sur l’Allemande Marzok. Voici Lucie en piste pour retrouver la Colombienne Alvéar, championne du monde 2009, qu’elle avait rétamée en dix secondes à Londres.
16h55. -90kg, 2e tour, Gobert va regretter
Le quintuple médaillé européen de 24 ans, Varlam Liparteliani, est ce chef de file brillant de l’équipe géorgienne. Est-il à son meilleur aujourd’hui ? Pas sûr. C’est ce qui donnera sans doute encore plus de regrets au combattant de SGS Ludovic Gobert, brillant technicien qui est venu s’enferrer sur l’uchi-mata de Liparteliani (waza-ari à 1’40 du terme), puis s’est fait laisser engluer dans un non combat dans les seconds suivantes, notamment avec ce passage au sol très long où il subissait et laissait passer de précieuses secondes. Il fallait oser. Ludo Gobert, battu par le Géorgien en quart de finale à Paris en février dernier, a-t-il osé assez ? C’était un tour très difficile, mais la frustration est là.
16h35. -78kg, 1er tour, Louette, le coup de massue
Opposée à la Cubaine Kaliema Antomarchi dans un combat tactique et rugueux, Lucie Louette a fait l’erreur : une main qui vient saisir le pantalon sur une action de la Cubaine : hansokumake ! Les néo-sociétaire du Flam91 est restée de longues secondes sur le tapis, refusant ce terrible verdict alors que Christophe Massina allait voir la vidéo auprès de la commission d’arbitrage. Il ne pouvait que confirmer : aucune injustice, Lucie a fait l’erreur de se rettraper dans sa chute au pantalon de son adversaire. Douche froide sur le camp français.
16h10. -70kg, 1er tour, Décosse, ça passe
Ça passe, mais c’était tout de même un peu chaud pour la Guyanaise opposée à la plus Française des Marocaines, Asmaa Niang : waza-ari sur un uchi-mata en cercle, avant que les deux combattantes ne prennent trois pénalités chacune. La délivrance intervenait sur ce ko-uchi-gari à 1’15 du terme pour un second waza-ari. Une Lucie Décosse en mode tour de chauffe.
15h10. -90kg, 1er tour, Gobert à sa main
Ludovic Gobert était le premier combattant du jour à fouler le tapis du Maracanazinho. Opposé au Venezuelien Mervin Rodriguez, ancien médaillé panaméricain dans la catégorie inférieure et 5e de l’édition 2013, il maîtrisait le combat avec un waza-ari à la clé. Il n’y aura pas de cadeau dès le 2e tour puisque c’est le capitaine géorgien Varlam Liparteliani qui l’attend. Il faudra oser.
Et si nos quatre tricolores du jour faisaient aussi bien que leurs copains de la veille ?
Pour Lucie Décosse, cette tournée d’adieux ne sera belle qu’en cas de podium. Elle dispose pour cela d’un tableau qui pourrait la faire monter crescendo dans les tours. L’Allemande Marzok, l’ancienne championne du monde colombienne Alvear, la turbulente Canadienne Zupancic au menu, avant de se frotter, si tout s’est bien passé jusque là, à une Néerlandaise qui fait peur à tout le monde : Kim Polling. Un quatrième sacre pour l’éternité passera assurément par là.
La fiche athlète de Lucie Décosse
Dans la catégorie supérieure, on retrouve le cas de figure des -63kg. Dans la peau de la tenante du titre, on retrouvera Audrey Tcheuméo, rassurée quant à l’état de son genou. En parallèle, c’est Lucie Louette qui viendra étrenner sa couronne continentale acquise à Budapest. Mais contrairement à hier, leur affrontement ne pourrait avoir lieu avant la finale. Elles devront pour ce faire mettre sous l’éteignoir les médaillées olympiques de Londres, à savoir la Brésilienne Mayra Aguiar, l’Hongroise Abigel Joo et la Britannique Gemma Gibbons.
La fiche athlète d’Audrey Tcheuméo
La fiche athlète de Lucie Louette
Chez les hommes, c’est Ludovic Gobert qui est finalement monté dans l’avion pour Rio. Il aura fort à faire car, en cas de succès initial contre le Vénézuelien Mervin Rodriguez, il faudra sortir le grand jeu contre le Georgien Varlam Liparteliani, vainqueur à Paris et Düsseldorf en début d’année. Le Génovéfain en est capable.
Le classement des nations au soir du 4e jour
OR ARG BRZ 5e 7e
1. Japon 3 1 2 2 2
2. France 1 2 2 1 0
3. Brazil 1 1 1 1 0
4. Mongolie 1 1 0 3 0
5. Israël 1 0 0 0 1
6. Kosovo 1 0 0 0 1
7. Kazakhstan 0 1 0 1 2
8. Georgia 0 1 0 1 0
9. États-Unis 0 1 0 0 0
10. Belgique 0 0 2 0 1
Allemagne 0 0 2 0 1