Retour de Teddy Riner au Maroc, de Loic Pietri et Walide Khyar en Allemagne
La page du Grand Chelem de Paris 2019 à peine tournée que le comité de sélection officialisait les noms des judokas français qui combattront sur les prochaines étapes du circuit international : Grand Chelem d’Allemagne (Düsseldorf, 22-24 février), Grand Prix du Maroc (Marrakech, 8-10 mars), Grand Chelem de Russie (Ekaterinburg, 15-17 mars) et Grand Prix de Géorgie (29-31 mars). Après l’événement parisien dont le bilan est historiquement faible (0 médaille masculine, 5 médailles féminines), comment analyser les choix faits jusqu’à Tbilissi, et alors que le rendez-vous continental aura lieu fin juin (22-25 juin) – ce qui est beaucoup plus tard que d’habitude – à Minsk (Biélorussie) ? Première partie : les sélections masculines.
Stéphane Traineau, directeur du haut niveau déclare, en préambule, « qu’il y aura une sélection masculine en Géorgie. Elle sera composée en fonction des résultats des compétitions précédentes. Le message global sur ces choix est le suivant : nous avons tenu compte des résultats précédents, en particulier les médailles obtenues depuis la saison dernière et de l’attitude et de l’engagement, à la fois à l’entraînement et lors des compétitions. Certaines catégories ne sont pas pourvues, car notre projet n’est pas de sortir un combattant pour le sortir. On n’est pas dans une démarche de remplissage de cases. Pour les non-sélectionnés, le message est le suivant : « montrez-nous votre engagement ! », avec la possibilité pour eux de participer à des Open européen. Si il y a performance, alors nous y serons attentifs pour compléter certaines sélections publiées, la Géorgie, ou les tournois suivants. »
Une première lecture des noms publiés montre d’une part une volonté de sortir un groupe resserré puisque la catégorie où figure le plus de combattants est celle des -60kg avec quatre noms. D’autre part, la sélection montre clairement que le titre de champion de France ne garantit que la participation au Grand Chelem de Paris. La plupart des champions nationaux de Rouen ne sont pas concernés par cette première salve de sélections, hormis Kevin Azéma (-66kg) et Alexandre Iddir (-100kg). Les reverra-t-on sur le circuit mondial à partir d’avril ? Une donnée aussi valable chez lez féminines et qui continue à donner le sentiment que le titre national, n’est qu’une donnée, désormais à peine prise en compte dans un modèle qui s’apppuie surtout sur les réussites internationales et le point de vue de l’encadrement.
-60kg
Ils sont donc quatre dans les starting-blocks. Walide Khyar (FLAM 91). Champion d’Europe 2016, vainqueur du GP de Tunisie l’année dernière, opéré l’été dernier d’une hernie inguinale, 41e actuellement à la ranking-list; Romaric Bouda, vice-champion de France, 3e au GP de Hollande en novembre dernier, battu par le triple champion du monde japonais au deuxième tour à Paris, Naohisa Takato. « Il a été selon moi le meilleur concurrent du Japonais le week-end dernier, en le faisant presque tomber deux fois. Il a eu une belle attitude » dit de lui Stéphane Traineau. Le combattant d’Eure Judo est à l’heure actuelle 70e à la ranking-list; Cédric Revol (ESBM Judo), lui aussi blessé l’été dernier, revenu à la compétition au Grand Prix d’Israël où il finit en bronze. Il est 40e mondial. Enfin, Luka Mkheidze (Sucy Judo). Il est pour l’instant le meilleur Français à la ranking (32e) : battu par le jeune Jaba Papinashvili (médaille de bronze mondial juniors 2018 et vice-champion d’Europe -23 ans) à l’AccorHotels Arena, a connu une début de saison satisfaisant avec une médaille d’argent au GP du Mexique et une cinquième place au GP d’Ouzbékistan. Pas de Vincent Limare (ESBM Judo), 60e à la ranking-list, champion de France en titre, battu à Paris, après avoir passé deux tours, par le futur médaillé de bronze, le Géorgien Temur Nozadze.
-66kg
C’est le duel qui s’annonce pour la sélection aux Jeux européens. En lice, le jeune Daniel Jean (OM Judo), 57e à la ranking-list. Blessé lors du stage de Mittersill, il a dû déclarer forfait pour le Grand Chelem de Paris. Son dernier podium remonte à l’été dernier, lors de la Coupe d’Europe d’Allemagne (Saarbrucken) avec une troisième place. Sur le circuit IJF, le Marseillais avait récolté deux médailles de bronze lors des GP du Maroc et de Géorgie lors du premier semestre 2018. Le Grand Prix du Maroc sera sa deuxième compétition internationale cette saison, après Cancun (Mexique). L’autre postulant sera Kevin Azema, (JC Maisons-Alfort), 71e à la ranking, vingt-cinq ans. Dans cette catégorie sans leadership, son titre de champion de France est sa légitimité. Il reste sur quatre compétitions sur lesquelles il ne s’est pas classé : les GP du Mexique, d’Ouzbékistan, de Hollande et le Grand Chelem parisien. Il a gagné un Open en 2017 et s’est hissé en finale d’un autre en 2018. Dans cette catégorie, le Français le mieux classé reste cependant Kilian Le Blouch (50e mondial), vainqueur il y a dix jours de l’Open du Portugal. Un combattant sur lequel ne compte visiblement plus du tout le staff masculin car il n’est annoncé nulle part.
-73kg
Une catégorie où les choses sont simples puisque un seul judoka sortira sur les prochaines échéances : Guillaume Chaine (ESBM Judo), dont, factuellement, la dernière performance majeure remonte à 2017 (3e place au Grand Prix d’Allemagne), mais qui « reste sur un bon Grand Chelem de Paris et de bons championnats du monde » argue Stéphane Traineau, qui ajoute : « cette catégorie est stratégique puisqu’elle fait partie des trois de l’épreuve par équipes mixtes. » Chaine qui a fini 7e le week-end dernier mais non-classé aux GP du Mexique, de Hollande et d’Israël cette saison. Le combattant de l’ESBM, trente-deux ans depuis le mois d’octobre, est actuellement 44e mondial.
Aucun autre Français n’est retenu. Pas de Benjamin Axus, qui explique sur les réseaux sociaux aujourd’hui avoir été en outre sorti du groupe olympique, et qui fait manifestement parti de ceux qui doivent « montrer leur engagement ». Vainqueur d’un Open en 2018, le combattant de l’AJA XX reste sur trois défaites au premier ou au second tour, non classé en Hollande, en Israël et à Paris. Il a cependant fini 5e au GP de d’Ouzbékistan et reste sur une sélection mondiale dans laquelle l’encadrement français avait salué son engagement. Il est aussi le mieux classé des Tricolores dans la catégorie (31e à la ranking), encore loin devant Chaine. Pas non plus de Luca Otmane, champion de France en titre, sélectionné français l’année dernière aux championnats d’Europe. Le Niçois de l’OJN (110e mondial) n’a pour l’instant pas réussi à être classé sur aucun des tournois du circuit IJF auquel il a participé.
-81kg
Nicolas Chilard (JC Chilly-Mazarin Morangis), champion de France en titre et dont les prestations à La Haye et Osaka furent de bonne facture (il perd deux fois face au Hollandais Frank De Wit, actuel 2e mondial) s’est blessé aux ischio-jambiers lors de son premier combat dimanche à Paris. Les examens complémentaires détermineront son indisponibilité. Du coup, trois judokas ont été choisis : Armann Khalatian (SGS Judo), vainqueur de deux combats ce week-end dont un face au Japonais Takeshi Sasaki (vainqueur du Grand Chelem d’Osaka et du Masters 2018). 97e mondial, il a deux médailles sur le circuit IJF à son palmarès : une en or à l’Open panaméricain du Pérou et une d’argent à l’Open d’Argentine, en mars 2018. Cette saison, il a participé sans être classé au GP d’Ouzbékistan et à l’Open européen du Portugal il y a dix jours.
Alpha Djalo (JC Chilly-Mazarin Morangis), forfait pour Paris en raison d’une blessure, 33e à la ranking list, et dont ce sera la quatrième sortie internationale cette saison après les GP du Mexique, de Hollande et le Grand Chelem du Japon où il ne finit pas dans les sept. Il est le Français le mieux classé à la ranking-list;
Giga Abuashvili (Stade Bordelais ASPTT), champion de France juniors 2018 (il est junior 3e année cette saison) et vice-champion de France seniors 2018. Lui aussi forfait pour Paris, il n’est pas classé à la ranking list. Ayant obtenu la nationalité française l’année dernière, sa prestation à Rouen lors des 1re division a donné envie au staff de le voir très vite à l’international.
Dans cette catégorie, pas de Baptiste Pierre (ESBM Judo), très régulier au niveau national (il en est à trois médailles consécutives), sélectionné initialement pour Paris mais lui aussi forfait.
-90kg
Avec la blessure aux ischio-jambiers d’Axel Clerget (Sucy Judo), incontestable n°1 français de la catégorie (il est 13e mondial), deux noms ont été retenus par le comité de sélection : Aurélien Diesse (ESBM Judo), 62e mondial et dans sa seconde année senior. Non classé au Grand Prix d’Ouzbékistan et à Paris, ce dernier, champion d’Europe juniors 2017, si il ne se classe pas pour l’instant, mais garde tout son crédit auprès du staff car il reste sur des productions sans calcul, dans un style très offensif et rythmé, comme aux championnats du monde (où il bat le champion du monde en titre, le Serbe Nemanja Majdov) ou dimanche à l’AccorHotels Arena, où il ne cède que face au Japonais Kenta Nagasawa, 11e mondial.
L’autre combattant retenu n’est autre que Loïc Pietri (OJ Nice). Le triple médaillé mondial en -81kg, qui s’était donné pour objectif un retour progressif aux tournois les plus denses de sa nouvelle catégorie depuis Rio, va donc retrouver beaucoup plus tôt sans doute qu’il ne le souhaitait lui-même, le niveau d’opposition d’un Grand Chelem. Actuel 116e mondial, le Niçois reste sur une victoire à l’Open européen du Portugal.
Une catégorie où le vice-champion de France, Loris Tassier (CO Sartrouville), vingt-et-un ans, n’aura donc eu le droit, pour l’instant, à aucune sélection internationale depuis le championnat national.
-100kg
Comme pour les -66kg, deux judokas seront en lice dans cette catégorie. Une décision attendue et logique. Un duel à distance entre Cyrille Maret et Alexandre Iddir. Dans le dur depuis sa seconde médaille continentale en 2018, désormais 24e mondial, le médaillé olympique de Rio n’a pour l’instant remporté aucune médaille depuis le début de la saison. Une dynamique négative que le Bourguignon va avoir l’occasion d’enrayer par deux fois, lors des Grand Chelem d’Allemagne et de Russie. De son côté Alexandre Iddir est désormais 18e à la ranking-list après sa 7e place à Paris, en ayant battu les deux pointures que sont Kirill Denisov et Elmar Gasimov et sa victoire au Grand Prix d’Israël. Début novembre il avait aussi fini en argent au Grand Prix d’Ouzbékistan.
+100kg
C’est l’événement majeur : le retour de Teddy Riner à la compétition dans la ville où il avait combattu pour la dernière fois, en 2017 : Marrakech. 28e actuellement à la ranking-list, le double champion olympique et décuple champion du monde a avancé sa rentrée (il devait normalement reprendre au GP de Turquie). Il sera accompagné de Hamza Ouchani (Blanc Mesnil Sport Judo), 65e mondial, dont la dernière compétition internationale remonte aux Jeux Méditerranéens, fin juin 2018. La saison dernière, Ouchani avait fini deux fois cinquième lors des Grand Prix du Maroc et de Géorgie. Pas de Nabil Zalagh, pourtant à peine moins bien classé qu’Ouchani (66e mondial) et en bronze à l’Open européen du Portugal début février, ni de Hadrien Livolsi, ni de Messie Katanga, le champion de France. En clair, aucun des trois sélectionnés pour Paris ne ressort pour l’instant.