
Crédit photo : Tamara Kulumbegashvili/IJF
Un lundi comme un dimanche. Il y a deux jours, Morgane Annis allait chercher une médaille de bronze pour clore ses années juniors après être passée à côté de ses championnats d’Europe.
Hier, l’histoire de Sandra Darbes-Takam (RSC Champigny) ressemble à s’y méprendre à celle de son amie des -48kg : vice-championne d’Europe 2024, la Campinoise avait été l’une des déceptions des championnats continentaux slovaques il y a un mois, en ne terminant que cinquième. Mais, tout comme la néo Asniéroise, cette combattante restée de nombreuses années au club de DAN 79, s’offre pour sa dernière compétition juniors une troisième place mondiale, dans sa catégorie des -70kg.
Au jeu des sept erreurs, on notera que Darbes-Takam est pour l’instant la première et la seule Tricolore à avoir battu une judoka de l’équipe japonaise. En effet, les duels franco/japonais, au nombre de cinq dimanche – dont le quart de finale de Morgane Annis – avaient tous jusque-là basculé du côté nippon. Ce lundi, la -70kg française bat d’entrée Yoshino Takahashi (lycée d’Omuta), deux waza-ari à un : un o-soto-gari à gauche d’abord et un sumi-otoshi en contre au golden score ensuite. À cet égard, Doria Boursas (Arts martiaux Asnières), médaillée de bronze aux championnats d’Europe en -63kg et autre engagée féminine du jour, tombait elle d’entrée contre So Morichika (université de Ryokoku) – future championne du monde – , après deux minutes de golden score, sur une immobilisation suite à un travail de dégagement de jambe.
En quart de finale, Darbes-Takam dominait la Croate Lana Cvjetko sur un contre vers l’arrière où un yuko était accordé à la Française au golden score sans qu’encore une fois tout soit clair sur les critères d’appréciation de la valeur. Le yuko, une marque qui relève souvent du « air judo » puisque là comme dans de nombreux cas, il n’y eut absolument impact sur le flanc ni le haut du corps et qu’on peut se demander, même avec une vidéo comment apprécier l’angle (90 degrés ou presque) avec le sol puisque il n’y a pas de contact avec le tatami.
Qualifiée pour le dernier carré, la championne de France juniors 2025 aurait pu ne pas se remettre de sa défaite en demi-finale face à la Serbe Aleksandra Andric. Et pour cause : elle menait yuko/waza-ari avant la mi-combat ! Un o-soto-gari, cette fois-ci à droite et un sode-tsuri-komi-goshi où son adversaire passait de l’autre côté, lui permettaient de diriger ce combat de manière claire et autoritaire. Mais un ko-soto-gake suivi par un travail au sol d’Andric détruisaient toutes les illusions de la Tricolore.
Mais Darbes-Takam, habituée des échéances mondiales – elle fait partie de la génération cannibale dont nous vous parlons dans le numéro de L’Esprit du Judo actuellement disponible – avec une cinquième place aux championnats d’Europe et du monde cadets en 2022, réussit à laisser cette défaite cruelle derrière elle pour clore cette journée avec une belle revanche prise comme Morgane Annis hier. Encore.
En effet, elle bat pour le bronze la Suédoise Ingrid Nilsson qui l’avait battue, il y a trois ans, pour la troisième place mondiale chez les cadets ! Un combat à sens unique : waza-ari, yuko, ippon avec un o-soto-gari à gauche, un contre et une clé de bras ! Jeune femme pétillante, très dangereuse en reprise de garde (à droite et à gauche) en particulier en début de combat – elle marque beaucoup de valeurs lors de la première minute -, Sandra Darbes-Takam ferme son chapitre juniors de belle manière. Deuxième médaille de bronze pour la France qui voit ses deux masculins du jour, Peter Jean (JC Chilly-Mazarin Morangis) et Dayyan Boulemtafes (PSG Judo) s’incliner dès les éliminatoires : ce dernier face à l’Ouzbek Murhiddin Marufov sur un corps-à-corps. Peter Jean, en bronze à Bratislava, s’arrache joliment pour battre le Russe Atmir Soblirov sur un morote-seoi-nage au golden score mais se fait surprendre par le ko-soto-gari du Moldave Renat Croitoru, finalement cinquième à la fin de la journée.
Les masculins français, toujours sans médaille ce soir, auront encore trois possibilités de médaille demain, en particulier avec les deux +100kg. Une journée importante pour le bilan du groupe de Nicolas Mossion et sa génération cannibale.
Un lundi où le Japon consolide sa domination avec eux nouveaux titres : celui de la -63kg, tombeuse de Doria Boursas d’entrée, victorieuse en finale de la Russe Viktoriia Martynenko par trois yuko dont deux sur des très beaux mouvements de jambe : un ko-uchi makikomi à gauche et un ni-dan ko-soto-gari.
Une finale nippo/russe qu’on retrouvait également en -81kg avec la victoire du Tenri Boy Haru Akita face à Akhmed Turluev, enn bronze aux championnats d’Europe. Un ko-soto-gake poussé à fond et voilà le Japon à cinq titres et déjà à onze médailles avec deux podiums hier pour les des deux -73kg : l’argent pour Ryuseri Arakawa (université de Kokugakuin) et le bronze pour Keito Kihara (université de Tokai), cinquième en 2023 et champion du monde l’année dernière.
Deux combattants battus par le même homme, le Tadjik Muhiddin Asadulloev, un judo très collé et sans amplitude mais qui lui permettait de mettre un sumi-gaeshi à Kihara en demie et de contrer Arakawa sur uchi-mata gaeshi en finale. Vainqueur du Grand Chelem de Douchanbé début mai, il s’affirme comme le n°1 tadjik en seniors et complète une équipe masculine qui s’avère désormais presque complète.
Enfin, apothéose pour la Suissesse April Fohouo. Championne d’Europe et vice-championne du monde 2024, vice-championne d’Europe début septembre à Bratislava, voilà la protégée de Flavio Orlik et Dominique Hischier championne du monde juniors ! On le dit et on le répète mais la qualité du travail suisse sur ses athlètes juniors et seniors relève de l’horlogerie du même pays. Une détection précoce souvent très pertinente, un niveau technique remarquable – pensons à Nils Stump ou Daniel Eich – et une planification au long cours performante et voilà la Suisse – troisième par équipes en Slovaquie il y a un mois pour sa première participation à cette épreuve – qui remporte son premier titre mondial dans cette catégorie d’âge grâce à sa -70kg, qui, après avoir battu l’une des deux Japonaises d’entrée, surprend la Serbe Andric en finale avec un sasae-tsuri-komi-ashi à la fin de la première minute.
Ce mardi, le Japon écrase la compétition, la France est douzième avec des belles cartouches à tirer ce mardi.