Annabelle Euranie et Laetita Blot, une présence incontournable

La Kosovare Kelmendi (1e et n°1 mondiale), la Roumaine Chitu (2e et n°3 mondiale), la Russe Kuziutina (3e et n°4 mondiale)… et la Française Euranie (3e et n° 10 mondiale), un podium européen de très haut niveau / Officiel IJF

Premièe journée de judo d’un Grand Chelem « new generation », celui d’Abou Dhabi – Grand Prix né en 2011 et Grand Chelem pour la première fois cette année en 2014. Deux combattantes françaises engagées ce jour… deux combattantes ? Trois, à vrai dire, mais Priscilla Gneto, inscrite en -52 kg, n’a pas pu faire le poids, annoncée même par nos confrères du Parisien à un kilo et quatre cents grammes au dessus de la limite requise. L’incapacité à descendre au poids de la combattante de Levallois a été confirmée par l’encadrement fédéral et une réunion aura lieu au retour de la délégation pour une éventuelle suspension de la combattante, comme cela avait été le cas pour Clarisse Agbegnenou, pour la même raison, il y a quelques mois. 

Euranie, comme une évidence

Annabelle Euranie était donc seule en piste en -52 kg et elle en a profité pour imposer une nouvelle fois la crédibilité de ses prétentions à être la titulaire en équipe nationale. La Française, 10e mondiale, a d’abord surclassé l’Irlandaise Lisa Kearney, 34e mondiale tout de même, avant de mettre un uchi-mata impossible à la Portugaise Joana Ramos, 19e mondiale, suivi d’un dégagement de jambe au sol. Intéressant pour une combattante dont le point faible assumé se situe à ce niveau….
En demi-finale, notre mère de famille de deux enfants, vice championne du monde 2003, affrontait la plus terrrible des adversaires, l’irrésistible Kosovare Kelmendi, championne du monde 2013 et 2014. Si on ne peut pas dire que le combat fut serré – Kelmendi se contenta d’accélérer par séquences pour mettre son adversaire à genoux et la faire pénaliser par trois fois – la garde haute de gauchère d’Euranie ne permit pas à la gauchère Kelmendi de trouver ses marques pour une projection définitive. Non seulement Annabelle Euranie fut la seule à ne pas prendre ippon, mais elle ne prit pas non plus d’avantage. Elle est certes encore loin d’être capable de faire face à la meilleure mondiale, mais elle a montré ce vendredi qu’elle avait peut-être les moyens de la gêner dans le futur en continuant à renforcer sa puissance et sa qualité d’appui. Pour la place de troisième, elle est allée ensuite battre facilement sur son uchi-mata la Chinoise Ma Yingnan, 17e mondiale et victorieuse du Grand Prix de Mongolie en juillet. 5e en Hongrie en juin (comme Priscilla Gneto), victorieuse du Grand Chelem de Baku (en battant la même Gneto en finale), désormais confirmée comme l’une des toutes meilleures de la catégorie au niveau mondial quelques mois après son retour… la montée en puissance de notre championne de 32 ans sonne comme une évidence. 

Laetita Blot, toujours là !

En -57 kg, on suivait avec intérêt la prestation de Laetitia Blot, inattendue championne de France en novembre de l’année dernière, victorieuse de l’Open de Casablanca en janvier, 5e du tournoi de Paris en février, victorieuse du Grand Prix de Turquie en mars, 3e du Grand Chelem de Baku en mai, victorieuse du Grand Prix de Croatie en septembre. Impeccable à chaque fois, comme pour réaffirmer qu’elle est bien là, Laetitia Blot est encore brillante en cette fin de mois d’octobre, et confirme qu’elle est bien, elle aussi, l’une des leaders mondiales de la catégorie, elle aussi à sa place dans le top dix où la finale qu’elle atteint ici, à Abou Dhabi, va la faire entrer.
Elle domine d’abord largement l’Espagnole Jaione Equisoain, 50e mondiale, sur un seoi-nage tout droit debout, pour waza-ari, et un premier ura-nage pour yuko. Elle rencontre ensuite la grande et expérimentée Autrichienne Filzmoser, 5e mondiale, pour son premier exploit du jour. Beaucoup plus petite, mais hyper-stable et surpuissante, Laetita Blot, la plaquait une première fois au sol pour waza-ari, avant de l’arracher d’une position quasiment à plat ventre en ura-nage pour ippon. En demi-finale, c’est la Roumaine Corina Caprioriu qui prenait le suivant, un remarquable ura-nage en contre de de ko-uchi-gari pour la seconde « perf » du jour, contre la finaliste des Jeux de Londres 2012. En finale, c’est la vice-championne du monde, l’éternelle et formidable Portugaise Telma Monteiro qui l’attendait au tournant. Victorieuse avec lucidité et une concentration sans faille d’une Coréenne du Nord, forte… comme une Coréenne du Nord, Ri Hyo-Sun, la Portugaise, cinq fois médaillée mondiale et dix fois médaillée européenne allait monter le niveau d’un cran et demi. La championne de France se sortait acrobatiquement d’un premier très fort sode-tsuri-komi-goshi, et d’un renversement ultra efficace au sol, mais finissait par être victime d’un seoi-nage précis et du même remarquable travail en ne-waza. À 28 ans, Telma Monteiro est plus que jamais prétendante à son premier titre mondial, à sa première médaille olympique. Quant à Laetita Blot, elle administre sans se lasser preuve sur preuve du niveau qu’elle a atteint, et qui lui permet de revendiquer, sinon la place de la médaillée mondiale Automne Pavia, encore au-dessus, du moins un ticket pour un championnat officiel en individuel. Cette année, même à neuf, les titularisations en équipe de France vont être plutôt chères.

Une attaque de la Portugaise Telma Monteiro sur la Française Laetitia Blot en finale du Grand Chelem 2014 des Emirats Arabes Unis à Abu Dhabi / Officiel IJF

Munkhbat et Kelmendi en patronnes

En -52 kg, la Kosovare Kelmendi expédiait sur un beau mouvement de hanche en contre la finaliste du championnat du monde, la Roumaine Chitu, victorieuse elle-même dans un beau duel (conclu sur un formidable kubi-nage), de la Russe Kuziutina. En -48 kg, c’était le retour de la championne d’Asie 2014 – et championne du monde 2013 – la Mongole Urantsetseg Munkhbat, très solide contre la Coréenne du Nord Kim Sol en demi et finalement victorieuse de la championne d’Europe hongroise Csernovicki sur un petit ko-uchi-gari dans le temps. 
Chez les hommes, l’Azéri Orkan Safarov, 7e mondial grâce à sa victoire au Grand Chelem de Baku, s’assure une nouvelle pêche miraculeuse qui va l’amener dans les cinq meilleurs mondiaux, avec une nouvelle victoire fructueuse, en battant en finale le 8e mondial et finaliste du championnat du monde 2013, le Mongol Amartuvshin Dashdavaa.
Surpris par un Slovène de 19 ans, Adrian Gomboc (futur 5e), le n°2 mondial et finaliste à Chelyabinsk, le Russe Pulyaev, laissait le Biélorusse Dzimtry Shershan, 13e mondial, s’emparer des 500 points au vainqueur dans la catégorie des -66 kg, devant le vice champion d’Europe 2011 azéri Tarlan Karimov, l’un des hommes forts de la catégorie jusqu’en 2012 et peu présent depuis. La Mongolie et l’Azerbaijan marquent cette première journée avec trois médailles pour chacune de ces nations, en or, argent et bronze.