Une réussite en or pour la vice-championne du monde 2003

Annabelle Euranie dans ses oeuvres en finale contre la Brésilienne Miranda / © Officiel IJF

Annabelle bien sûr ! C’est sans doute à cela qu’on reconnaît un(e) grand(e) champion(ne). Il (elle) est capable de nous bluffer quand on ne s’y attend pas, assumant mieux que les autres les enjeux, les victoires et les défaites. On avait quitté Annabelle Euranie (-52 kg) malade à Astana, mal dans son judo et sortie de son incroyable aventure – son retour au premier plan après des années d’interruption consacrées à une vie de mère de famille -, alors même que le tirage au sort semblait lui être favorable pour l’incroyable consécration d’une médaille mondiale. Non classée, reléguée en bas de page, cela ressemblait à une conclusion, triste et injuste, d’autant que sa grande rivale Priscilla Gneto montrait au tournoi de Paris, alors qu’elle échouait de son côté devant la jeune Kosovare Krasniqi, un net regain de forme. Mais la longue silhouette de la dame brune, reine fantôme revenue du XXe siècle, n’a pas fini de hanter ses rivales. Elle a tout encaissé et revient plus forte que jamais à la première occasion qui lui est donnée. À Abou Dhabi, elle rayonne d’une énergie nouvelle, plus impressionnante encore, donnant un sacré avertissement à celles et ceux qui pensaient peut-être qu’elle allait retourner à sa vie de famille. Au lieu de cela, elle assomme la concurrence aux Emirats. Quel mental ! Le parcours est énorme. Après un combat tranquille sur une Coréenne victorieuse du tournoi de Corée et troisième des championnats d’Asie en 2012 et qui revient bien, comme tout le groupe féminin du Pays du Matin Calme, elle expulse l’Allemande Kraeh, 9e mondiale en moins de trente secondes, une combattante qui avait justement montré les limites de la Française l’année dernière au tournoi de Paris. Triomphe pour elle, elle écarte en demie sa rivale française d’un yuko, avant d’expédier en quelques secondes en finale, d’un de ses grands mouvements de jambe, la Brésilienne Miranda, en pleine bourre après sa troisième place mondiale, et alors que cette dernière venait de sortir en la dominant copieusement la terrible Kosovare Kelmendi – laquelle était invaincue depuis avril 2013. Grosse journée et grosse caté.
La bataille n’est pas finie, Priscilla Gneto confirme qu’elle est bien de retour en finissant troisième et en sortant en tableau la n°1 mondiale et vice-championne du monde Andreea Chitu. Annabelle Euranie ne rencontre ni Chitu, qu’elle n’a jamais battue, ni Kelmendi (et pour cause), ni la jeune Kosovare Krasniqi, une bête noire, mais l’effet de sidération est néanmoins pleinement réussie. La suite va être passionnante à suivre.

Pavia n’est (encore) pas là

L’aventure est moins belle pour Automne Pavia (-57 kg), qui a du mal à revenir d’Astana (où elle a rapporté une brillante médaille de bronze). Inexistante à Paris, elle est une nouvelle fois battue d’entrée dans la compétition. Pas de péril en la demeure, Rio est encore à quelques encablures et elle est toujours dans les dix meilleures mondiales. Laetitia Blot, 18e mondiale, a eu de son côté le mérite de battre d’entrée l’Allemande Roper, 9e mondiale, mais n’a pu faire mieux que septième du tournoi, écartée par la solide Canadienne Beauchemin-Pinard (8e) et par la Serbe Rogic (22e).

Limare – Milous, 2-0

Pour les garçons, la bataille des -60 kg tourne une nouvelle fois, même si c’est plus légèrement qu’à Paris, en faveur de Vincent Limare. Sofiane Milous, désormais 26e mondial, est en effet sorti à son deuxième combat par l’Ouzbek Urozboev (16e), futur troisième, tandis que Vincent Limare, remarquable finaliste à Paris et 12e mondial, passe un tour de plus avant de buter sur l’homme en forme du jour, un Turc sans trop de référence, Bekir Ozlu (46e), qui réussit l’exploit de sortir le Kazakh champion du monde Yeldos Smetov… et pour cause, il s’agit en fait de l’ancien champion géorgien de la catégorie, un adversaire redoutable, devenu Turc pour des raisons politiques. Pas de consécration cette fois pour Limare écarté par hansokumake de la médaille, mais surtout une nouvelle ocasion qui s’envole pour Milous de revenir dans la course. 

Khan-Magomedov trop fort pour Le Blouch

En -66 kg, Kilian LeBlouch (49e) avait l’occasion de montrer qu’il mérite d’être considéré comme un outsider dans ce contexte très relevé. Mais l’occasion est ratée. Il résiste pendant deux minutes trente au redoutable Russe Kamal Khan-Magomedov (14e) avant de s’incliner par ippon. On ne peut guère le lui reprocher, le Russe n’a pas perdu devant un Français depuis… Dimitri Dragin en mai 2013.

Galstyan est de retour !

Tandis que la catégorie des -60 kg revenait au Géorgien Papinashvili, le spectacle était en -66 kg. On attendait la prestation du premier « Olympien » aligné par Ezio Gamba et on n’a pas été déçu. Arsen Galstyan fait un festival en -66 kg, se hissant en finale en battant l’Azéri Shikalizada, le médaillé mondial 2015 ouzbek Sobirov et l’Ukrainien Zantaraia en demi-finale. Le petit Prince arménien est de retour ! Il a désormais 26 ans et semble prêt à reprendre le leadership de la catégorie juste avant les Jeux. Avec lui, les Olympiens sortent du bois après presque quatre ans de cache-cache. On attend aussi Mansur Isaev (-73 kg) et Tagir Khaibulaev (-100 kg) dans le même registre, ce serait beau… Mais on est aussi curieux de voir le petit jeune Khasan Khalmurzaev demain en -81 kg, en l’absence du médaillé olympique Ivan Nifontov. C’est peut-être lui le futur olympien. La place aux Jeux devrait se jouer entre ces deux-là.

An Baul persiste et signe

Il y a les Russes, mais la Corée confirme aussi son nouveau statut et son nouvel homme fort : le champion du monde An Baul (-66 kg) l’emporte en battant le Russe Galstyan en finale d’une pénalité. Si on cherche un favori pour Rio dans cette catégorie, c’est sans doute lui, en attendant l’éventuel réveil du Japonais Ebinuma. Place demain au médaillé mondial An Changrim (-73 kg), très impressionnant à Astana, et au malchanceux Kim Jae-Bum (-81 kg), le double champion du monde et champion olympique, qui brûle d’une revanche à prendre. 

Dolgova, en or pour la première fois en Grand Chelem

La Corée ? C’est aussi la victoire chez les féminines de Kim Jan-Di, celle qui écarte en -57 kg Automne Pavia dès le premier tour. Première à l’Open de Taiwan en juillet, première au Grand Prix d’Ouzbekistan en octobre, La Coréenne serre le jeu, et manifeste à travers sa réussite actuelle le retour des Coréennes vers le sommet. Quant aux Russes… c’est en -48 kg qu’ils montrent que leurs féminines ont aussi quelques atouts avec Irina Dolgova, coaché par le Français Patrick Roux. Elle avait impressionné à Astana et s’affiche désormais en outsider pour les Jeux.