La championne olympique américaine bat Tcheumeo en finale

On l’avait quitté sur un titre olympique à Londres. La championne du monde 2010, championne olympique 2012, l’Américaine Kayla Harisson, avait alors décidé de faire un break, de tenter un challenge en -70 kg pour l’olympiade suivante. Deux tournois en demi-teinte plus tard, une 3e place au championnat pan-américain en 2013 et une blessure dans la foulée, et l’Américaine de 23 ans semble revenue dans la catégorie qui lui a déjà tant souri, en -78 kg. Premier essai et déjà un coup de maître. Elle gagne ce Grand Prix de Cuba, en s’offrant en finale le scalp de la toute nouvelle championne d’Europe, la championne du monde 2011, la Française Audrey Tcheumeo, laquelle avait battu la Cubaine Castillo et pris sa revanche sur celle qui l’avait mystifiée au sol au championnat du monde 2013, la Canadienne Roberge. Il n’y a pas un gros écart entre les deux divas. Mais l’Américaine a su obtenir une première pénalité et ménager ensuite une série de fausses attaques suffisament convaincantes – dont une vraie sur un joli ko-uchi-gari – pour empêcher l’arbitre de ramener la Française à égalité, malgré des attaques plus fortes de la part de cette derrnière. Un classique désormais, hélas, entre deux pointures. Le combat est esquivé, tout se règle sur une pénalité…
Quoiqu’il en soit, la championne la plus forte de cette catégorie de ces dernières années, Kayla Harisson, semble bien de retour, et c’est une mauvaise nouvelle pour Audrey Tcheumeo et l’équipe de France.

Ma Sisi, la Chinoise pour les championnats du monde ?

La nouvelle championne d’Europe Emilie Andeol a confirmé son statut en +78 kg en réussissant à battre pour la médaille de bronze la Cubaine championne olympique 2012 et championne du monde 2013 Idalis Ortiz Bocourt – laquelle est moins flambante depuis 2013 – après avoir dominé la Mexicaine Zambotti. Elle a néanmoins cédé devant la nouvelle Chinoise qui en impose, Ma Sissi, une combattante qui n’a pas l’aura des « monstres » des années passées, Tong Wen et Fuming Sun, mais qui paraît tout de même très copieuse physiquement. Dommage, car en l’absence d’une Russe vraiment forte, à un moment où elle domine les Allemandes de la catégorie – Franziska Konitz ou Jasmin Kuelbs – le timing est bon pour Andeol pour aller chercher à Chelyabinsk une médaille mondiale. 

Une première pour Nikiforov

Chez les hommes, la finale est inattendue en -100 kg. En bas de tableau, c’est le grand Suisse Flavio Orlik, finaliste de l’Open de Bulgarie en février, qui surprend en battant avec son uchi-mata non seulement le Suédois Martin Pacek, mais aussi le Russe Bisultanov, 3e des championnats d’Europe et en grosse progression, sur une longue attaque initiée en uchi-mata et bien maintenue avec les mains. Mais la sensation vient de l’autre tableau avec le jeune Belge Toma Nikiforov, médaillé européen junior en 2011, 2012 et 2013, médailé mondial junior en 2013, qui fait son deuxième gros coup, après sa victoire à l’Open de Tchéquie en mars. Mais celui-là, c’est vraiment un coup de taille pour le représentant belge de notre « Judo Academy » ! Il enclenche son tournoi par une victoire déjà probante sur l’Argentin Hector Campos (« modeste » 56e mondial, mais Nikiforov est 41e) sur une double attaque en seoi-nage très réussie. Il passe ensuite dans une dimension largement au-dessus en sortant le Tchèque Krpalek « himself », qu’il troue deux fois par waza-ari sur un o-uchi-gari en cercle préparé par un mouvement de hanche, puis par une attaque en sode bas sur le dernier rush de l’Albatros, très mécontent. Suite à cet exploit contre le tout nouveau n°1 mondial, il confirmait joliment contre le Brésilien Hugo Pessanha, 22e mondial, vainqueur de deux Open sud-américains de mars, dont le style technique lui posait des problèmes… jusqu’à ce que le jeune colosse belge trouve la solution en ura-nage. Trois arrachés plus tard, il terminait sur un « uran » monumental. En finale, Orlik ne faisait pas durer le suspens. Le long Suisse blond était catapulté sur un seoi-nage parfait en quelques secondes par le molosse belge. Toma Nikiforov était récompensé, en plus de la médaille d’or, par une désignation comme « meilleur combattant » du tournoi et c’était bien mérité. Lui aussi, il faudra le suivre à Chelyabinsk.

Toma Nikiforov, un somptueux ura-nage sur le Brésilien Pessanha. / Officiel IJF

Et de trois pour la Géorgie

Le champion d’Europe Varlam Liparteliani ajoute le troisième titre masculin pour les Géorgiens après celui du -60 kg Papinashvili et celui de Tchrikrishvili en -81 kg. Lui aussi très sûr de lui et de son terrible mouvement de hanche enroulé, plein d’expérience, il en impose à la concurrence… dont l’un des membres les plus actifs fut le petit, mais ultra-puissant Beka Gviniashvili, champion d’Europe et champion du monde juniors 2013, un Géorgien lui aussi ! Gviniashvili sort du tableau l’excellent Russe Kirill Vorposov, soulevé de terre en corps à corps. Ces deux-là finissent troisième. Il faudra que l’Asie soit forte pour immiscer quelqu’un dans le débat au championnat du monde dans cette catégorie face à ces hommes-là. L’Amérique aura El Magnifico Tiago Camilo. Le moine judoka brésilien est de retour et il est toujours élégant et efficace. Mais sa confrontation avec Liparteliani fut à sens unique.
Heureusement pour le reste du monde, les deux poids lourds géorgiens étaient un peu en vacances à Cuba, peut-être un peu usés aussi par le rythme des tournois qu’ils enchaînent. Ils se faisaient battre tous les deux par… Chris Sherrington, un poids lourd britannique hyper rugueux, mais jusque là très loin du niveau. C’était son jour. De-ashi-barai pour yuko et quatre pénalités contre Okruashvili, un mouvement de hanche tout en puissance contre Matiashvili, il se hisse en finale, où il perd contre le grand Russe Saidov, l’homme des juji-gatame directs. Les progrès du Russe sont remarquables. Il est devenu puissant et attaque efficacement debout sur uchi-mata. Sa clé obtionnelle est toujours très dangereuse et il a battu le Hongrois Bor avec un étranglement tout aussi rapide et efficace. Un vrai outsider pour une médaille mondiale. Pour l’or… il lui manque encore un peu de stabilité et de force pour challenger Teddy Riner.

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