Trois médailles masculines françaises, l’Europe comme chez elle

Participer à un open (peu rémunérateur en points) à 14 269 kilomètres et vingt heures d’avion de Paris ? Voilà une stratégie qui interrogea beaucoup d’observateurs lorsqu’ils virent une sélection masculine tricolore à l’Open d’Océanie de Perth (Australie). Une décision qui présentait pourtant une vraie logique : d’une part, parce que cet open est valorisé comme un Grand Prix, ce qui, tout de suite, rend les choses plus intéressantes dans la course olympique. D’autre part, parce que la distance pour se rendre à l’autre bout du globe pouvait laisser penser que la densité serait bien moindre qu’un Grand Prix sur le Vieux Continent. Une hypothèse en partie (seulement) vérifiée puisque d’autres pays européens tinrent finalement le même raisonnement. Au final ? Avec cinq combattants en lice (Kilian Le Blouch et Walide Khyar, prévus au départ, étaient aperçus à Amiens ce week-end), l’équipe de Franck Chambily et Christophe Massina repart avec trois médailles, dont l’or pour Alexandre Iddir en -100kg, auteur d’une finale enthousiasmante contre le Russe Ilyasov. Cyrille Maret et Guillaume Chaine rentrent d’Australie, eux, avec du bronze autour du cou. Un open lors duquel l’Europe truste toutes les catégories, la Russie légèrement en tête.

Iddir mate Ilyasov

Non diffusés et enregistrés par la FIJ, les combats de cet open, diffusés sur un streaming australien, n’auront pas le droit à une possibilité de revisionnage. Et c’est bien dommage, au moins pour la finale des -100kg entre le Marseillais Alexandre Iddir et le vice champion du monde de Tokyo, Niyaz Ilyasov. Un combat superbe de maîtrise et de technicité de la part du Tricolore face au numéro un russe, pas franchement déçu de sa défaite. Une attitude traduisant ce constat de plus en plus explicite dans l’équipe d’Ezio Gamba, que seuls les grands rendez-vous les transcendent ? Quoi qu’il en soit, gardant à distance durant tout le combat le double médaillé mondial (2018 et 2019), le combattant de l’OM Judo place deux ippon-seoi-nage à droite debout qui scellent une victoire nette et spectaculaire. Son second mouvement est tout simplement sublime ! En demi-finale, le médaillé d’argent du Grand Prix de Croatie, dans un duel franco-français contre Cyrille Maret, trouve la solution au golden score, sur ippon-seoi-nage déjà, mais à genoux et en aspiration, alors que le score était de deux shidos partout. Maret qui finira troisième après sa victoire aux pénalités contre l’Ukrainien Savytskyi, 52mondial et sans références sur le circuit IJF. Après sa déconvenue des championnats du monde du Grand Chelem d’Abou Dhabi, cette victoire et ses 700 points permettent à Iddir de désormais pointer à la quatorzième place mondiale (Maret est 24e) mais surtout de se remettre sur les rails d’une dynamique positive. Et face à cette nouvelle démonstration, on se demande vraiment ce qu’il manque au Marseillais pour le faire rentrer parmi les médaillés mondiaux ou olympiques, tant ce qu’il montre de plus en plus régulièrement fait de lui l’un des meilleurs judokas de la catégorie.
Une victoire contre Liparteliani dans un grand rendez-vous par exemple ? Devant Cyrille Maret, sans pour autant que ce dernier soit distancé, la sélection olympique entre les deux se jouera toutefois et sans doute jusqu’aux championnats d’Europe 2020 en République Tchèque.

Chaine retrouve le podium, pas Mkheidze

Septième au Grand Chelem du Brésil, Guillaume Chaine n’avait plus goûté aux joies d’un podium depuis le Grand Prix de Turquie, début avril. Ce week-end, le -73kg tricolore, s’il bute sur Igor Wandtke, en bronze à Abou Dhabi, en demi-finale, prend sa revanche du premier tour du Grand Prix de Zagreb en battant par ippon le Moldave Sterpu, récent médaillé de bronze aux championnats du monde juniors, pour monter sur le podium. Un résultat qui lui permet de grimper à la vingt-quatrième place mondiale. En -60kg, Luka Mkheize finit lui en revanche au pied de la boîte. Battu par l’Anglais McKenzie en demi-finale, il s’incline aussi face à l’Ukrainien vingt-quatrième mondial et cinquième aux Grand Prix de Géorgie et de Turquie au printemps. Désormais vingt-neuvième à la ranking list (Walide Khyar est quinzième), le judoka de Sucy Judo connaît un trou d’air qui dure.
Dernier engagé, Alpha Djalo, en -81kg, est le seul Français à ne pas se classer à Perth. Opposé à l’Azerbaïdjanais Fatiyev, cinquième des derniers championnats du monde juniors, il perd aux pénalités, trois shidos à deux, après un combat de 6’20. Une mauvaise affaire comptable pour le Français qui pointe à la trente-troisième place mais est, à ce jour, qualifié pour Tokyo via le quota continental.

La Russie devant, l’Europe comme chez elle

Avec trois titres (victoires d’Irina Dolgova en -48kg, de Natalia Kuziutina en -52kg et de Mikhail Igolnikov en -90kg, dont c’était la première compétition individuelle depuis le Grand Chelem d’Allemagne en février), la Russie finit donc première nation, devant trois pays à deux titres : l’Allemagne avec les premières places de Sven Heinle en +100kg et de Miriam Butkereit en -70kg (pour un total de huit médailles), la Turquie avec Bilal Ciloglu en -73kg (qui poursuit sur sa lancée du Grand Chelem d’Abou Dhabi et rentre désormais dans le top 10 mondial) et Kayra Sayit (ex Ketty Mathé) en +78kg, l’Espagne enfin avec Francisco Garrigos en -60kg et Alberto Gaitero Martin en -66kg.
Les quatre derniers titres sont aussi pour des combattants du Vieux Continent : Katja Kazer la Slovène, encore juniors, en -57kg, Kathrin Unterwurzacher l’Autrichienne en -63kg, la Portugaise Patricia Sampaio, médaillée de bronze des championnats du monde juniors et cinquième à Tokyo en 2019 en -78kg, et le Grec Alexandre Ntanatsidis en -81kg.