L’analyse de cette compétition
Alors que le circuit mondial avait rendez-vous ce week-end à Tbilissi, en Géorgie, les judokas japonais se retrouvaient eux à Fukuoka pour les championnats du Japon. Un événement important, puisqu’outre le fait de proposer à voir les huit meilleurs combattants nippons de chaque catégorie, ce dernier était décisif pour quelques catégories dont la hiérarchie n’était pas claire en vue de Budapest et des championnats du monde.
Que retenir de ce week-end ? Que beaucoup de judokas dont le leadership était manifeste à regarder leurs performances internationales, ont confirmé ce statut face à leurs concurrents nationaux; qu’ Aaron Wolf (-100kg) est allé chercher son billet pour les championnats du monde avec une belle autorité alors qu’on attendait Haga ou le jeune Iida ; que le champion olympique des -90kg Mashu Baker s’est blessé sérieusement à l’épaule ; que les arbitres ont pris une décision rarissime en -57kg ; enfin, qu’il y a du spectacle avec des mouvements superbes avec une mention spéciale pour Ryuju Nagayama (-60kg) et Hifumi Abe (-66kg).
Féminines
-48kg : C’était l’une des catégories qui présentaient un enjeu fort puisque Ami Kondo et Funa Tonaki jouaient leur sélection ce dimanche, leurs performances à l’international étant extrêmement proches. Toutes les deux tête de série, elles se retrouvaient idéalement en finale pour une victoire synonyme de billet pour la capitale hongroise. Résultat ? Victoire en golden score de la médaillée de bronze à Rio sur un o-soto-gari. Elle garde sa place de titulaire.
-52kg : Natsumi Tsunoda, victorieuse à Tokyo et 2e à Paris partait avec une marge d’avance pour la sélection. Seule concurrente pouvant remettre en cause sa titularisation à Budapest ? Une cadette de 16 ans : Uta Abe, petite soeur d’Hifumi, 2e à Tokyo et vainqueur à Düsseldorf. Insolente de facilité technique et de maturité jusque là, elle buta ce week-end en demi-finale face à Ai Shishime (autre « soeur de… ») qui lui infligea un uchi-mata avant d’arracher la victoire face à Tsunoda, en finale, sur un très vif o-soto-gari en reprise de garde. Une très belle victoire pour l’honneur. Natsumi Tsunoda, qui perd de peu contre Majlinda Kelmendi à Paris sera du voyage en Hongrie.
-57kg : c’est une décision rare et forte sur le plan symbolique qu’ont pris les arbitres lors du combat de 1er tour entre Momo Tamaoki et Shoko Ono : en infligeant une troisième pénalité simultanée aux deux combattantes, les arbitres décidaient de les faire perdre toutes les deux ! Une initiative exceptionnelle qui s’explique par la volonté des arbitres de sanctionner une attitude trop attentiste des deux protagonistes et indigne de l’esprit qui doit animer un combat de judo, au Japon en particulier. Nae Udaka, championne du monde 2014 en Russie en profite pour filer directement en finale durant laquelle elle plante Haruka Funakubo, de quatorze ans sa cadette, sur son puissant o-soto-gari. Et Tsukasa Yoshida dans tout cela ? Elle perd en demi-finale contre H.Funakubo d’un shido au golden score. Pas de quoi remettre en question une place de titulaire pour les Monde qui lui était déjà promise après sa victoire à Tokyo et sa deuxième place à Paris.
-63kg : C’était l’une des catégories les plus indécises avec trois filles capables de décrocher une sélection en l’absence de la tituaire au Jeux Miku Tashiro : Miho Minei, Aimi Nouchi et Nami Nabekura. Au final, Minei ne participait finalement pas à la compétition et c’est Megumi Tsugane qui s’impose en finale au golden score, Nouchi prenant un troisième shido. Une place en finale qui n’a pas fait basculer la balanche pour Aimi Nouchi puisque, cette catégorie, clairement orpheline de Miku Tashiro, qui avait su faire un beau parcours aux Jeux (avec notamment une défaite d’un shido devant la Française Agbegnenou), n’enverra aucune représentante aux championnats du monde.
-70kg : Les jeux étaient déjà faits avec Chizuru Arai comme archi-favorite à la sélection, elle qui avait gagné consécutivement Paris et Düsseldorf avec beaucoup d’autorité. Elle retrouve en finale la petite nouvelle de la caté, Saki Niizoe, victorieuse à Tokyo, 20 ans seulement et première participation à une compétition internationale senior ! Arai trouve la solution au sol sur un yoko-shiho-gatame, s’impose comme la patronne dans l’Archipel et sera l’une des favorites pour le titre pour succéder à Gévrise Emane. Elle avait fini 5e à Astana en 2015.
-78kg : Duel annoncé entre Ruika Sato et Mami Umeki. La première s’est imposée à Tokyo et perd de manière contestable à Paris en finale contre Audrey Tcheumeo. La seconde, championne du monde 2015, s’impose à Düsseldorf contre Madeleine Malonga. Ce week-end Umeki s’est imposée en finale contre Shori Hamada, tombeuse de Sato en demi, au sol. Une victoire qui ne s’avèrera pas décisive pour Umeki puisque le comité de sélection a décidé d’emmener Sato et Umeki en Hongrie.
+78kg : C’était une compétition non décisive pour la sélection puisque celle-ci sera annoncée le 16 avril après le résultat de la Coupe de l’Impératrice. En attendant, Akira Sone, cadette et finaliste à Tokyo en décembre dernier, s’impose face à Nani Inamori au golden score sur l’un de ses très beaux tai-otoshi. Les deux favorites, Sarah Asahina, vainqueurs à Tokyo et Paris et Kanae Yamabe (Megumi Tachimoto était blessée) se font éliminées en demi-finales.
Masculins
-60kg : C’est sans doute le pion du week-end avec le o-soto-otoshi d’Hifumi Abe en finale des -66kg ! Ryuju Nagayama, vainqueur du Grand Chelem japonais en décembre face à son sempaï de Tokai, Naohisa Takato, vainqueur lui à Paris, récidive en administrant au petit lutin malin de Park 24 un ko-soto-gari à droite de toute beauté. Un combat très important a priori puisque le vainqueur était sûr de partir à Budapest. Au final, les deux -60kg seront de la partie. Mais Takato voit monter l’aura de son cadet…
-66kg : Hifumi Abe avait déjà, de manière officieuse, sa titularisation en poche après ses victoires impressionnantes à Tokyo et Paris. Mais le garçon aime visiblement bien faire les choses jusqu’au bout : trois combats, trois ippons dont un o-soto-otoshi « onoesque » en finale face à Kengo Takaichi. L’étudiant de 2e année à Nittai est décidément très (très) impressionnant.
-73kg : Situation analogue pour Soichi Hashimoto qui fera figure d’homme à battre en terres hongroises : vainqueur des Grands Chelems nippon et français, il reste invaincu cette saison après sa victoire ce week-end. En finale, il fait ce qu’il faut pour faire tomber une pénalité au golden score contre le jeune Arata Tatsukawa.
-81kg : Nagase est décidement sans rival national puisqu’il remporte un nouveau titre ici à Fukuoka après sa victoire contre Hayato Watanabe grâce à un uchi-mata compté waza-ari. Il sera lui aussi favori à sa propre succession à Budapest.
-90kg : une catégorie attendue avec impatience puisqu’était inscrit le champion olympique Mashu Baker dont c’était le retour à la compétition depuis Rio. Un retour très vite écourté puisque dès son premier combat contre Yusuke Kobayashi, il se blessait sérieusement à l’épaule. Diagnostic ? Epaule déboitée et déchirure musculaire. On saura dans les prochains jours si une opération est nécessaire.
En attendant c’est Soichiro Mukai qui finit premier en battant en finale Hirotaka Kato, un combattant qui a la particularité de bien réussir contre ses compatriotes (il a déjà remporté le Zen Nihon) avec ses « paluscheks », mais un peu moins contre les Européens. Une finale qui se règle aux pénalités. Avec la blessure de Baker, Inoue et son staff n’ont donné aucun nom pour Budapest, attendant d’en savoir plus sur la gravité de la blessure de Baker.
-100kg : S’il y avait un vainqueur à sortir du lot ce week-end, sans doute serait-ce Aaron Wolf. Blessé à Tokyo par le juji du Suédois Dvarby, finaliste à Düsseldorf, mais étranglé rapidement en finale par le Belge Nikiforov, le 4e année de Tokai sait être présent lorsqu’il le faut (il avait offert la victoire à son université dans le championnat par équipes en juin 2016). Pris en étau entre le prodige Kentaro Iida, 18 ans, vainqueur à Paris et 3e à Tokyo pour ses premières sorties internationales seniors, et Ryonosuke Haga, champion du monde en titre et 3e à Rio, Wolf a mis tout le monde d’accord : waza-ari sur uchi-mata contre Iida en demi-finale et une sérénité dans sa capacité à battre son sempai Haga en finale, qui finit par craquer en faisant une fausse attaque après plus de huit minutes de golden score. Wolf ? Un visage poupin pour un -100kg dur au mal. Attention à lui à Budapest… si il ne se fait pas manger par un « soliste ».
+100kg : Deuxième finale en quelques semaines entre Takeshi Ojitani, 1er à Tokyo et Paris et Kokoro Kageura, 2e à Tokyo et 1er à Düsseldorf.
Ojitani s’impose une nouvelle fois sur un koshi-jime plein d’opportunisme. Mais une victoire qui n’a rien de décisive puisque la sélection se jouera lors du Zen Nihon. Et Harasawa ? Battu, comme à Düsseldorf, sur un superbe uchi-mata sukashi de Kageura ! Le Zen Nihon promet d’être excitant.