Pavia en bronze, mais déçue, Larose et Blot cinquièmes, mais rassurants

Larose, une belle journée de reprise / Officiel IJF

Sans tournoi de Paris, et désormais avec un championnat d’Europe reporté en juin (voir par ailleurs), ce début d’année 2015 propulse le Grand Prix de Dusseldorf de plus en plus nettement en rendez-vous majeur du moment. Avec onze combattantes et quatorze combattants, dont bon nombre de numéro un, le Japon est le premier à y contribuer. On savait que le tournoi serait difficile à digérer pour nos meilleurs Français, surtout pour ceux qui en faisait leur tournoi de rentrée, la première journée confirment cette impression. 

Shishime, Kim, Ibrayev

En -60 kg, les deux rivaux nationaux étaient une nouvelle fois sur la même ligne, et c’est Vincent Limare, le jeune combattant de 22 ans licencié à Maisons-Alfort, qui s’en tire le mieux. Sofiane Milous, toujours 16e à la ranking list, est arrêté en effet à son troisième combat par l’Algérien Rebahi, 69e mondial. Une grosse déception pour le combattant d’Argenteuil qui venait au tour précédent de marquer ippon à l’azéri Safarov, 4e mondial. Vincent Limare passait quatre tours et pour lui aussi, qui est déjà 21e mondial, une belle performance à son actif contre le Mongol Kherlen Ganbold, 11e mondial. Mais il était stoppé dans son élan par l’intenable champion du monde junior 2014, l’Espagnol Franscico Garrigos, 20 ans, déjà 40e mondial, dont le rythme et le sens du combat font des merveilles, même si il est souvent à la lisière de la fausse attaque. Il surprenait le Français sur une « prise de l’ours » (ko-soto-gake en corps à corps) tout à fait légale. En repêchage, Vincent Limare subissait la loi d’un des hommes forts du jour, vainqueur inattendu du champion du monde 2013 le Japonais Takato en tableau, le Kazakh Rustam Ibrayev, futur 3e avec un ippon sur Papinashvili, le meilleur Géorgien de la catégorie. Une septième place, tout de même loin de la médaille de bronze que le Français avait atteint l’année dernière.

Si Takato, qui a décidément perdu de son invincibilité de 2013, n’allait pas au bout, c’était pour mieux laisser la place à Toru Shishime, double champion du monde junior 2009 et 2010. Finaliste au Grand Chelem de Tokyo en décembre, il avait été dominé par le terrible Coréen Kim Won Jin et Rustam Ibrayev était déjà en bronze. Cette fois c’est lui qui l’emporte en finale contre le Coréen. Shishime, Kim, Ibrayev… sans doute les meilleurs combattants d’Asie dans la catégorie en ce moment. Quant à Toru Shishime, il incarne de plus en plus une alternative crédible à Takato, surtout si il parvient à sortir de son attitude « je suis à 10% et ça me suffit pour battre tout le monde ».

Larose, une étape ?

En -66 kg, le vice champion de France Killian LeBlouch était arrêté à son deuxième combat par le champion du monde juniors 2013 coréen An Baul, aux pénalités, sans avoir démérité face à l’un des combattants les plus chauds du moment. De retour de sa convalescence, après sa blessure au genou des derniers championnats d’Europe, David Larose affichait d’entrée de bonnes dispositions, plus puissant que jamais, même si, assez logiquement, il manquait un peu de vitesse et de fluidité. Il battait deux adversaires à sa main avant de sortir d’une situation très compromise face au Russe Yakub Shamilov, 27e mondial. Pris dans une uchi-mata sukashi en début de combat, il parvenait à imposer son sumi-gaeshi à… 0 seconde de la fin ! Mais son grand rival Tumurkhuleg Davaadorj, le Mongol 4e mondial, était un adversaire encore plus fort et, pénalisé un peu injustement pour deux séquences moins pleines, il se faisait prendre sur la fin à son fameux nidan ko-soto-gake. Deux tours plus tôt, le Mongol avait montré aussi les limites de l’étincelant, mais très jeune (17 ans !) Hifumi Abe, vainqueur du tournoi de Tokyo, en difficulté face au kumi-kata à deux mains bien posé du Mongol. Repêché, Larose était un peu lent sur les déclenchements toniques du Coréen An Baul et lui concédait un yuko sur seoi-nage. Cinquième « seulement » du tournoi, le 13e mondial a néanmoins donné des signes de conviction et a montré qu’il avait retrouvé presque entièrement l’étendue de ses moyens. C’est encourageant. On attendait Hifumi Abe dans la ligne de ce qu’il avait produit à Tokyo (où il bat le triple champion du monde Ebinuma), mais c’est Kengo Takaichi, déjà 5e es derniers championnats du monde dans l’ombre d’Ebinuma, qui sort du chapeau et atteint ainsi le top 10 mondial. Le Japon a de la ressource chez les masculins en -66 kg.

Ma Yingnan fait peur

Chez les féminines, Laëtitia Payet s’imposait d’entrée à la Turque Sahin, 19e mondiale, mais devait déchanter ensuite face à l’Italienne Moscatt, 12e mondiale, qui la surprenait sur deux mouvements d’épaule. La petite guerrière de Villemomble est revenue avec beaucoup d’impact après sa maternité, mais doit encore se retrouver sa place au meilleur niveau européen pour prétendre être une deuxième sélectionnable dans la catégorie. Dans cette catégorie des -48 kg, la surprise venait du retour en fanfare de la Belge Van Snick, qui se permettait d’immobiliser la jeune championne du monde Ami Kondo, à qui rien ne semblait résister depuis quelques mois, sur un un sankaku-osae-komi d’anthologie. Dans un combat très intense, elle s’imposait en finale à la numéro un mondiale, la Mongole Munkhbat, laquelle venait de battre la Japonaise Asami en demi-finale. Un super retour, orchestré par l’entraîneur français Baptiste Leroy, avec lequel elle travaille sa technique depuis quelques mois au Cercle Tissier à Vincennes.
En -52 kg, Pénélope Bonna, perdait la bataille des pénalités à son second combat contre l’Allemande Kraeh, cinquième mondiale. Malgré la présence de deux anciennes de prestige, Misato Nakamura et Yuka Nishida, c’est la Chinoise Ma Yingnan, une combattante surpuissante au look androgyne et au style sans éclat qui emportait la médaille d’or, en battant les deux anciennes championnes du monde au passage. Même si elle n’est pas très spectaculaire et l’emporte souvent par pénalité, Ma Yingnan a gagné le week-end dernier le tournoi d’Autriche en battant la n°1 japonaise du moment Yuki Hashimoto à cette occasion. Un nouveau shérif dans la place ?

Silva, la plus forte

En -57 kg, en l’absence de Kaori Matsumoto, la championne olympique, et de Telma Monteiro, la n°1 mondiale, ou encore de l’Allemande Myriam Roper, la n°3 mondiale chez elle, on pouvait escompter qu’Automne Pavia, n°2 mondiale, soit sans rivale à Düsseldorf, sinon la championne du monde brésilienne Silva, qui faisait son retour… et peut-être aussi la tonique Laëtitia Blot, prétendante à modifier la hiérarchie nationale. Les deux Japonaises présentes, Anzu Yamamoto et Udaka Nae, étaient écartées rapidement, ce qui allégeait encore le programme de Pavia. Mais, frustration, la championne d’Europe française prenait une magnifique uchi-mata circulaire de la combattante de Taipei, Lien Chen-Ling, 27e mondiale, qui allait lui retirer l’opportunité d’affronter une Silva en pleine forme. Pas n’importe qui tout de même cette Taiwanaise plusieurs fois médaillée continentale et étudiante au Japon à Yamanashi Gakuin, l’université du père de Yuka Nishida. La Brésilienne arrivait en finale en ne rencontrant de difficultés que sur une adversaire : une très accrocheuse Laëtitia Blot, qui l’entraînait dans un combat de… huit minutes en demi-finale. Un peu de baume au coeur d’Automne, c’est elle qui emportait leur affrontement pour la médaille de bronze en parvenant à contrer une tonique tentative de mouvement d’épaule de Blot avec son o-soto-gari. Une belle prestation française, mais la finale se jouait entre le Brésil de Silva et la Mongolie de Dorjsuren (8e mondiale). Impressionnante, Rafaela Silva s’affirme à nouveau en favorite pour les rendez-vous mondiaux.