Si c’est à Nanterre qu’avait été inauguré la première coupe européenne juniors de France, c’est au Dojo Arena de Paris, ce week-end, que se tenait la deuxième édition. Un événement à la forte densité. Sans doute d’ailleurs ce qui s’est fait de mieux sur le circuit juniors depuis le début de saison. La raison ? La présence d’une délégation japonaise bien sûr, dont on sait combien elle se fait rare sur le Vieux Continent. La faute essentiellement à un budget qui a fondu comme neige au soleil depuis les JO de Tokyo. Des Japonais donc, mais pas que, puisque Canadiens et Brésiliens étaient également de la partie. Deux des meilleures nations du continent américain, la meilleure nation asiatique, la France et l’Azerbaidjan, habitués au podium européen. Un plateau à la qualité et à la densité remarquables. S’il manquait la Turquie, l’Italie, la Géorgie et le Kazakhstan pour en faire un mini championnat du monde, cette coupe d’Europe parisienne a tenu toutes ses promesses.
1) Cancan sauve la patrie
Double championne de France et désormais vainqueur de la coupe d’Europe de Paris. Judokate du Judo 83 Toulon de Stéphane Viale, cette +70kg longiligne et puissante sauve l’équipe de France d’un week-end sans titre. Le paradoxe, souligné par beaucoup dans les travées du Dojo de Paris ? L’unique titre tricolore sur cette épreuve juniors fut le fruit d’une cadette, combattante du pôle espoir de Nice, championne de France juniors début mars et cadette début avril. Droitière aux forts ashi-waza, elle n’a plus perdu un combat à l’international depuis la finale des championnats du monde cadets, fin août dernier. C’était contre une autre Française, Grace Esther Mienandi.
Samedi, Cancan met totalement sous l’étoignoir la Japonaise de la catégorie avec un o-uchi-gari d’entrée de jeu lors du quart de finale.
En finale, la Brésilienne Enya Pires ne lui résistera pas plus. Plus structurée, puissante et gainée que la saison dernière Cancan ne laisse pour l’instant rien en chemin. Une cadette qui domine chez les juniors ? Deux cadettes en fait, puisque l’autre Tricolore du podium, Léonie Minkada-Caquineau (DAN 79) est aussi de cette catégorie d’âge. Deux judokates qui auront fait ensemble la finale des championnats de France cadets et des coupes européennes cadets de Zagreb (Croatie) et Naples (Italie) cette année ! Un binôme ultra-précoce dont il faut noter que Minkada-Caquineau n’est que cadette deuxième année.
Chez les garçons, la même remarque peut être faite puisque le Tricolore le mieux classé en +100kg se nomme Mathéo Akiana-Mongo (Sainte Geneviève Sports Judo). Lui non plus pas encore juniors. Cette saison, il a remporté le tournoi juniors d’Aix-en-Provence, les championnats de France cadets et a terminé vice champion de France juniors. Alors, talents exceptionnels ? Ou creux de la vague générationnelle chez les juniors ?
Quoiqu’il en soit, la France n’est qu’à un titre à l’issue de cette compétition même si elle récolte dix-neuf médailles dont six d’argent : Fina Pamedie Katendi Nzuzi – FLAM 91 – en -48kg, Alya de Carvalho – AS Chelles Judo – en -52kg, Julie Falgon – Stade Clermontois Judo – en -63kg, Morgane Rubiano – Stade Bordelais Judo – en -78kg, Kelvin Ray – PSG Judo – en -60kg et Manoah Dumont – PSG Judo – en -66kg. Pour le bronze la moisson française est de douze médailles ! Un quatrième place au classement général à analyser au regard de la concurrence étrangère et particulière nipponne.
2) Le Japon létal
Car si la France n’est pas plus haute dans le classement, la raison principale tient en cinq lettres : Japon. Entre samedi et dimanche, le public a assisté à quatre finales franco-japonaises : en -48kg, -52kg, -78kg et -66kg. Au Au bout, quatre victoires nipponnes. Une équipe du Japon presque bis pour les féminines puisque les n°1 nipponnes étaient de l’équipe présente à Herstal (Belgique), fin janvier. Seules la -78kg, Yume Hirano, de l’université de Tsukuba, fut aussi du voyage dans la capitale française. Pas de Kano Miyaki, victorieuse du Grand Chelem de Tokyo en décembre par exemple. Une équipe dont les références étaient à trouver dans des compétitions nationales. Seule exception notable ? Rin Eguchi, troisième des championnats du monde juniors 2022 en -57kg. Que valait alors du coup cette équipe ? Et bien… sept titres, dix médailles, treize classés sur quinze engagés. Pas si mal quand on sait qu’outre Miyaki, chez les masculins le champion du monde juniors -73kg Ryuga Tanaka n’était pas du voyage.
Les noms à retenir ? La -52kg Rin Kamiya de l’université kyotoïte de Ryukoku. Particulièrement mise sous pression par Alya De Carvalho, championne de France en titre, elle place un incroyable uchi-mata sukashi à la Tricolore. Le -66kg et -73kg, Keita Hadano – troisième des championnats du Japon en avril – et Sota Goto – champion universitaire 2022 -, tous deux de l’université de Kokugakuin et juniors troisième année. Sereins, efficaces en ne-waza, ils auront montré beaucoup de sûreté durant leur journée. Mais le plus impressionnant fut sans doute le -81kg, Naoto Izawa. Un junior première année de l’université de Meiji, réputée pour sa dureté. Une fosse aux lions qui pourrait bien tenir avec ce première année au ne-waza incroyable une futur pépite du judo nippon. Sa finale contre l’Azerbaidjanais Omar Rajabli offrit de fantastiques séquences au sol.
3) Primo et Imranov font le show
L’une n’est déjà plus une inconnue. Kerem Primo, soeur cadette de Gefen, victorieuse en -63kg, n’a désormais plus le profil d’une inconnue. Championne d’Europe cadette et junior 2021, vice championne du monde juniors la même année en -57kg, cette junior première année (elle est de 2005), montée de catégorie depuis un an, l’Israélienne signe sa première victoire depuis les FOJE 2022. En finale, elle place un o-goshi de mammouth à Julie Falgon (Stade Clermontois Judo), meilleure Française de la catégorie.
Nizami Imranov aura également marqué la journée de samedi. Champion d’Europe et médaillé de bronze aux Monde cadets en 2022, ce -60kg azerbaidjanais, petit lutin explosif à la proprioception exceptionnelle, s’adjuge la victoire face à Kelvin Ray (PSG Judo) dans une finale de très haut niveau. Même âge et même trajectoire de performances (Ray est vice champion du monde et médaillé de bronze cadets l’année dernière) pour deux combattants dont on peut parier, sans trop de tromper, qu’ils joueront les premiers rôles à La Haye et à Coimbra lors des prochains championnats continentaux et mondiaux. Parfaite incarnation du judoka des pays de l’ex-URSS, mélange enthousiasmant de décontraction et d’explosivité aux services d’attaques féroces et totales, Imranov aura offert une superbe prestation, notamment dans une demi-finale de folie face au Français Youcef-Ayoub Belkahla.
Son pays, troisième au classement des nations, passe devant la France lors de la dernière finale, grâce à son +100kg, Kanan Nasibov.
C’est l’Allemagne qui termine seconde, avec trois titres : Samira Bock en -70kg (médaillée de bronze mondiale juniors 2022) et ses deux masculins Lasse Schriever (-90kg) et Kilian Kappelmeier (-100kg), vainqueurs dès la première séquence sur deux inspirations incroyables.