Elle se relevait surprise, les yeux fixes et interrogateurs vers les superviseurs. La raison ? Le waza-ari donné par l’arbitre central sur un mouvement peu orthodoxe de l’Israélienne Gefen Primo, lors de la finale des -52kg, à la mi-combat. Une technique qui n’appartenait indubitablement pas au gokyo, ressemblant au mieux à une forme de yoko-guruma mais avec un kumikata en forme de « bras/tête ». Une initiative surprenante et insolite qui faisait toutefois rouler Amandine Buchard sur la barre d’épaule pour un avantage que la vice championne olympique ne pourra pas rattraper. Après cinq défaites consécutives en autant de combats contre la championne française, l’aînée de la famille Primo, 23 ans seulement, médaillée mondiale 2021 et septième à Doha il y a un mois, s’offre son second Grand Chelem après Paris en 2021. Buchard termine en argent après une journée jusque-là parfaitement maîtrisée. Une défaite inquiétante ? Sans doute pas tant la médaillée mondiale a la capacité d’apprendre de ses adversaires, de s’adapter, de continuer à faire éovluer son judo. La preuve ? Un harai-goshi impressionnant placé à la Hongroise Reka Pupp, cinquième mondiale, en demi-finale. Une arme de plus dans sa palette, déjà observé lors des championnats de France par équipes à Laval.
Une journée doublement argentée pour la France puisque Romain Valadier-Picard avait ouvert le compteur tricolore lors de la finale des -60kg. Auteur en demi-finale d’un juji-gatame parfait et imparable face au Coréen Lee Harim, n°3 mondial et en bronze aux championnats du monde 2023, il débutait bien sa finale contre le lutin nippon Ryuju Nagayama. De passage en France il y a peu, cet éternel n°2 derrière son sempai de l’université de Tokai, Naohisa Takato est un des monstres de la catégorie avec deux médailles mondiales (2018 et 2019) et dix titres en Grand en Chelem ! Un judoka petit par la taille mais capable de coups de judo fulgurants dans toutes les directions qui laissait passer deux-trois séquences avant, en bout de manche, de lancer un uchi-mata droite sur place mais vif et sur lequel il se replaçait remarquablement pour un premier waza-ari. Quelques secondes plus tard, le Japonais plaçait un début de sumi-otoshi qui mettait à nouveau le vainqueur du Grand Prix d’Autriche sur la tranche. Du bel ouvrage.
Très bonne opération toutefois pour Valadier-Picard qui prend à nouveau 700 points avec cette médaille d’argent. Qui plus est valorisés à 100% au niveau de la ranking olympique, puisque ce Grand Chelem mongol a la spécifité d’être le premier tournoi dont les points compteront intégralement en vue de Paris 2024. Un premier point positif auquel il faut en ajouter un second : le fait que l’ACBB Boy retrouve à nouveau une efficacité redoutable en ne-waza (celle qu’il avait en cadets/juniors) et une capacité à se montrer plus patient dans ses prises d’initiative. Un travail de fond pour le médaillé mondial juniors 2022 qui paie. Avec la médaille d’argent de Cédric Revol la semaine dernière à Astana – et en comptant Luka Mkheidze -, la France va se retrouver avec trois judokas dans les quinze meilleurs mondiaux dans cette catégorie des -60kg d’ici lundi.
Un vendredi marqué également par une victoire nipponne en -48kg grâce à Hikari Yoshioka, 20 ans, championne du monde juniors 2022, championne du monde cadette 2019 et victorieuse pour sa première sortie internationale sur le circuit; une victoire mongole devant une foule en délire pour le pieu des -66kg Bashkuu Yondonperenlei face au Tadjik Obid Dzhebov, vainqueur chez lui à Duchanbé il y a trois semaines; une victoire canadienne enfin en -57kg avec la démonstration de Christa Deguchi, championne du monde en titre. Toujours aussi efficace et relâchée, l’ancienne étudiante de l’université Yamanashi Gakuin bat en finale sa compatriote Jessica Klimkait, trois pénalités à rien dans un combat qu’elle aura outrageusement dominé. Une manière de remettre encore plus les pendules à l »heure après sa première défaite contre sa meilleure ennemie lors de la finale du Grand Chelem de Tel Aviv mi-février.
La meilleure -57kg canadienne – et sans doute du circuit -, c’est bien Deguchi.