Romane Dicko a fait une nouvelle fois parler son impact à Kazan.
Crédit photo : Gabriela Sabau (FIJ)

Veni, Vidi, Vici. Telle est peut-être la formule qui image le mieux la journée de Romane Dicko. Finalement privée d’un combat possible contre la championne du monde 2019, la Japonaise Akira Sone, inscrite puis finalement retirée par le staff nippon, la double champion d’Europe française des +78kg a traversé sa compétition de manière imperturbable, solide et efficace. Quatre combats, trois ippon et une victoire en finale par forfait face à la Biélorusse Maryna Slutskaya.
Des rencontres lors desquelles la puissance et l’impact de la sociétaire du PSG Judo ont une nouvelle fois eu l’air d’effrayer toutes ses adversaires, qui cherchèrent désespérément le contre sur l’arrière. Évidemment en vain. Symbole de cette intimidation de plus en plus explicite à chaque sortie de la Tricolore, le combat contre la Portoricaine Melissa Mojica en quart de finale. Un vendredi en toute sérénité pour Dicko qui engrange sa sixième victoire consécutive depuis janvier 2020 (Grand Prix de Tel-Aviv, Grand Chelem de Paris, championnats d’Europe et Grand Chelem de Tel-Aviv 2021). Actuellement huitième à la ranking-list olympique, la +78kg va se retrouver ce soir, provisoirement, quatrième et donc tête de série pour Tokyo. Un rang qui pourrait bien bouger puisque certaines de ses concurrentes directes participeront sans doute aux championnats du monde. Un fait à noter mais qui reste secondaire par rapport à l’incroyable dynamique positive connue par Dicko depuis maintenant plus d’un an. Sone est plus que jamais prévenue.

Clerget, une blessure mais des repères pris

Après Benjamin Axus, ce fut au tour d’Axel Clerget de se blesser lors de ce Grand Chelem. En recherche de sensations et de repères ici à Kazan, après son importance commotion subie en janvier au Masters, le double médaillé mondial des -90kg se fait mal à l’adducteur de la jambe gauche sur une tentative de yoko-tomoe nage lors du combat pour le bronze face au Géorgien, monté de catégorie, Luka Maisuradze (médaillé mondial 2019 en -81kg). Une blessure qu’on espère bénigne, après une journée de tout de même cinq combats pour le judoka du club de Sucy. Si il est nettement battu par l’Allemand Eduard Trippel en quart de finale sur un sode-tsuri-komi-goshi à gauche, Clerget sait que ce Grand Chelem et même les championnats du monde au regard de son ambition ne doivent être pris, pour lui, que pour ce qu’ils sont, des compétitions de préparation. Le -90kg français a prouvé depuis le début de l’olympiade qu’il savait être exact lors des grands rendez-vous.

Et sinon ? L’autre -90kg tricolore, Alexis Mathieu subit la loi de l’Israélien Li Kochman (23e mondial, cinquième ce vendredi et 3e à Antalya) dès le premier tour alors que Laura Fuseau, championne d’Europe des -23 ans 2020 en +78kg subit le superbe harai-goshi de la Russe Daria Vladimirova. Une défaite frustrante car la Française avait rapidement mené dans ce combat qu’elle semblait avoir en main.

 

Murao et Bashaev, quel régal ! 

Irrésistible Sanshiro Murao qui ne laisse aucune chance à l’Allemand Trippel en finale des -90kg.
Crédit photo : Gabriela Sabau (FIJ)

Cette ultime journée aura été, sans doute de loin, la plus spectaculaire et excitante sur le plan du judo. Rendons grâce au Japonais Sanshiro Murao, n°3 japonais des -90kg, qui en aura été, avec Tamerlan Bashaev, le principal animateur. Six combats, six victoires, six ippon dont un magnifique de-ashi-barai, un très inspiré o-soto-gari contre Mikhail Igolnikov, un ashi-guruma insolent d’aisance face à Maisuradze et un uchi-mata imparable lors de sa finale vis-à-vis de l’Allemand Trippel.
Gaucher à la posture parfaitement gainée, un système d’attaque basé sur des ashi-waza précis, extrêmement dangereux dès qu’il a la manche adverse à lui, Murao, un « halfu » (sa mère est américaine) sera à surveiller dans un mois à Budapest. Aujourd’hui il aura particulièrement régalé.

 

Tamerlan Bashaev, encore impérial ce vendredi.
Crédit photo : Gabriela Sabau (FIJ)

C’était plus attendu pour Tamerlan Bashaev. Champion d’Europe 2020 (face à son compatriote Inal Tasoev), 2e à Tel-Aviv, vainqueur à Antalya, le n°6 mondial s’impose comme toujours avec brio chez les +100kg. Magnifique judoka avec des mouvements d’épaule des deux côtés, Bashaev (126kg) bat les deux Brésiliens, David Moura et Rafael Silva (173kg), en demi puis en finale. Avec cette victoire, le champion du monde juniors 2015 passe quatrième à la ranking-list mondial, juste derrière Tasoev, champion d’Europe 2021 il y a peu. Un duel fratricide entre deux incroyables combattants qui ne lâchent absolument rien ! Avec les championnats du monde comme juge de paix ?

En -100kg, une surprise avec la victoire du Hollandais Simeon Catharina, auteur d’une journée époustouflante puisqu’il sort l’Israélien Peter Paltchik, n°2 mondial, le solide Géorgien Onise Saneblidze et enfin le n°1 russe du jour, le vice-champion d’Europe 2020 et n°10 mondial, Arman Adamian sur un ko-soto-gake de mammouth. Une victoire de prestige pour celui qui pourrait être le n°1 néerlandais pour Paris (c’est Michael Korrel qui ira à Tokyo). Côté russe, l’ours Adamian monte sur son sixième podium consécutif mais sans jamais s’être imposé. Qui de lui ou de Niyaz Ilyasov (3e aux Europe 2021 et vice-champion du monde 2019) défendra les couleurs de l’équipe d’Ezio Gamba au Budokan cet été ?
Enfin en -78kg, l’Allemande Anna-Maria Wagner fait forte impression puisqu’elle remporte son second Grand Chelem consécutif après Tel-Aviv. En finale, la n°4 mondiale de 24 ans place un o-uchi-gari ken-ken parfaitement suivi en immobilisation pour s’imposer à la Batave Natascha Ausma. Wagner qui reste sur deux défaites face à Madeleine Malonga, mais la dernière remonte aux championnats du monde 2018 à Bakou. Elles pourraient d’ailleurs se retrouver dans le même tableau, si rien ne bougeait après Budapest, aux JO.

La Russie, maîtresse chez elle 

Avec un titre pour chacun des trois pays en tête du classement des nations (Russie, Japon, France), le classement final reste donc identique à celui d’hier. La Russie termine en tête avec quinze médailles dont quatre titres. À noter les dix médailles masculines (sur vingt-huit engagés), dont deux titres pour la jeune garde (Chopanov et Makhmadbekov). L’équipe russe a déjà de quoi voir venir pour Paris 2024 et aura pleinement profité de l’accueil de ce Grand Chelem pour en faire une échéance extrêmement utile pour Tokyo et ses nouvelles pépites.
Le Japon se classe second avec trois titres pour quatre engagés (Funa Tonaki, Uta Abe et donc Sanshiro Murao) ! Un rendement habituel, classique dirait-on, mais dont la banalité ne doit pas cacher le caractère forcément bluffant. La France, elle, prend la troisième place avec les titres de Hélène Receveaux et Romane Dicko et l’argent d’Astride Gneto.