Trois médailles d’or françaises baptisent le nouveau Bercy

Après la première journée, on pouvait craindre un tournoi de Paris aussi en chantier, aussi poussiéreux que les coursives d’un néo-Bercy loin d’être achevé. Mais la salle gris anthracite est belle, le public présent en nombre méritait mieux que la pauvre journée de samedi. Ceux de dimanche avaient tiré le bon numéro. Face au même niveau d’adversité qu’hier – un peu moindre qu’habituellement pour un tournoi de Paris, mais avec son quota de leaders plus ou moins en forme – les Français du dimanche ont refusé d’abdiquer et on fait de ce jour dominical un beau moment de Bercy, malgré l’absence de Teddy Riner.

Une bonne journée française

Presque tous les Français aujourd’hui se sont montrés à leur avantage, y compris certains qu’on ne retrouve pas sur le podium. Le -81 kg Alain Schmitt (7e), transparent à Astana, a parfois fait passer le frisson avec ses belles séquences, et a montré qu’il n’avait pas lâché et qu’il était sur le chemin du retour à son meilleur niveau. La médaillée mondiale 2015 en -70 kg Fanny-Estelle Posvite affichait dans les premiers tours la même autorité qu’à Astana, une autorité qui va l’installer durablement dans les dix, voire les cinq meilleures de la ranking list mondiale. Elle perd une demi-finale d’un shido peu justifié contre la Japonaise Haruka Tachimoto, future médaille d’or à ce tournoi. En -90 kg, Axel Clerget qui rongeait son frein depuis un bon moment au niveau des Open Continentaux, se bat toute la journée avec les honneurs et le public de Bercy derrière lui, accumulant les performances et battant notamment l’Allemand Odenthal, 16e mondial, avant d’échouer de très peu pour le bronze, pour un soupçon de manque de lucidité et de confiance. Une journée qui le replace néanmoins dans une dynamique très positive pour la suite.

Maret, toujours là !

Pour les garçons, si la victoire de Cyrille Maret est remarquable – avec notamment un étranglement plein de décision contre le grand Tchèque Krpalek en quelques secondes – elle ne surprend pas car il était tenant du titre, et avait d’ailleurs battu le même Krpalek à cette occasion. Elle fait plaisir en revanche, et elle rassure après sa déconvenue d’Astana. Le Dijonnais a repris du poil de la bête, il est toujours l’un des tout meilleurs -100 kg du monde. Rio, c’est bientôt.

Iddir, format supérieur

Elle fait plaisir, elle rassure, elle est bluffante aussi. Non pas la victoire, malheureusement, mais la belle finale obtenue par Alexandre Iddir, qui a eu le bon goût de confirmer qu’il avait passé un cap depuis quelques mois, et notamment depuis son combat gagné, puis perdu dans les derniers secondes à Astana contre le champion d’Europe et médaillé mondial géorgien Varlam Liparteliani. Il a enfin monté le volume de son judo exceptionnel, s’appuyant sur des seoi-nage bas très rapides et des mouvements de hanche spectaculaires. C’est justement le Géorgien qu’il retrouvait dans une finale qui allait s’avérer extraordinaire. Battu finalement au golden score, Iddir aura encore pris une leçon de la part de ce grand adversaire, non pas de judo, car le Français est en passe de s’affirmer sur lui à ce niveau, mais de force mentale, de lucidité, de détermination pour gagner un combat aussi difficile. Le champion, c’est encore Liparteliani, mais Iddir l’a poussé au bout de lui-même. Une finale du niveau d’un podium mondial.

« Tchoumi », grande prêtresse de Bercy

Même constat chez les filles avec une Audrey Tcheumeo à nouveau grande prêtresse d’un Bercy à ses pieds, assommant ses opposantes les unes après les autres et repoussant en finale aux pénalités une Japonaise, Ruyka Sato, pourtant bien décidée à lui mettre la pression. Ce n’est pas une surprise de la voir là… sauf qu’elle n’avait plus gagné depuis 2011 et qu’il faisait bon la retrouver dans toute sa gloire, l’année des Jeux. Dans la même catégorie des -78 kg, Madeleine Malonga, 3e, affiche une réjouissante régularité après sa finale de l’année dernière. Le gros coup du jour est pour la machine à seoi Margaux Pinot, perdue à Lisbonne la semaine dernière dans une malheureuse Coupe Européenne, et bronzée ce week-end dans l’un des plus prestigieux tournois du monde. Hésitante au début, elle a fini par placer son mouvement d’épaule à presque tout le monde, dont la Japonaise Nun Ira, la Polonaise Klys, 15e mondiale… et finalement à sa rivale Fanny Estelle Posvite, qui menait aux pénalités, pour le bronze. Remplaçante de Marie-Eve Gahié blessée, Margaux Pinot n’a pas perdu sa journée. Et la France ne manque décidément pas d’atouts dans cette catégorie des -70 kg, celle de la championne du monde Gévrise Emane.

Andeol bat la championne du monde !

La plus impressionnante peut-être, c’est Emilie Andeol, qui se permet de battre rien de moins que la championne du monde en titre, la Chinoise Yu, sur un maître ippon ! La petite lourde de Champigny n’en finit pas d’étonner, n’en finit pas de progresser. Et si elle venait de se donner un statut d’outsider crédible, pour la première fois, pour l’or des Jeux ?

Harasawa, le lourd à suivre

A trois médailles d’or pour quatre finales, le TIVP 2015 n’entre pas dans les annales, mais c’est déjà une médaille d’or de plus qu’en 2012 et 2014, sans Riner et sans Agbegnenou. Bien tout de même !
Le Japon domine la France d’une médaille d’or, en faisant notamment briller son nouvel atout en +100 kg, l’homme qui monte en ligne droite de nulle part, Hisayoshi Harasawa, un garçon de 24 ans qui ne perd plus depuis qu’il a gagné le Zen-Nihon cette année devant Ryu Shichinohe, le rival habituel de Riner du côté du Japon. Il fait forte impression ici, avec notamment deux ippons monumentaux sur uchi-mata en demi et en finale. À suivre.