L’hibernation loin des tapis devrait prendre fin pour la « Bête »

© L’Esprit du Judo / Kaori Matsumoto tout sourire après son titre olympique décroché à Londres.

La Japonaise Kaori Matsumoto, disparue des écrans radars depuis les Jeux olympiques de Londres, où elle avait remporté l’or en moins de 57kg, a refait surface, dans un documentaire « Human to Hero » de la chaîne d’informations américaine CNN. Elle y aborde son mode de vie, très instinctif, ainsi que sa relation avec le judo, qu’elle se voit bien continuer encore quelques années au plus haut niveau, avec comme objectif majeur de défendre son titre aux Jeux olympiques de Rio en 2016.

Combattante atypique, Kaori Matsumoto restera à jamais comme la seule championne olympique nippone de l’édition 2012, mais aussi la première à être couronnée dans la catégorie des moins de 57kg. En dépoussiérant son sport. « Je pense qu’elle a écrit une nouvelle page dans l’histoire du judo mondial, évoque Harumi Nakahashi son entraîneur. Elle n’est pas formatée, c’est une jeune fille, mais avec le cœur d’un jeune garçon. C’est Peter Pan. Pour moi ça explique la pureté de son judo, qui a brisé des codes. Elle permet aux enfants judokas de ne plus être systématiquement soumis aux schémas stéréotypés du haut niveau. » Mais qu’a-t-elle donc de si différent ? L’intéressée s’explique sans détour. « Il y a quantité de combattantes japonaises qui développent un meilleur judo que moi. Je les domine seulement par mon esprit. Je marche à la sensation, je suis instinctive, voire sauvage. C’est pour cela que mon judo paraît plus brouillon que celui des autres. Comme les gens qui ouvrent leurs parapluies quand il commence à pleuvoir, je réagis simplement au déroulement d’une situation donnée. » Un côté instinctif qu’elle tient de son enfance dans la préfecture d’Ishikawa, bordée par les Alpes japonaises, « au milieu de la nature, des insectes et des forêts. » Et entourée d’une famille qui lui a toujours assuré un  soutien indéfectible. « Au début, j’étais performante car je n’aimais vraiment pas perdre, explique la championne du monde 2010. Maintenant que je suis suivie par mes parents sur chaque compétition, mes ambitions personnelles sont devenues des enjeux collectifs, ce qui m’a rendu encore plus forte. » Son or olympique est donc celui de sa famille, mais aussi de ses partenaires d’équipe, Tomoko Fukumi (-48kg) et Misato Nakamura (-52kg), qui l’avaient précédé sans succès sur les tatamis de l’ExCel Arena, et bien sûr celui du Japon, intimement lié à son sport traditionnel. « Le judo, qui débute et se conclut par un salut, est l’esprit japonais lui-même, analyse Matsumoto. Le judo en quête du but ultime, le ippon, c’est le mode de vie à la Japonaise. Quand vous gagnez par ippon, l’adversaire est convaincu de la perfection de votre mouvement et reconnaît sa défaite. Et, au-delà, il prend conscience de ses faiblesses. »

Matsumoto en a sa part, une alimentation guère équilibrée et des blessures récurrentes (À tout juste 26 ans, Matsumoto s’est déjà fracturée le nez, des doigts, le coude, l’avant-bras et le genou !). Mais là encore, elle en puise une force. « Par mes blessures, j’ai compris que mon style de combat, nu et cru, ne suffisait plus. Il me manquait cet état d’esprit relâché, que je dois adjoindre à mon tempérament de feu. » Un amalgame à trouver pour pouvoir défendre son titre en 2016 au Brésil. La perspective des JO 2020 à la maison ? peu probable, Matsumoto laissant volontiers la place aux nouvelles générations. « Beaucoup de jeunes n’ont pas de rêves au Japon. Enfant, je n’en avais pas non plus. C’est à travers des évènements comme les Jeux que l’on peut partager nos rêves avec eux. Et plus il y aura de partage, plus les enfants seront en mesure d’avoir leurs propres rêves. Je me pose souvent la question suivante : que se passerait-il si chaque personne sur Terre souriait au même moment ? » La réponse en cas de doublé à Rio.

Le documentaire consacré à Matsumoto

Retrouvez l’interview dans son intégralité en cliquant ici.