
Crédit photo : Tamara Kulumbegashvili/IJF
Très belle dernière journée de judo à Astana. Et ils y furent pour quelque chose. Les deux Japonais du jour, Dota Arai en -100kg et Hyuga Ôta en +100kg, titulaires à Budapest dans un mois, ont en effet été les deux principaux animateurs de ce troisième jour avec leur uchi-mata, qui transpercèrent toutes les défenses adverses, de manière magnifique. Ajoutez-y un soupçon d’amitié — l’accolade entre Arai et Eich en finale —, une pincée de show avec Arai, junior troisième année, il est encore étudiant à Tokai, qui séduit le jeune public avec ses célébrations et vous aviez alors de quoi ravir tout le monde. Deux victoires convaincantes pour les masculins nippons : Arai contre le Suisse Eich, cinquième des JO et qui vient de remettre la machine en route après un début d’olympiade plutôt poussif, et Ôta contre le Kazakhstanais Yerassyl Kazhybayev, 30 ans, non classé aux championnats d’Asie fin avril, mais troisième à Bakou. On remarquera tout de même que leur catégorie respective ne comptait aucun judoka dans le top 10 et donc devant eux à la rankingt-list : Arai est actuellement huitième au classement mondial quand Ôta est onzième. Une bonne manière toutefois d’engranger de la confiance et de se mettre sur une dynamique positive avant le grand rendez-vous hongrois.
La France avait hier deux médailles d’or et une de bronze chez les féminines. Elle a pu ajouter une médaille d’argent grâce à Julia Tolofua (ESBM Judo). Si la vice-championne du monde 2023 des +78kg est battue en finale par la très jeune Coréenne Hyeonji Lee, 18 ans, championne du monde juniors 2024 et finaliste à Paris début février contre Léa Fontaine (elle avait dû abandonner sur blessure), La Blanc-Mesniloise bat de belle manière la Chinoise Xinran Niu, seulement 20 ans, et qui arrive sur le circuit de manière météorique : septième au Grand Chelem de Tokyo en décembre dernier, en or à Tashkent fin février, vice-championne d’Asie il y a deux semaines ! Un nom à retenir.
Un de-ashi-barai à gauche de la Française mettait l’Asiatique sur la tranche et ouvrait ainsi les portes de la finale à Tolofua qui subissait un yuko de Lee sur une action plutôt lente en o-soto-gari où la Française tombait sur les fesses, mais dont le dos n’était clairement pas à quatre-vingt-dix degrés. Plus intéressant à retenir, la +78kg enchaîne une troisième médaille consécutive après le bronze obtenu à Tashkent et à Tbilissi. Suffisant pour être du voyage à Budapest dans un mois ?
Une catégorie des +78kg qui voyait la championne olympique brésilienne Beatriz Souza participer à sa première compétition du circuit depuis son sacre parisien. Elle termine à la cinquième place. De son côté, Ruri Takahashi, titulaire japonaise à Budapest, finit en bronze, battue en demi-finale aux shidos par la Coréenne.
Les autres engagés tricolores du jour finissent au pied du podium, comme la -78kg Liz N’Gelebeya (Stade Bordelais Judo), battue pour le bronze par Beatriz Freitas, vice-championne du monde juniors 2022 et qui signe là sa première médaille sur le circuit mondial. Un sode-guruma imparable pour la judoka carioca. En repêchages, la Bordelaise avait dominé l’autre brésilienne, Karol Gimenes, sur un ko-soto-gake à gauche. Une catégorie où le Brésil cherche une successeur à l’immense championne Mayra Aguiar. Un début d’olympiade, cela sert aussi à ça. Septième place pour Kaila Issoufi (Sainte-Geneviève Sports Judo) dans cette catégorie.
Reste que ce ne sont ni les Français ni les Japonais qui finissent à la première place du classement, mais les Russes. La finale entre Mikhail Igolnikov et Egor Malkin assurait à l’équipe de Vitali Makarov d’être en tête. Et un retour au premier plan, en attendant de le voir sur un championnat international, pour l’ancien enfant prodige du judo russe. Mikhail Igolnikov, 28 ans, n° 1 de la catégorie depuis des années dans son pays, était sur une dynamique très négative depuis plusieurs mois. Un espoir dont on pouvait craindre qu’il soit définitivement déçu pour celui qui fut champion du monde cadets en 2011, vice-champion du monde juniors en 2014, double champion d’Europe 2018 et 2020… mais jamais médaillé mondial ou olympique. Hier, ce gaucher à remontrer toute l’étendue de ses qualités physiques et techniques, avec un uchi-mata très personnel et un o-uchi-gari très efficace : il marque douze valeurs en cinq rencontres ! Un nombre ahurissant, mais cohérent quand on connaît le judoka : très porté sur l’attaque, la gestion tactique n’est pas vraiment dans son ADN (ce qui lui joua des tours dans le passé).
En finale, il contre deux fois son jeune concurrent national, Egor Malkin, vice-champion du monde juniors 2024, et le pique au sol.
Il faudra observer si cette victoire tient du feu de paille ou de la résurrection. Mais, si la deuxième hypothèse l’emporte, alors l’équipe russe aura de quoi vraiment faire peur entre les Timur Arbuzov, Matvey Kanikovskiy et Inal Tasoev. Vivement Budapest.