Limare et Le Blouch font le doublé, Chaine et Gomes-Tavares consacrés.

Alors que les derniers spectateurs quittent le Grand Dôme de Villebon, cette 1ère journée des championnats de France laisse, à chaud, une impression de déjà-vu.

Car le constat est là : les quatre catégories du jour ont consacré des judokas ayant déjà connu les joies d’un titre national ou celle (parfois réitérée à de multiples reprises) d’un podium à ces mêmes championnats de France.
Retour sur un samedi avare de surprises, généreux en ippon et en combats excitants dans une enceinte affichant quasi-complet. En attendant demain et un Dôme qu’on imagine déjà débordant de frénésie et d’excitation avec la présence de Teddy Riner.

Limare et la manière

Dans une catégorie où la hiérarchie n’est toujours pas clairement établie, les meilleurs combattants se retrouvaient ce samedi pour une explication et une clarification, alors que la France se cherche toujours un titulaire indiscutable à l’international.

Lancé par la réussite de sa saison dernière, Vincent Limare voulait, à l’orée de cette journée, affirmer un peu plus son ambition d’être le n°1 tricolore. Pari réussi.
Étincelant l’année dernière à Marseille, c’est sa solidité qu’on retiendra ce soir.

Bien dans son judo toute la journée, le sociétaire de Maisons-Alfort a parfaitement su jouer de ses atouts : des ippon-seoi d’une efficacité diabolique, avec lequels il terrassera Sofiane Milous, dans une demi-finale à sens unique. Et un yoko-guruma qui lui sauvera la mise deux fois contre Adrien Raymond, dans la plus belle finale de la journée : pas une seule pénalité ne tombera, des attaques en trombes et surtout un ashi-guruma supersonique du judoka de Sucy. Une action folle mais presque trop parfaite. Comptabilisé ippon au départ, les arbitres à la table profitaient à plein de la vidéo pour voir le tour et demi qu’avait fait Limare pour retomber sur la tranche et n’accordaient, fort justement, qu’un yuko à A. Raymond. Insuffisant pour enrayer la mécanique bien huilée du judoka de Maisons-Alfort qui désirait ardemment ce doublé et dominait son adversaire deux yuko à un.

Sur le podium, un habitué, en la personne de Sylvain Goulet (Sucy Judo) et un petit nouveau à ce niveau mais qui n’a rien d’une surprise : dominateur chez les juniors, bluffant lors du championnat 1ère division par équipe, Walide Khyar a les dents longues et les moyens de ses ambitions avec un judo très mobile, agressif et friand du corps-à-corps. A cela, une ambition plus développée en ne-waza. L’influence de Baptiste Leroy, depuis peu dans l’encadrement technique de FLAM 91, est déjà là. Encore junior pour la saison à venir. En place de 3ème, il immobilise un Sofiane Milous visiblement un cran au-dessous aujourd’hui. Mais gare à sa réaction d’orgueil dans les mois qui viennent, lui qui sait souvent se montrer lors des compétitions internationales.

Le Blouch, la force de l’abnégation

Le recul aide souvent à prendre conscience de réelles performances sportives qui peuvent parfois paraître être le fait d’un jour « avec ».

A cet égard, Killian Le Blouch fait figure d’exemple idéal. L’air de rien, le judoka du FLAM91 aligne son 3ème podium national consécutif, le 4ème avec sa place de 3ème en 2010 et son 2ème titre, après celui glané à Montpellier en 2012. Le tout en ayant été opéré au mois d’avril de l’épaule.

Dans un style basé sur une condition physique étourdissante, et presque écoeurante pour ses adversaires, un kumi-kata d’acier et des attaques fugaces mais fulgurantes.

Une marque de fabrique personnelle qui viendra à bout de l’un des hommes forts de la journée, dans cette catégorie des -66kg, en la personne de Hugo Fonghetti. Surmotivé, très tranchant dès ses 1ers tours avec son judo léché et varié, le sociétaire de Sucy Judo tombera sur un os avec Le Blouch ! Une vraie « baston » qui verra le judoka breton placer un ippon-seoi-nage à droite foudroyant à 20 secondes de la fin du combat.

En finale, le champion de France 2012 annihilera son adversaire du jour, Julien Ottaviani. Sur le rythme, mais aussi sur les attaques. Et alors qu’on assistait à une bataille pas franchement intéressante de kumi-kata, le judoka du FLAM 91 se dérobait pour un ippon-seoi compté waza-ari. On se dirigeait donc vers une victoire sur ce score quand sur une action en bordure, Le Blouch tournait la hanche à une vitesse démente pour gratifier le public d’un fort joli ashi-guruma.
Pour accompagner ces deux-là sur le podium, Hugo Fonghetti, qui a franchit indubitablement un cap depuis quelques mois. Ce dernier fera plier un des autres animateurs de cette catégorie, Kevin Azéma. Un judoka racé, monté récemment en -66kg et qui fera sensation en satellisant Dragin au 2nd tour. Un jeune loup à suivre dans les mois à suivre.

Quant à ce même Dragin, il remontera les repêchages dans son style, fait d’explosivité, de mouvements de judo pur mais aussi d’une certaine difficulté à avoir parfois le couteau entre les dents.

Guillaume Chaine a vaincu le signe indien

Et si le changement de club était à l’origine de cette victoire tant attendue par G.Chaine, déjà 4 fois sur le podium des championnats de France ? Ce serait peut-être aller bien vite en besogne, mais le visage présenté aujourd’hui par ce combattant au physique taillé dans la roche a été d’une rare solidité. L’espèce de petit plus qui vous fait gagner les combats aux couteaux. Cela a été notamment le cas en demi-finale, où il refroidit le dynamiteur de la journée dans cette catégorie, le cadet la lignée Clerget, Arthur.
Médaille d’argent surprise l’année dernière à Marseille, le judoka de Marnaval donnait l’impression d’être à nouveau dans un grand jour avec, of course, son fameux travail en ne-waza. Une tradition familiale.

Une palette technique qui n’empêchera pas le nouveau judoka du FLAM 91 de le battre donc, sur un modèle de sumi-gaeshi. En finale, G.Chaine retrouvait un habitué de ces championnats, en la personne de Jordan Amoros, champion de France 2007 !
Auteur d’un parcours brillant et solide, avec ses mouvements d’épaule très dynamiques, le sociétaire du RSC Montreuil allait même sérieusement l’inquiéter, en lui plaçant un ippon-seoi-nage supersonique compté yuko. Un avantage qu’il allait quelque part gâcher, en faisant des fausses attaques qui faisaient grimper très vite les pénalités. Pour autant, il avait le mérité d’imposer le rythme du combat, d’être sur l’initiative de manière quasi permanente. G. Chaine se contentant, tel un félin, d’attendre le moindre moment de faiblesse de son adversaire pour le contrer. Il n’en aura finalement pas l’occasion, Jordan Amoros se faisant pénaliser une quatrième fois pour une fausse attaque qui envoyait Guillaume Chaine – enfin ! – sur la plus haute marche du podium.

Un constat d’autant plus décevant que la journée nous semblait marquée par une réelle cohérence l’arbitrage sur les tatamis, contrairement à ce que l’on voit trop, malheureusement, au niveau international.

Sur la troisième marche de ce dernier, Jonathan Allardon, judoka tout en longueur, sachant fort bien profiter de ses longs segments et Ludovic Cavallera, placé depuis quelques années et qui trouve là une récompense de la progression observée.

Dimitri Gomes-Tavares, 1ère !

Dans une catégorie où les deux meilleurs français, L.Piétri et A.Schmitt, semblent solidement arnachés à leur place de titulaire en équipe nationale, ce championnat 2014 allait-il confirmer la volonté de Guillaume Riou, déjà double champion de France, de réduire l’écart, pour l’instant conséquent, entre nos deux médaillés mondiaux et lui ?

A la surprise d’un peu tout le monde, la réponse allait tomber très rapidement. Ça serait non !

En effet, Riou tombait sur un os dès le 2ème tour, en la personne de Joris Guillot-Rosselot. Qui perdait ensuite contre le bon technicien de SGS, Quentin Joubert.

Qui alors pour venir remporter le titre d’une catégorie où la France peut se targuer d’avoir deux des meilleurs combattants mondiaux ?
En finale, deux hypothèses se présentaient : la jeunesse, avec D. Gomes-Tavares, médaillé d’argent en 2012 ? Ou l’expérience, avec Antoine Jeannin, double champion de France en 2010 ?

A première vue, les pronostics étaient en faveur du judoka orléanais, auteur d’une journée très copieuse avec l’élimination au 1er tour du tout récent médaillé de bronze aux championnats du monde Junior, Pape N’Diaye. Un combat gagné à l’expérience au golden score.

Ensuite, il éliminait Quentin Joubert, très bien revenu depuis quelques mois, avant de planter Benoit Collin (JC Chilly) d’un amour de ko-uchi-gari.

Mais il faut croire que nous ne sommes pas de bons pronostiqueurs, puisque Gomes-Tavares, profitant d’un léger déséquilibre arrière de Jeannin, sautait sur l’occasion en engageant un corps-à-corps qui envoyait l’Orléanais sur le dos.

Ippon. Le judoka de Sartrouville pouvait étreindre, Laurent Meseguer, son coach. Le titre est à lui. A ses côtés sur la boite, un habitué du lieu, en la personne de Mehdi Tobrouki, déjà 3ème l’année dernière…tout comme Julian Kermarrec.

On vous le disait, de surprise, il n’y en eut presque point.