Ne tergiversons pas. Cette journée de mercredi fut d’un intérêt que l’on n’aurait sans aucun doute pas soupçonné ce matin, alors que la deuxième journée de ces Europe cadets s’ouvrait. Du très beau judo que l’on doit essentiellement aux vainqueurs du jour. Une génération de talents sans doute un peu courte pour Paris, mais qu’on pourrait bien retrouver du côté de Los Angeles en 2028.
Alors, il y a bien sûr le bronze de Maylis Rozan, tête de série n°1 ce matin, qui fait grimper le compteur français (merci les filles !). Il y a aussi la première consécration dans un championnat international d’un diamant venu d’Israël, un « engin » encore adolescent mais qui n’est pas sans rappeler Uta Abe. Rien que ça. Son nom ? Kerem Primo.
Il y a encore la Russie, rentrée au petit trot dans sa compétition hier (un titre tout de même !) qui prend le leadership au tableau des médailles grâce à ces deux masculins du jour. Supérieurs, mais dans deux styles différents, le -66kg et -73kg de l’équipe d’Arsen Galstyan sont eux aussi des noms à retenir.
Il y a enfin les francophones, la Suissesse Binta N’Diaye, victorieuse en -52kg ou la Luxembourgeoise Kenza Cossu (argent en -63kg). Une médaille historique pour le judo du Grand Duché.

Elle était la seule médaillée en tournoi des six engagés français du jour. Il y a donc une vraie logique à la voir sur le podium aujourd’hui. Franchement, elle avait le potentiel pour être championne d’Europe. Mais voilà, elle est tombée sur un monstre en demi-finale. Si Primo gagne les Europe voire les Monde juniors, alors on pourra réévaluer encore plus à la hausse la performance de Maylis qui a été ultra forte ce mercredi », explique Lilian Barreyre, entraîneur national.
Bien rentrée dans sa compétition, l’élève d’Emilie Harnichard au sein du club de Gradignan (et athlète au pôle France de Bordeaux avec Cédric Claverie) n’aura jamais été inquiétée durant ces trois combats victorieux du jour. Pour le bronze, la Tricolore contre la Hongroise Szasz au bout d’à peine quarante secondes avant de l’immobiliser pour la troisième place et la seconde médaille tricolore après le titre de Pauline Cuq hier. Aujourd’hui, Rozan était sans doute la plus forte de toutes les -57kg derrière Primo. Dense physiquement, intéressante en ne-waza, la Française ne pourra pourtant absolument rien face à l’écrasante supériorité de l’Israélienne. Elle est le rayon de soleil de cette journée pour une équipe de France maussade : ses cinq autres engagés sont éliminés en tableau ou en repêchage, avec un seul combat gagné en tout pour tout. Sur les cinq éliminations, quatre sont dues à une défaite en ne-waza (trois sankaku, un juji gatame).
Certes, il reste encore une journée mais pour l’instant le bilan masculin fait grise mine : six engagés pour deux combats remportés. Gageons que demain et ses quatre chances de médailles relèveront la statistique. La France reste quatrième nation mais talonnée par l’Allemagne et la Suisse.

Kerem Primo tout sourire après sa finale expéditive.
Crédit photo : Kostadin Antonov (UEJ)

-Elle fut la star du jour. Petite sœur de la -52kg médaillée européenne et mondiale 2021 (et encore juniors) Gefen Primo, Kerem a tout simplement époustouflé son monde. Née en 2005 – elle n’est donc que cadette deuxième année -, cette droitière au style calqué sur celui d’Uta Abe (sode-tsuri-komi-goshi debout et uchi-mata) avec le même terrible impact, a littéralement joué avec toutes ses adversaires, n’ayant pas eu besoin de plus de deux séquences pour s’imposer lors de ses cinq confrontations ! Une précocité effrayante, beaucoup trop forte pour tout le monde, déjà remarqué à l’Open seniors de Croatie cette année où il y a peu en Roumanie, où elle s’impose chez les juniors en battant au passage Faiza Mokdar (dans un combat serré vis-à-vis duquel la Française a déjà très envie de remettre les pendules à l’heure). Kerem Primo. Retenez bien ce nom.

-le Russe Timur Aburzov, dans la droite ligne des frères Naguchev, su optimiser chaque passage au sol pour placer un dégagement de jambe maîtrisé sur le bout des doigts. Pas forcément étincelant en nage-waza, le judoka d’Arsen Galstyan, vainqueur des -66kg, trouva ainsi la solution en demi et en finale grâce à son kata-gatame.
En -73kg, Rolan Kunizhev fut beaucoup plus aérien avec son harai-goshi (parfois fini en makikomi) qui fit sauter toutes les défenses adversaires. Deux titres russes pour les deux catégories masculines du jour, avec deux finales russo-serbes !
Si on ajoute l’argent de Mukhina en -57kg, la Russie en est déjà à six médailles (trois titres et trois argent) et prend la tête du classement.
Alors qu’elle avait perdu son leadership en 2019, au profit de l’Italie, le pays des Tsars souhait visiblement remettre les choses à l’endroit.

-La réussite des francophones. Binta N’Diaye, Suissesse victorieuse en -52kg s’offre logiquement un titre qu’elle doit en grande partie à son ne-waza. Une belle réussite pour le judo helvète puisqu’il s’agit du premier titre international dans cette catégorie d’âge.
L’autre belle histoire, peut-être plus belle encore, est celle de Kenza Cossu. Cette cadette troisième année offre la première médaille en championnat international de son histoire au judo luxembourgeois en terminant deuxième en -63kg !
Tout sourire, le DTN du Grand Duché, Wolfgang Amoussou raconte «que nous tablions sur un bon classement pour Kenza (cinquième ou septième). Mais pas une médaille ! Avec la nouvelle équipe mise en place en janvier, on avait tout de suite vu qu’elle avait un joli potentiel. Mais là ! Elle a un gros coup de hanche, est une vraie battante et tient bien sur ses jambes. Franchement, je ne sais pas si cette médaille arrive presque trop tôt mais on la prend avec plaisir ! » Elle est nettement battue en finale par une Allemande, Nele Noack, tombeuse de la Française du jour, très propre et fluide avec un morote-seoi-nage aussi classique qu’efficace. Du bel ouvrage.
Mais l’information de cette catégorie c’est bien la médaille de Cossu pour un pays qui accueillera d’ici quelques semaines les championnats d’Europe juniors.