Malgré le procédé qui consiste à ne pas faire apparaître dans le classement des nations les Russes et les Biélorusses, tout en acceptant leur présence sur les tapis, la dernière journée a, comme à Doha, démontré l’impact du judo russe sur les catégories les plus hautes. Les hommes d’Ezio Gamba ont « cartonné » aujourd’hui, à commencer par le champion du monde en deux temps, le poids lourds Inal Tasoev.
Mathieu, c’est le bronze !
Mais les Français ? C’était le bon jour pour le -90kg Alexis Mathieu, d’abord brillant sur son seoi-nage debout contre un Biélorusse, avant de montrer des fragilités défensives contre un Kirghize au tour suivant. Tout aurait pu s’arrêter là, mais son repêchage allait lui permettre de montrer un nouvel état d’esprit, audacieux et direct sur ses points forts : il marquait ippon au très fort Hongrois Toth, médaillé mondial et olympique en 2021, sur un joli ura-nage en sortie d’attaque adverse. En place de trois, l’expérimenté Tadjik Ustopiryon prenait la même attaque que le Français sent vraiment bien. Des phases finales « de référence » pour Alexis Mathieu, qui ajoute une médaille en Grand Chelem à son palmarès après sa finale des Masters en décembre.
Ce n’est pas le cas en revanche pour l’espoir Kenny Liveze en -100kg, pris d’entrée sur une faute dont il devra tirer des enseignements : tentant de lancer son adversaire polonais Kuczera sur son habituel sumi-gaeshi, il se faisait clouer au sol sans trop de réaction.
Chez les filles ? Seule à défendre les chances françaises, la jeune -78kg Liz Ngelebeya passait facilement à travers sa première adversaire, une « INA » (Individual Neutral Athletes), la Biélorusse Darya Kantsavaya, mais tombait ensuite sur rien de moins que la toute récente championne du monde israélienne Inbar Lanir, qui jouait sur ses rotations rapides et dangereuses pour la contrer dans les premières secondes. Une championne du monde un peu inattendue, victorieuse en avril de la favorite Audrey Tcheumeo, qui semble vouloir montrer qu’elle n’était pas la combattante d’un jour puisqu’elle emporte ce Grand Chelem mongol, en empêchant d’ailleurs un nouveau « grand chelem » féminin pour les Japonaises, qui emportent les catégories -70kg avec la solide gauchère Shiho Tanaka et +78kg avec la médaillée mondiale 2021 et 2022 Wakaba Tomita. Elle bat en effet en finale… une Japonaise, Mami Umeki, championne du monde en 2015. Il faut définitivement compter avec cette jeune Israélienne de vingt-trois ans à la progression linéaire depuis sa médaille européenne juniors en 2020. Elle n’est pas championne du monde par hasard.
Tasoev en fer de lance, Igolnikov à la relance
La Russie donc. Déjà médaillée les jours précédents chez les féminines, elle ajoutait la médaille de bronze de la rugueuse -70kg Taimazova ce dimanche, démontrant une dynamique collective à suivre. Chez les garçons, ce n’est pas une dynamique, mais une marée qui monte. Venus sur la pointe des pieds à Doha et repartis finalement avec deux titres, celui d’Adamian en -100kg et de Tasoev en +100kg, les Russes montent en puissance en sortant de nouveaux combattants intéressants comme Ayub Khazaliev (-60kg) et Danil Lavrentev (-73kg), mais en s’appuyant aussi sur les anciens comme Alan Khubetsov (-81kg), tous médaillés les jours précédents. Pour le dernier jour, Tasoev montrait à tout le monde que sa médaille mondiale sur tapis vert n’avait pas fragilisé sa grosse confiance et il s’impose avec facilité dans une catégorie qu’il est en train de mettre au pas – le Français Riner mis à part. Son tani-otoshi remarquable d’anticipation enchaîné en juji-gatame sur le Coréen double médaillé mondial Kim Minjung était intimidant.
Le -90kg Mikhail Igolnikov, cinquième seulement des Jeux après avoir été parmi les grands favoris, revient en force avec une victoire dans son style de gaucher tout en fixation. C’est finalement le champion du monde -100kg Arman Adamian qui était le seul à ne pas parvenir à l’or aujourd’hui avec une défaite inattendue en demi-finale d’un catégorie disputée ce dimanche. Il se faisait sortir sur un arraché d’un nouveau pieu mongol qui arrive à maturité à vingt-trois ans, Gonchigsuren Batkhuyag, lequel sortait vainqueur de débats où on pensait voir le beau retour du champion olympique japonais Aaron Wolf… mais il était surpris lui aussi en demi par l’éternel guerrier géorgien Varlam Liparteliani, qui allait lui-même échouer en finale, comme il en a malheureusement un peu trop l’habitude.
Israël, la Russie, la Mongolie dominent ici à Oulanbaatar… loin derrière tout de même les sept médailles d’or japonaises. De cela aussi, on en a l’habitude.