Cette année 2020 va être marquée par le renouvellement des instances dirigeantes du judo français à tous les échelons : départemental, régional et fédéral. Une série d’élections qui se tiendront entre la fin du mois d’août et le 24 novembre, jour de la désignation du président de la FFJudo. Une période fondamentale puisque les nouveaux élus oeuvreront jusqu’en 2024  – année des Jeux olympiques et paralympiques de Paris – et alors que le judo français connaît une baisse conséquente du nombre de licences depuis plusieurs années.

Dans ce cadre, L’Esprit du Judo a décidé d’interroger tous les candidats à la présidence des dix-huit ligues de France. Notre objectif ? Vous présenter ces élus, à la fois territoriaux et nationaux (depuis 2016, ils sont membres de droit du conseil d’administration de la FFJudo au sein du conseil national), parfois méconnus des judokas de club. Une série d’entretiens où tous ces candidats s’exprimeront sous la forme d’items : présentation de la ligue, spécificités territoriales, bilan de l’olympiade écoulée, projets pour les quatre ans à venir et en particulier initiatives pour freiner la baisse de licenciés.
Après Jérôme Liot (Bretagne) et Jean-Louis Duvergey (Grand Est), Jean-Philippe Parent (Hauts-de-France), Bernard Laterrière, actuel président de la ligue de La Réunion et seul candidat en lice répond à nos questions.

Bernard Laterrière, président de la ligue de la Réunion. Photo : DR

Présentation de la ligue
« La ligue compte 33 clubs, dont 4 de kendo, pour 3200 licenciés, avec plus d’une soixantaine de professeurs en activité, un pôle espoirs, un cadre technique et une coordinatrice ETR à mi-temps. »

Spécificités territoriales
« Je pense qu’il y en a deux principales : d’abord, savoir que nous sommes un territoire avec un taux de chômage très important avec les difficultés sociales et économiques qui vont avec. Ainsi, beaucoup de nos licenciés ont le droit à des aides pour payer leur cotisation. Ensuite, nous faisons face à une difficulté de structures (beaucoup de clubs pratiquent dans des maisons de quartier, des écoles avec en très grande majorité des tapis de moins de 100m2) et à celle de trouver des professeurs pour les zones isolées. Concrètement, nous disposons d’un dojo régional avec trois surfaces de 8x8m. Mais nous ne pouvons pas y organiser de regroupement régional car, pour accéder au dojo, il faut emprunter une route totalement saturée aux heures de pointe. »

Bilan de l’olympiade
« 
Au niveau du nombre de licenciés, nous sommes clairement en baisse. Au début de l’olympiade, nous étions 3600 licenciés. Deux éléments expliquent, à mon sens, cette baisse conséquente : la crise du Covid-19 tout d’abord. Lorsque nous avons fait un pointage en février, tous les clubs étaient en hausse à N-1. Ainsi espérions-nous retrouver le niveau du début d’olympiade. Mais le confinement a stoppé net cette bonne dynamique.
Ensuite, nous avons connu la désaffiliation d’un des plus gros clubs de l’île. Ce dernier a en effet choisi de licencier la majorité de ses pratiquants à la FSGT. Plus globalement, il faut savoir que lorsque j’ai pris la présidence de la ligue en 2016, la situation était la suivante : une mise sous tutelle financière avait été décidée avec une dette de 200 000€, le pôle espoirs n’avait pas de vraie dynamique, il y avait un déficit logistique sur le judo sportif, etc.
Avec mon équipe, nous avons essayé de travailler sur tous ces chantiers : mes premières actions ont donc été de retrouver la confiance des partenaires institutionnels afin de redonner de la crédibilité à la ligue vis-à-vis, en particulier, de la collectivité locale. La dette a été considérablement réduite même si il reste encore à faire. Nous avons informatisé toutes les compétitions, ce qui a permis de réduire le temps d’attente des compétiteurs et des parents et fiabiliser les calendriers des compétitions, ce qui n’était pas forcément le cas avant. En 2017, après le départ de Philippe Taurines, Justin Guillemin a été recruté comme responsable du pôle espoirs. Nous avons ainsi investi pour que les vingt-huit judokas de cette structure puissent à nouveau participer à des stages, des tournois labellisés, etc.
Une génération très intéressante puisque l’équipe masculine a fini 3e en 2017 à la coupe de France minimes par département, Salomé Mulot 3e aux CF juniors 2020 en -44kg ou Marcus Lopeze vice champion de France cadets 2019 en -73kg. Et puis il y a bien sûr Léa Fontaine (championne d’Europe, 5e aux championnats du monde juniors, vice championne de France seniors 1re division 2019 en +78kg), désormais en métropole mais passé par le pôle espoirs. »

Projet pour la nouvelle olympiade / Solutions pour freiner la baisse de licenciés
« Dans l’immédiat, je croise les doigts pour que le judo puisse reprendre à partir de 13 septembre, car il faut savoir que, depuis le lundi 24 août, les sports collectifs et de contact sont à nouveau interdits du fait de la situation épidémiologique sur l’île. Ensuite, je compte aller voir les mairies de deux grandes villes, Saint-Pierre et Saint-Louis, mais aussi des petits villages dans les montagnes, pour essayer de trouver des salles et des créneaux pour notre discipline. En parallèle, nous allons à partir de cette année proposer une formation BPJEPS. On ne pouvait pas l’ouvrir avant par manque de candidats. Mais en mettant en place une formation « sports de combat », nous avons pu atteindre le seuil minimum, avec d’ores et déjà six ou sept candidats judokas. C’est une avancée indispensable car nous avons besoin de professeurs pour développer le judo dans l’île. Nous allons également mettre l’accent sur les pratiques associées telles que le ju-jitsu fighting, le ne-waza et le taïso. Au niveau sportif, nous avons trouvé un accord avec l’Union Africaine de Judo (celle-ci prendra en charge les billets d’avion) pour permettre à certains de nos meilleurs juniors/seniors de participer à un open africain (Yaoundé, au Cameroun, les 7-8 novembre prochains). Au niveau du dojo régional, nous allons demander une extension de 30m2 pour pouvoir mettre en place un coin musculation. »