Une cinquième médaille d’or en Grand Prix pour la n°1 mondiale

La première journée de ce Grand Prix marocain peut se résumer en deux points essentiels: nos combattants masculins en -60kg et en -66kg ratent le coche de ce Grand Prix relativement accessible, tandis qu’Amandine Buchard — désormais Buchard-Nordmeyer depuis son mariage — consolide sa première place mondiale avec une nouvelle médaille d’or.

En -48kg Mélanie Clément avait la satisfaction d’atteindre le podium et de prendre donc un quota significatif de points, restant dans le « top20 », mais se confrontant toujours à la même problématique. Cinquième aux Grands Chelems de Tokyo et de Paris, troisième ici à Marrakech – sa quatrième médaille en Grand Prix — elle affiche une régularité réelle, mais juste un peu en deça de ses espoirs, et qui s’appuie surtout sa solidité défensive et son courage. Souvent sur l’attaque en effet, elle est difficile à faire tomber où à mettre sur le recul. Mais elle manque aussi de l’efficacité en attaque qui pourrait lui faire passer un cap décisif. C’était encore le cas cette fois avec quatre combats, trois d’entre eux se concluant sur un hansokumake. À ce jeu, elle perd sur l’expérience de la Roumaine Monica Ungureanu, 28e mondiale, mais s’offre la 12e mondiale pour le bronze, l’Israélienne Shira Rishony, qu’elle bat pour la seconde fois de suite. Somme toute, une bonne journée.
Victorieuse à Prague en début de semaine lors de l’Open de Tchéquie, Blandine Pont avait l’opportunité de briller au Maroc. Elle sortait au troisième tour, battue par l’Espagnole Julia Figueroa, 17e mondiale et future médaille d’or, mais non sans avoir sorti au golden score et sur un joli o-soto-gari l’Israélienne Noa Minsker, 18e. La encore, mission accomplie pour une combattante de vingt ans qui pointe pour l’instant à la lisière du « Top 100 ».

Buchard en majesté

En -52kg, avait été engagé notre championne de France des trois catégories d’âge et championne d’Europe junior 2018, engagée dans son troisième tournoi majeur de suite, Faiza Mokdar, dix-sept ans. Après un premier combat contre une jeune Hongkongaise, et deux uchi-mata qui révélaient son potentiel, elle était victime d’un renversement au sol très bien mené par l’Espagnole Ana Perez Box, 17e mondiale. Frustrant, mais la victoire eut été un exploit. Il viendra sans doute, sans avoir à précipiter les choses.
Amandine Buchard-Nordmeyer est encore bien jeune avec ses vingt-trois ans (c’est déjà six ans de plus que la précoce Faiza Mokdar), mais des années qui ont compté double. C’est avec l’autorité d’une numéro un qu’elle est passée à travers ce tournoi, pour atteindre… sa quatorzième médaille consécutive en tournoi Open, Grand Prix ou Grand Chelem, et sa cinquième médaille d’or en Grand Prix. Outre l’excellente affaire sur le plan comptable, elle retiendra sûrement de ce tournoi qu’elle a dominé la néo-Azerbaidjanaise et ancienne Roumaine Alexandra-Larissa Florian, de retour aux affaires après son changement de nationalité, et surtout la jeune Israélienne Gefen Primo, qui lui en avait fait un peu voir au dernier championnat du monde. Quatre combats, un waza-ari et trois ippons, la Française n’a pas baissé de pied. Elle est numéro un mondiale à la ranking list et ne reconnaît plus qu’une seule adversaire encore au-dessus d’elle, une hydre en fait, avec trois visages japonais : celui de Ai Shishime, qui l’a battue au Grand Prix de Zagreb en 2018, celui de Natsumi Tsunoda, qui reste sur deux victoires au Grand Chelem d’Osaka et au Master 2018 alors que la Française l’avait battue par deux fois auparavant, et enfin, le plus terrible malgré son air aimable, celui de la petite sœur Abe, Uta, qui l’a dominée quatre fois depuis 2017. Faire sauter le verrou japonais, c’est désormais le projet d’Amandine, pour 2019 et 2020.

Pavia fait l’erreur, mais…

Tandis que Gaëtane Deberdt, pour sa première expérience en Grand Prix, sortait sa première adversaire, la Portugaise Wilsa Gomes, c’était Automne Pavia la Tricolore que tout le monde observait en -57kg. Elle finit cinquième de ce Grand Prix, ratant une nouvelle fois ce podium important depuis sa finale de l’Open d’Ecosse en octobre. La démonstration était cependant très encourageante. Elle a montré qu’elle tenait déjà beaucoup mieux l’impact physiquement et qu’elle avait toujours le sens du judo et du combat. Sa vieille rivale, la Hongroise Edvig Karakas, toujours 15e mondiale, se rappellera bien longtemps de ce magnifique « barai » que lui inflige ici Automne. Et malgré une défaite assez rude (uchi-mata en cercle conclu par un beau travail au sol) contre l’excellente technicienne taiwanaise Cheng-Ling Lien (13e) — qui sera outsider sur le championnat du monde — elle avait l’exploit en main après avoir marqué waza-ari à l’Israélienne Tinma Nelson-Levy, 10e mondiale dans le combat pour le bronze. Mais elle gérait très mal les quinze dernières secondes et se faisait coller sur ko-soto-gake. Un ajustement tactique et mental qui est dans ses moyens. Automne Pavia n’a pas dit son dernier mot dans la guerre des -57kg.

Quatre Français loin du podium

Second point à retenir, donc, l’échec des meilleurs légers français à Marrakech. On attendait avec intérêt le retour de Romaric Bouda sur la piste aux étoiles en -60kg. Si il avait été battu à Paris en février dernier, il restait sur une jolie médaille de bronze au Grand Prix des Pays-Bas en novembre. Il fallait confirmer. Malheureusement, c’est un jeune Belge de vingt-et-un ans, Jorre Verstraeten, vainqueur à Tel-Aviv, qui allait dominer le Français et faire le parcours qu’on espérait pour lui en se donnant le droit de disputer la médaille de bronze, finalement perdue devant le Bulgare Gerchev. Dommage car Bouda avait commencé par marquer waza-ari avant de se faire sanctionner par sumi-gaeshi en contre sur une attaque trop faible.

Khyar à la recherche du bon ajustement

Walide Khyar était là pour mettre fin à la mauvaise série qui dure depuis son titre européen de 2016, et malgré sa victoire au Grand Prix de Tunisie en janvier 2018, l’a fait glisser à la 41e place mondiale. Performances trop rares entre les retours de blessure et les tirages de plus en plus délicats à gérer. C’était le cas cette fois encore avec un deuxième tour contre l’Ouzbek Sharaffudin Lutfillaev, le félin le plus acrobatique de la catégorie, qui en compte pourtant un certain nombre, 10e mondial. Désormais plus gestionnaire que lors de son époustouflant titre européen, Walide Khyar se montrait au niveau de ce défi agréable à suivre, jusqu’au débordement final, un grand mouvement de hanche tout en rotation, en accélération et en amplitude, qui le surprenait dans les dernières secondes. Un ajustement à trouver, et désormais rapidement. Mais on sent que c’est tout à fait dans ses moyens.
En -66kg, Daniel Jean avait en mémoire son excellent mois de mars 2018, avec deux podiums successifs en Grand Prix. Mais cette fois, il était arrêté d’entrée par l’Egyptien Ahmed Abelrahman, 35e mondial grâce à quatre podiums successifs au championnat d’Afrique, victoire en 2015 et 2016, podium en 2017 et 2018. Kevin Azema passait un Argentin avant d’échouer devant l’Italien Matteo Piras, deuxième de l’Open romain et 79e mondial, sur un makikomi basique au golden score. La catégorie n’a pour l’instant pas de représentant dans le « Top 30 » (et même 40, Kilian Le Blouch pointe à la 43e place) en France.