Les combattants du Pays du Soleil Levant remportent 13 titres sur 16 possibles

À la manière du film « Un jour sans fin » avec l’excellent Bill Murray, condamné à revivre quasi indéfiniment la même journée « de la marmotte », le tournoi juniors d’Aix-en-Provence voit les judokas nippons venir affronter, en fin d’année civile et sur les terres de Paul Cézanne, les meilleurs juniors français. Avec, au final, toujours le même clap de fin : une quasi hégémonie sans partage des titres en jeu, le tout avec la manière. Japon oblige.

2e « gros » tournoi de la saison juniors, Aix-en-Provence est considéré souvent à juste titre comme un excellent révélateur des forces en présence françaises de cette catégorie d’âge. Une habitude pas tout à fait respectée ce samedi puisque certains des meilleurs juniors français étaient en stage au Japon. Pour autant, le niveau était là, avec des délégations suisse, algérienne, belge, canadienne, italienne et… japonaise. Traditionnellement, le Pays du Soleil-Levant envoie dans la cité aixoise ses champions nationaux « high school » (lycée). Une épreuve internationale pour ces jeunes pépites japonaises qui, pour certaines ayant foulé les tatamis provençaux dans les années précédentes, sont dorénavant dans le gotha du judo mondial. Un seul exemple ? La nouvelle star des -48kg, Ami Kondo, triple championne du monde 2014 (seniors individuels, juniors individuels et par équipes), vainqueur ici il y a un an.

Quid alors de cette édition 2014 ? 13 médailles d’or sur 14 possibles, le Japon n’ayant pas de représentant en -44kg et -55kg. Bref, une domination écrasante, insolente et donc récurrente. Seul Baptiste Pierre (AC Boulogne-Billancourt), troisième aux France juniors 2014 en -81kg, réussira à éviter le grand chelem nippon. Une juste récompense pour un judoka à la technique juste, efficace, aux seoi affutés, tout comme son ne-waza. Un domaine grâce auquel les Japonais ont, par ailleurs, éteint tout espoir chez leurs adversaires, y compris, voire même surtout, en finale.

Le ne-waza, arme fatale

En effet, quand on analyse à froid les victoires japonaises du jour, la diabolique efficacité nippone à s’imposer grâce au ne-waza, frappe et laisse presque songeur. Chez les filles par exemple, la -52kg, N. Kuroki (Taisei), la -57kg, M. Tanigawa (Fujieda Junshin), la -63kg, S. Sato (Nittai) et la +78kg, M. Inoue (Shukutoku) s’imposent sur immobilisation, soit après un travail au sol bien construit, certaines s’appropriant même le retournement dont s’est fait une spécialité H. Akimoto, le récent vainqueur du Grand Chelem de Tokyo 2014 en -73kg, soit suite à une liaison debout-sol parfaitement maitrisée. Chez les garçons, J. Toba (-73kg, Matsunoto Daiichi), Y. Shirakawa (-90kg, Fukui High School) et S. Kawada (-100kg, Taisei) gagnent aussi grâce au ne-waza.

Soit au total, sept victoires sur les treize de la journée. Une proportion assez rare.

Une autre preuve que le ne-waza était à l’honneur ? La seule victoire française (en présence d’un Japonais dans le tableau) est à mettre au crédit de Baptiste Pierre (ACBB) qui bat le -81kg nippon (T. Amano, Sakuragaoka) avec un superbe travail en sankaku-jime.
Baptiste Pierre ? Un judoka qu’on avait remarqué aux championnats de France juniors lyonnais 2014. Une jolie médaille de bronze autour du cou et un judo qui laissait augurer, avec le passage en seniors des N’Diaye et Khalatian, d’un statut désormais de favori pour le titre national juniors en 2015.
Ce samedi n’a fait que confirmer cette intuition : droit, des mouvements d’épaule qui font souvent mouche, solides sur ses jambes et ne négligeant pas le sol, il n’aura jamais vraiment été mise en danger ici à Aix. Y compris en finale, pendant laquelle le Japonais ne pourra absolument rien faire pour empêcher de voir, enfin, un Français sur une plus haute marche du podium qu’un représentant du Pays du Soleil-Levant.

What else ?

La seule autre victoire tricolore du jour est à mettre au crédit de Shirine Boukli (Aramon Judo Club Gardois) en -44kg, qui bat Marine Gilly (Entente Rochelaunis -Charron), lors d’un combat qui s’est joué aux pénalités, car en -55kg, c’est un Italien, Andrea Carlino, qui s’impose fort joliment contre le champion de France en titre de la catégorie, Luka Mkheidze (Judo Perrey Guerrier). Géorgien de nationalité, ce jeune judoka qui attend d’ici peu d’obtenir la nationalité française, champion dans son pays natal à 12 ans, confirme les excellentes dispositions démontrées à Lyon fin mars. Chez les autres favoris français du jour, les Japonais ont fait figure de bête noire :
en -48kg, la solide Marseillaise Blandine Pont (championne de France et vice-championne d’Europe cadettes 2014), malgré un judo intéressant et efficace ne pourra rien face à un superbe et supersonique o-goshi à gauche de la japonaise M. Tsunemi (Saitama Sakae). En -70kg, E. Ike (Higashi Osaka Uni. Keiai High School) ipponisait Juliette Tartaing (OM Judo) sur un tani-otoshi aussi surprenant que dynamique. En -78kg, Valentine Marchand (2e aux France Juniors 2014, FCJB) ne peut que constater les dégâts après le o-soto-gari à la volée de M.Izumi (Kisarazu Sogo). En -63kg, Clémence Eme (Stade Laurentin Judo) se fait immobiliser en moins d’une minute en kami-shio-gatame. En +78kg, Roudelie Caroly (Flam 91, 5ème aux France 1ère division 2014) ne peut, elle non plus, absolument rien contre le uchi-mata à gauche de son adversaire nippone. En -66kg, Daïki Bouba (JC Escales Argenteuil) fait forte impression sur la journée : posture droite, solide, belle attitude. Malheureusement pour lui, K. Tagawa (Nagasaki Nichidai) le rend impuissant lors d’une finale très rythmée que le Japonais remporte d’un yuko.
En -73kg, Antonin Blandin (2e au France juniors 2014) se fait punir au sol en finale. Enfin, en -90kg et en -100kg, Cédric Olivar (AJ61, 3e à Cormelles en 2014) et Hadrien Livolsi (vice-champion de France juniors 2014) subissent la loi japonaise, respectivement sur un superbe tai-otoshi et un non moins joli tani-otoshi.
Du bel ouvrage.