Deux Français attendus, deux Français en finale, deux médaillés mondiaux dans une phase de reconquête, le double médaillé mondial Axel Clerget en -90kg et la championne du monde et vice-championne olympique Madeleine Malonga en -78kg. Dans les deux cas, la démonstration avait été très belle jusqu’à la phase finale, dans les deux cas, elle allait se heurter aux limites du jour face à des adversaires sur le même mode qu’eux et juste un ton au-dessus.
Pour Axel Clerget, il s’agissait de l’ancien champion du monde hongrois de vingt-neuf ans, Krisztian Toth, dans une phase de retour lui aussi après ses deux remarquables médailles de bronze aux championnats du monde 2021 et aux Jeux de Tokyo un mois plus tard.
Le combat partait sur des bases très rapides et très dures sur les mains et dans les têtes, personne ne voulant laisser aucun avantage à son très expérimenté adversaire. Et c’est d’abord le Hongrois qui prenait ses distances aux pénalités, avant que qu’Axel Clerget égalise pour un seoi-nage trop faible du râblé Krisztian Toth. Tout allait se jouer sur un quitte ou double à une minute au-delà du gong au golden score. Nouvelle séquence d’attaque en seoi-nage du Hongrois, que le Français, qui avait ce geste en tête depuis le début, tentait de contrer en passant dans son dos pour le ramener. Bien vu… mais Toth avait judicieusement changé l’orientation de son mouvement, prenant au vol le contrôle de l’autre épaule pour accompagner le mouvement à son avantage. La video confirmait la première intention de l’arbitre et le waza-ari décisif était donné à Toth, victorieux pour la première fois d’un tournoi depuis le Grand Prix de Budapest 2018. Tout se terminait dans des grands sourires de part et d’autre, et des claques sur les épaules.
De l’argent pour Clerget, c’est frustrant, mais c’est aussi la deuxième médaille en Grand Prix en 2023 du champion de trente-six ans. Maître des horloges, il est bien décidé à hausser encore le niveau en temps et en heure. En attendant, il se rapproche au classement mondial, et il faudra être attentif du côté d’Alexis Mathieu et de Maxime-Gael Ngayap Hambou pour lui barrer clairement la route de Paris.
Wagner… mais aussi Lytvynenko
Madeleine Malonga avait elle aussi retrouvé sa détermination et son impact… mais elle faisait face à celle qui lui avait déjà montré en 2021 qu’il y avait un nouveau shérif en Europe de l’Ouest, l’Allemande Ana-Maria Wagner. Championne du monde et médaillée olympique, Wagner avait lâché beaucoup de lest depuis. Elle est elle aussi de retour à Linz pour ce choc, « remake » d’une finale de championnat du monde. Madeleine Malonga prenait les choses en main et tentait de déborder son adversaire, comme à ses plus beaux jours, en o-soto-gari en garde unilatérale, mais l’Allemande assume désormais à ce niveau et renvoyait la charge à l’envoyeur dès la première séquence. Au passage des deux minutes, elle affirmait sa supériorité et repoussait une nouvelle fois Malonga vers l’arrière sur son o-soto-gari, cette fois en marquant waza-ari debout, bientôt enchaîné au sol sans trop de résistance du côté tricolore.
Une finale qui conforte malgré tout celle que Malonga va chercher à Tel Aviv en février dernier, mais qui confirme que l’opposition européenne est désormais redoutable pour les Françaises dans cette catégorie, non seulement par l’Allemande Wagner, de retour au premier plan, mais aussi une remarquable combattante ukrainienne, Yelyzaveta Lytvynenko, déjà médaillée mondiale, que Malonga ne passe en demi que par une disqualification pour « diving » très douteuse (la nouvelle tendance de la réglementation), et qui a fait feu de tous bois toute la journée, avec une tendance très judo. C’est elle qui crève l’écran. La catégorie est en friche, mais elle est riche !
Krpalek, jusqu’à quand ?
Le Brésil nous propose aujourd’hui de nouvelles belles promesses, un excellent technicien en -100kg, Léonardo Goncalves, très propre en finale sur l’Allemand Louis Mai avec son uchi-mata, et une nouvelle lourde en +78kg, Giovanna Santos, en bronze avec un sasae en sursaut très technique contre l’Italienne Tavano, celle qui avait battu la Française Dicko aux championnats du monde.
Une fois encore, l’arbitrage laisse passer entre les mailles de son filet à géométrie variable le prestigieux double champion olympique tchèque Lukas Krpalek, de retour en lourds quinze jours après sa finale mondiale de Doha disputée en -100kg, catégorie dans laquelle il compte réussir la passe de trois aux Jeux dans un an alors qu’il a annoncé vouloir être qualifiable dans les deux. Il était remarquable de lucidité tactique, mais très en difficulté debout et auteur d’amenées au sol à répétition, dont on avait pourtant cru comprendre qu’elles étaient interdites. Une nouvelle protestation en perspective de ses adversaires, notamment en finale le jeune Allemand Losseni Kone, cinquième des championnats du monde, et peut-être une prise de conscience tardive ? À suivre, puisque tout est possible.
C’est finalement, sans faire de bruit, et avec une équipe jeune et peu expérimentée, le Japon qui tire encore une fois le mieux parti de ses quatre finales (pour trois médailles d’or), devant les quatre finales allemandes (pour une médaille d’or) et les trois finales françaises (pour une médaille d’or). Un titre qui tombe du côté de Valadier-Picard en -60kg lors de la première journée, rappelons-le, son premier titre en Grand Prix, de quoi conforter l’un des plus espoirs français les plus prometteurs.