Les deux Français finissent finalement en argent

Troisième et dernier jour de ce Grand Chelem de Tokyo. Cinq catégories (-90kg, -100kg, +100kg, -78kg et +78kg), deux Français en finale, leurs vainqueurs qui font belle impression et des Japonais encore dominants.

Axel Clerget en argent ce dimanche à Tokyo. Crédit photo : Emmanuel Charlot

L’occasion était belle d’enfin offrir à Larbi Benboudaoud un successeur.
Dix-sept ans qu’aucun Français ne s’est plus imposé sur les tapis tokyoïtes et la victoire du vice-champion olympique de Sydney. Avec les finales d’Axel Clerget et de Cyrille Maret, on se disait que le signe indien allait enfin être brisé. Sauf que. Sauf que les deux Français sont tombés sur deux clients qui s’affirment et posent des jalons dès le début de cette nouvelle olympiade. Aleksandar Kukolj d’un côté, Kirill Denisov (dans une nouvelle catégorie pour lui) de l’autre.
Alors à bien y regarder les regrets peuvent être plus prononcés chez Axel Clerget qui, après un bon début de combat tout en rythme, se fixe sur une séquence à mi- combat. Suffisant pour Kukolj, qui lance un kata-guruma assez lent mais très bien placé et profond. Waza-ari. Obligé de prendre des risques, Clerget se fait à nouveau surprendre dans une séquence pendant laquelle le Serbe fait preuve d’une belle agilité pour passer sa hanche tout en chassant la jambe droite du Français et marquer un second waza-ari qui scelle cette finale. Dommage. Deuxième finale en Grand Chelem en un mois et deuxième défaite pour Clerget face à ce Serbe aux qualités gymniques évidentes et au judo complet (il s’impose lors de son premier combat après une longue séquence au sol). Pourtant, à la manière d’une Margaux Pinot hier, l’ainé de la famille de Marnaval a montré, malgré un état de forme loin d’être optimal et un manque d’efficacité dans les attaques (voir sa réaction), qu’il était capable de passer des tours dans une compétition de haut niveau international grâce à son kumikata et au rythme mis. Une donnée très intéressante pour les prochaines grosses échéances. 
Cyrille Maret, lui « a fait avec les moyens du bord », comme il l’analysait après sa finale. Redescendu avec difficulté dans sa catégorie après l’intermède réussi des championnats de France, le médaillé olympique s’estimait à « 50% aujourd’hui ». Et cela s’est vu lors de la finale contre le Russe Denisov, dont la transition de catégorie se passe clairement pour le mieux. Plus petit que le Dijonnais, il a dégagé non seulement une impression de puissance avec son kumikata à gauche qui tracte beaucoup mais aussi toujours de magnifiques dispositions techniques qui semblent dérouter les -100 kg, avec une façon d’exploiter le déplacement en cercle qui gêna beaucoup Cyrille Maret. Il s’impose au Français sur un uchi-mata gaeshi pour s’adjuger, après le Grand Prix de Chine, un second titre international en un mois. Voilà un sérieux concurrent européen qui déboule et prend déjà position pour les Europe et les Monde 2017, objectifs affichés du médaillé olympique tricolore. La bataille sera rude. 

Cyrille Maret et Kirill Denisov à la fin de leur finale. Crédit photo : Emmanuel Charlot

Kentaro Iida, Sarah Asahina, Kokoro Kageura, Hyoga Ota, génération montante nipponne

C’était l’une des satisfactions de Kosei Inoue lorsqu’il faisait le bilan hier, devant un essaim de caméras et de micros, des résultats de ses poulains : les jeunes judokas japonais sélectionnés ont su saisir la chance qu’il leur était donnée. Un constat qui resta en tout point valable ce dimanche. Un exemple ? Kentaro Iida (-100kg), 18 ans et encore lycéen, finit 3e de ce qui était sa première compétition internationale senior ! Avec son uchi-mata qui percute et monte haut et sa nonchalance trompeuse, il ne s’incline aujourd’hui que contre Denisov d’une pénalité. Un talent qu’il faudra suivre de près hors de ses bases nippones. Même remarque pour deux copains de l’équipe de l’université de Tokai, les lourds Kokoro Kageura, déjà champion d’Asie senior, et Hyoga Ota. Le premier a prouvé une capacité à profiter d’attaques d’adversaires plus puissants et plus lourds qu’il sut retourner contre eux, notamment le solide Shichinohe, mystifié par un ko-soto-gake en contre à queques secondes de la fin d’un combat qu’il menait. En finale, il perd contre son « sempai » Takeshi Okjitani, pesé à 143 kilos ce matin, d’un shido. Le second s’est fait remarquer notamment grâce à un o-guruma en place de 3e qui fut LE mouvement de la phase finale, finalement assez pauvre en judo.
Sarah Asahina, enfin, n’est pas une novice sur le circuit mondial. Du coup on peut parfois oublier qu’elle n’a que 20 ans. Sera-t-elle la lourde capable de ramener le titre olympique « à la maison » ? Il est trop tôt pour le dire, mais sa victoire ici, contre ses principales rivales nationales, la positionne déjà comme prétendante claire au leadership chez les +78kg japonaises en ce début d’olympiade. Peu sortie sur le circuit international depuis deux ans, ses prestations lors de la tournée européenne seront un bon indicateur de sa capacité à se positionner comme une des meilleures combattantes de sa catégorie. Cet après-midi, elle remporte en effet son premier Grand Chelem, elle qui détient le record de précocité pour une victoire sur le circuit international (lors du Continental Open de Sofia en 2013). Mais on peut aussi évoquer son adversaire en finale, la très dynamique Akira Sone… 16 ans, et une sacrée détermination ! A quand le duel avec Romane Dicko ? Ça donne envie de voir ça.

Trois nouveaux titres aujourd’hui pour le Japon qui finit avec un bilan de dix médailles d’or, neuf d’argent et seize de bronze. Soit trente-cinq médailles glanées ces trois jours ! La Russie finit deuxième nation avec un titre et trois médailles de bronze. Une médaille de plus, dans ce métal, que la Mongolie. La France finit, elle, avec deux médailles d’argent et une de bronze.